La cour d'assises du Haut-Rhin a condamné jeudi à 20 ans de réclusion criminelle, assortis d'une peine de sûreté de 13 ans, Emmanuel Rist, un néonazi repenti reconnu coupable d'avoir tué un marchand de tapis marocain dans une rue de Gundolsheim (Haut-Rhin) en 2001.
La cour n'a pas retenu la préméditation, contrairement à l'avocat général, qui avait requis 30 ans de prison dont 22 ans de sûreté.
Elle a par ailleurs rejeté la demande de confusion de peine de la défense. L'accusé, âgé de 41 ans, purge depuis 2009 une peine de dix ans de réclusion criminelle pour avoir grièvement blessé un retraité marocain en piégeant son cabanon à l'explosif en 2005 à Rouffach.
Rist a aussi été condamné à 30 mois d'emprisonnement en septembre 2007, pour la profanation du cimetière juif d'Herrlisheim en avril 2004.
L'avocat de Rist, Me Renaud Bettcher, a déclaré que son client ne ferait pas appel, et qu'il tâcherait d'obtenir la confusion des peines, "qui peut être demandée à tout moment, à partir d'un certain délai".
L'avocat général François Jurdey et Me Renaud Bettcher avaient ferraillé dans leurs plaidoiries jeudi sur la question de la préméditation, au centre des débats après qu'Emmanuel Rist eut reconnu lundi avoir tué d'une balle dans le tête le 22 mai 2001 Mohammed Madsini, un homme de 46 ans père de cinq enfants.
Pour l'avocat général, Emmanuel Rist a "manifestement" prémédité son geste. La semaine précédant son meurtre, il avait diffusé un tract signé de son "parti" où il promettait de mener des "raids punitifs" contre "la race inférieure".
"Il va mettre ses menaces à exécution, il va tourner dans les environs pour chercher un Maghrébin (...) Il est tombé sur ce pauvre M. Madsini, il l'a suivi, il l'a guetté. Il a garé son véhicule (...) il a cherché l'arme dans la boîte à gant, armé le pistolet, descendu la rue, il a chassé Madsini, il est arrivé derrière lui, il lui a tiré une balle dans la tête à courte distance", a-t-il relaté.
Scénario contesté par Me Renaud Bettcher, qui a soutenu que Mohammed Madsini, à qui Rist avait intimé de quitter Gundolsheim au prétexte qu'il s'agissait d'une "zone germanique", "s'est dressé contre son agresseur illégitime", ce qui a conduit au drame.
"Emmanuel Rist n'est pas courageux. Il a besoin de bouffer des stéroïdes pour passer de 70 à 110 kilos. Il a besoin d'avoir de gros bras, de montrer qu'il en impose (...). C'est quand Madsini est revenu sur lui qu'il a pris peur (...) Il est mort de trouille et va tirer", a soutenu Me Renaud Bettcher. Le coup serait parti quasiment par accident.
"Raciste patenté" qui exposait fièrement ses reliques du IIIe Reich, Rist a aujourd'hui "changé", a assuré l'avocat, rappelant les larmes de son client lors du procès. A l'issue des débats, celui-ci a demandé pardon au fils de la victime, Mimoun Madsini, avec des accents de sincérité qui ont ému les jurés.
Pour l'avocat général et la partie civile au contraire, Rist ne s'est nullement amendé. "Il y a une évolution du discours (d'Emmanuel Rist) mais pas d'évolution personnelle", a martelé l'avocate des cinq enfants de Mohammed Madsini, Anouk Leven-Edel, pour qui l'accusé ne s'est résolu à des aveux partiels que "pour éviter le pire".
Mimoun Madsini s'est dit "satisfait" de la peine. L'accusé encourait la perpétuité.
24/6/2011
Source : Le Figaro/AFP