Simon Serfaty : le Maroc, un médiateur efficace dans les conflits mondiaux

dimanche, 16 février 2020

L’éminent professeur et expert des relations internationales Simon Serfaty a clôturé le cycle des tables-rondes et rencontres organisées par le CCME à la 26e édition du Salon du livre de Casablanca tenue du 6 au 16 février 2020. Il a répondu aux questions de Daniel Amar, membre du CCME au Canada, sur les atouts géopolitiques du Royaume lors d’une rencontre sous le thème « lien invisible : vision, perception et représentation du Maroc sur la scène géostratégique ».

Daniel Amar

Daniel Amar, membre du CCME au Canada

Simon Serfaty, citoyen américain depuis 1965, dit porter « confortablement sa marocanité », ou la manière d’appartenir à un pays qui fait l’exception. « Une voie crédible et modérée parmi les pays arabes qui reste la preuve évidente que le dialogue judéo-arabe-berbère est possible et réel, une singularité que les communautés juives marocaines à l’étranger évoquent avec régularité et cultivent avec fierté ».

Dans une ère de rupture, le Maroc compte parmi les acteurs respectés et sollicités dans le concert des nations. « Dès juin 2004, les USA le désignaient comme allié majeur hors OTAN, en 2008 il s’est vu octroyer un statut avancé auprès de l’UE et en 2009, le Royaume rejoignait le Centre Nord-Sud du Conseil de l’Europe ». Des étapes parmi tant d’autres qui justifierait l’optimisme de Simon Serfaty qui « n’est pas complaisant quant à la représentation du Maroc dans les années à venir ».

Serfaty

Simon Serfaty, professeur et expert des relations internationales

Avant d’expliquer les atouts géopolitiques du Royaume et les possibilités de son avenir stratégique à l’horizon 2030, professeur Serfaty établit un état des lieux des grandes orientations géopolitiques mondiales. « Quatre têtes de série dirigent ses orientations : les USA, avec ou en dépit de Trump, l’Europe, quelque soit la suite des négociations avec le Royaume-Uni, la Russie, et la Chine ».

D’ici 2030, les états du monde devront évoluer autour de ces quatre pôles selon quatre règles de conduite. « Chercher des alliés, car même une puissance hors-pair ne peut pas s’en passer, développer des capacités économiques et spirituelles, s’engager à répondre au besoin de l’inclusivité car on ne peut plus limiter nos compétences à un seul domaine et se moderniser car nous devons répondre à un agenda posthumain ».

Des défis à relever dans un monde où « le sentiment d’incertitude se traduit au niveau politique par des populismes exécrables » et où il faudra rassurer par rapport à six questionnements majeurs auxquels Simon Serfaty répond sans broncher. « Peut-on encore compter sur l’Amérique? Moins. L’Europe compte-elle encore? Partiellement. La Russie a-t-elle un avenir? Sceptique. Comment traiter la Chine? Soigneusement. L’engrenage au Proche-Orient ? Dangereux et puis ou sera le prochain Japon ? Ailleurs ».

Quels sont alors les outils d’affronter l’avenir avec « une diplomatie qui se meure et un monde qui évolue au fil des tweets? Peut-on apprivoiser « la tyrannie des petits événements? », car les « grands conflits sont aujourd’hui créés par des petites choses comme ce pauvre homme en Tunisie qui a donné naissance au printemps arabes ». Les grandes choses semblent alors plus facile à gérer que les petites choses, il faudra « en être conscients en tant que décideurs ».

Pour Simon Serfaty, « le prochain siècle appartient à l’Afrique et seul le Maroc semble le comprendre ». Un Maroc « géographiquement pivot et tricontinental », « une puissance moyenne mais complète et réelle », un pays « fiable car il y a une continuité dans ses positions et dans ses actes ».

Le Royaume est « en marche pour réaliser ses objectifs car il a une diplomatie efficace depuis une vingtaine d’années pas seulement en Afrique mais dans d’autres sphères occidentales. Il répond alors à un profil d’allié et partenaire stable qui a peut avoir trois rôles majeurs en tant que médiateur, en tant que rassembleur et sur le plan sécuritaire ». En tant que médiateur « car nous avons besoin d’états qui peuvent en finir avec des conflits, et en ce sens le Maroc a eu une politique qui lui a évité de s’enfoncer dans le gouffre géostratégique ». Un rôle sécuritaire au vu de ses capacités militaires notamment au Mali et dans les zones de conflits en Afrique et puis un pays rassembleur, un rôle qui serait intrinsèquement lié à son identité tricontinentale.

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M. Abdellah Boussouf, Secrétaire général du Conseil de la communauté marocaine à l’étranger (CCME), a participé à ce panel pour clôturer « un beau voyage intellectuel que le conseil a entrepris tout au long du salon du livre cette année ». Le cours magistral du professeur Serfaty aura ouvert « pour le CCME de nouvelles perspectives de réflexion sur la place du Maroc dans le monde et sa capacité de rayonner à travers sa diaspora ».

Selon M. Boussouf, le Maroc de demain doit « oser jouer la carte de la spiritualité et de la culture dans la médiation des conflits internationaux », un rôle qu’il faudra développer à travers « des politiques publiques qui n’ont pas encore été élaborées ».

Les images éloquentes de la rencontre du Pape avec Sa Majesté le Roi et l’engouement des peuples africains frères lors des visites royales dans le continent sont un message d’espoir pour un monde meilleur où le Maroc pourra mettre en oeuvre ses capacités de médiation et de rassemblement.

CCME

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