Le rayon alimentaire halal ne s’est jamais aussi bien porté en Alsace et en France, mais contrairement à ce que soutiennent les tenants de la thèse de l’islamisation du pays, c’est une preuve d’intégration au modèle alimentaire français.
« La génération de mon père, née au village, acceptait de manger du bœuf pendant des semaines quand on en tuait un. Ma génération a voulu pouvoir profiter de la gastronomie alsacienne, tartes flambées ou choucroute, ou française, pour autant qu’elles soient halal. Nos enfants ont envie de manger un hamburger ou une pizza comme leurs copains », analyse Salih Asan, 43 ans, président de la holding Pro-Inter, une chaîne de cinq supermarchés halal du Bas-Rhin. 90 salariés et plus de 20 millions d’euros de chiffre d’affaires l’année dernière, en progression de 5 % à 10 % par an.
La réussite de cette chaîne illustre l’évolution du comportement de la deuxième et aujourd’hui troisième génération d’enfants d’immigrés. Comme Nour, 30 ans, jeune mère de famille de deux enfants de Molsheim, d’origine tunisienne, qui n’hésite pas à reconnaître qu’outre le respect religieux, le ramadan est pour elle l’occasion de maigrir.
Le déclic grand public a peut-être été la décision récente de la chaîne Quick d’ouvrir des fast-foods 100 % halal. Coup de pub réussi au regard des retombées médiatiques, mais surtout prise de conscience que désormais les musulmans d’origine turque ne veulent plus être cantonnés au kebab et les Nord-Africains au couscous.
« Toutes les multinationales de l’agro-alimentaire proposent désormais des gammes halal grand public. Fleury-Michon offre une gamme de charcuterie halal. Le groupe Lesieur développe une gamme halal sous la marque Zakia. Au rayon des surgelés, nous avons des hachis parmentier halal de la marque Maggi ou des recettes bien françaises comme des cordons bleus », expose Salih Asan. Même les confiseries Haribo, adorées des gamins, ont désormais leur gamme halal, produite en Turquie.
« Nous proposons du foie gras du sud-ouest mais aussi des tartes flambées produites à Mommenheim, où les lardons sont remplacés par des morceaux de magrets d’oie fumés. De même, la marque Dounia nous fournit en choucroute garnie. »
Longtemps considéré comme une niche ethnique, le halal sort du bois. Les majors de l’agroalimentaire n’hésitent plus à décrocher leur téléphone pour proposer à Pro-Inter des promotions ou des animations en magasins. Comme dans la grande distribution traditionnelle qui, en réponse, multiplie les opérations « Saveurs orientales » à l’approche du ramadan.
La tendance parait sans fin puisque des producteurs, tel le Mulhousien Malaika, ou le Strasbourgeois Oummi, investissent désormais le marché du pot pour bébé halal.
Pour l’heure, le grand succès est la gamme des sauces Halaland, présentées dans des flacons souples copiés de ceux de ketchup, comprenant une sauce blanche, pour Doner, et une autre, rouge bien sûr, pour Burger.
09/08/2011, Michel Arnould
Source : L’Alsace