La langue d’origine, la langue de prédilection

samedi, 10 février 2018

La « production littéraire dans la langue d'origine chez les Marocains du monde » est le thème de la deuxième table-ronde organisée ce samedi 10 février 2018 au stand de Conseil de la communauté marocaine à l’étranger (CCME) au Salon du livre de Casablanca.

MM. Abdelhamid Bajouki, acteur associatif maroco-espagnol, Mohamed Miloud Gharrafi, poète et romancier franco-marocain et Taha Adnane, poète et écrivain belgo-marocain, ont participé à cette rencontre animée par M. Abdellatif Maroufi, chargé de mission au CCME.

J3 TR 2 MAROUFIDans sa présentation M. Maroufi a mis en avant « l’extraordinaire diversité de la communauté marocaine à l’étranger, estimée à plus de 5 millions de personnes vivant dans plus de 100 pays » et les mutations profondes qu’elle a connu, d’abord démographique, par l’accroissement de son nombre, puis sa féminisation, son rajeunissement et tous les changements économiques et culturels qui se sont opérés avec son évolution dans les pays d’accueil.

Abdelhamid Bejouki : une vision de la littérature marocaine née à l'étranger 

bejokiPour M. Bejouki, l'immigration marocaine a participé à l'animation culturelle dans la société espagnole : « les écrivains marocains en Espagne ont rapproché les deux rives et ont mis en œuvre les valeurs communes ». Il s’agit d’une « valeur ajoutée incontestable » pour les deux pays constituée par ces écrivains qui vivent sur les frontières, « pas au sens sens géographique mais surtout culturel, sur les bords communs de deux civilisations ».    

L’associatif maroco-espanol qualifie dans ce cadre la littérature marocaine dans la langue d’origine de « réaliste, transnationale et hybride » qui a pu remettre en question les préjugés et les stéréotypes des espagnols sur l'individu marocain en Espagne, ou sur, plus exactement, le "mauro" (en référence aux mauresques).

M. Bejouki a donné plusieurs exemples d’écrivains marocains qui ont un impact dans le paysage artistique de part et d’autre de la Méditerranée, comme notamment le pionnier Mohamed Ben Azouz qui publia en 1942 le premier ouvrage en prose marocaine en espagnol intitulé « Voyage en Andalousie », Abdellatif Al-Khatib ou Mohamed Temsamani.

Répondant à la question de l’animateur de la table-ronde sur les raisons qui l’ont poussé à publier un roman en langue arabe, l’intervenant a répondu que ses trois romans en espagnol traitent de questions professionnelles, juridique notamment mais quand « j’ai eu besoin de me confier je l’ai fait dans ma langue natale ».  

Mohammed Miloud El Gharrafi : la littérature en langue d’origine n’est pas un phénomène  

J3 TR 2 GUERAFIPour commencer son intervention, M. El Gharrafi s’est posé la question « on me dit pourquoi tu écris en arabe après 28 ans en immigration ? Poserait- on cette question à un espagnol qui vit en France et qui écrit en langue espagnole ? ».

Pour le romancier, écrire dans la langue d’origine n’est pas un phénomène mais un « acte naturel » pour toute cette génération d’écrivains qui avait déjà commencé l’écriture dans leur pays d’origine et qui ont fait le choix d’immigrer « non pas par passion pour la francophonie pour un besoin d’évoluer ».

« Les caractéristiques objectives de la littérature dans la langue d'origine de nos jours, notamment en arabe, ne se suffit plus de traiter les problèmes de l’immigration mais soulève des problématiques plus profondes, comme la place de l'intellectuel arabe dans le paysage artistique des pays d'immigration, par exemple », a poursuivi M. El Gharrafi.

Elle a aussi d’autres caractéristiques, au sens où « elle constitue une coupure avec les écritures classiques sur l’immigration sur tous les plans et où elle fait intervenir de plus en plus des termes issus d’autres langues », ceci s’explique par le fait que « ces écrivains sont de plus en plus conscients de la situation des personnages de l’histoire dans son cadre social ».

Taha Adnane : « le melting-pot bruxellois m’a permis de préserver mon identité »

J3 TR 2 TAHALe poète Taha Adnane dit qu’il « arrive en 1996 à Bruxelles comme un produit-semi-fini, dont la base s’était constitué au Maroc ». Essentiellement marocain, « je m’exprimais plus facilement en arabe classique, que je définis comme la langue du père, celui qui nous l’a appris, car la langue mère est bien le dialecte marocain ».

« Contrairement à Paris, la capitale de la langue française, à Madrid capitale de la langue espagnole ou à Berlin, capitale de la langue allemande, Bruxells avait pour moi cette avantage de vivre dans l'insécurité linguistique », a-t-il indiqué.

« Ne pas avoir besoin de se conformer à une langue pure, comme ça aurait pu arriver ailleurs, m’a permis de préserver ma langue arabe, mon identité », une chance quand réalise que « l'arabe est la quatrième langue utilisée à Bruxelles, une langue donc bruxelloise qui ne subit les conséquences du complexe de la différence ».

La rédaction

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