lundi 25 novembre 2024 00:47

Réécriture de l'histoire morisque à travers des recherches, des analyses et des débats constructifs.

«Les Morisques et leur héritage: d'hier à aujourd'hui» est le thème autour duquel ont tourné les interventions du colloque international organisé par l'Institut des études hispano-lusophones (Université Mohammed V-Agdal, Rabat) en collaboration avec la Faculté des Lettres et des Sciences Humaines Ben Msik (Casablanca), les 28 et 29 octobre dernier au siège de l'IEHL.

Cette rencontre, initiée à l'occasion du IVe centenaire de l'expulsion des Morisques de l'Espagne (1609-2009), s'est poursuivie les 30 et 31 du mois dernier à la Faculté des lettres et des sciences humaines (Casablanca) pour débattre du même sujet ayant une importance historique, aussi bien pour le Maroc que pour l'Espagne.

De grands spécialistes en la matière, historiens, linguistes, sociologues et anthropologues, du Monde Arabe, d'Europe et d'Amérique, étaient là pour communiquer leurs points de vues et discuter de cette question qui restera toujours d'actualité pour les deux pays.

Abdelmajid Kaddouri de l'Université Hassan II (Mohammedia-Casablanca) l'a bien souligné dans son exposé intitulé « L'Andalus dans la perception officielle à partir d'une lettre sultanienne » en l'entamant par des phrases très explicites dans ce sens. « L'Andalousie fait partie de l'histoire du Maroc.

Elle constitue un des éléments fondamentaux de la mémoire individuelle et collective du Maroc millénaire. L'Andalus était, est et sera toujours au cœur du débat à propos de la personnalité marocaine. La communication partira d'une lettre sultanienne pour dégager la perception que se font les officiels de l'élément andalous à travers l'histoire du pays ».

Après la séance d'ouverture à laquelle ont pris part d'éminentes personnalités et chercheurs universitaires marocains et espagnols, d'autres professeurs et docteurs ont participé à ce séminaire, abordant chacun la question des Morisques et leur héritage à travers une profonde recherche et une analyse objective sur le sujet.

Plusieurs points furent, ainsi, élucidés au cours de ce riche programme élaboré par les organisateurs du colloque. Leila Maziane (Université Hassan II Mohammedia-Casablanca) a porté un vif intérêt aux transferts linguistiques au Maroc aux XVIIe et XVIIIe siècles en insistant sur le fait que le "XVIe siècle est marqué par l'installation au Maghreb d'un important contingent d'immigrants espagnols, surtout à la suite de l'expulsion des années 1609-1610. Ces exilés appelés communément Morisques ou Andalous introduisent au Maghreb, notamment au Maroc leurs coutumes, leurs techniques et leur savoir-faire ainsi que leur langue, le castillan.

Aussi, le vocabulaire des villes littorales se distingue par l'abondance des emprunts castillans, caractéristiques de l'évolution de leur culture maritime».Mohamed Jadour (Université Hassan II Mohammedia-Casablanca), quant à lui, a abordé dans sa communication la question des Apports morisques en matière des techniques militaires au Maroc, en mettant l'accent sur les empreintes militaires des morisques à l'époque saâdienne. «Il s'agit d'abord de tracer les bases de la contribution des morisques à la modernisation de l'armée marocaine à cette époque, puis de déterminer ensuite leurs apports aux groupes des moudjahidines, d'après leurs carrières et surtout leurs écrits (Les rares témoignages sur leurs passages en exil) souvent encadrés par le désir d'inciter les croyants à recouvrer l'Andalousie et à récupérer les biens confisqués», a-t-il souligné.Maria Filomena Lopes de Barros (Université de Évora, Portugal) nous parle, dans son exposé, de « La première expulsion des musulmans de la Péninsule Ibérique: le cas portugais".

Une époque (décembre 1496) que le roi portugais D. Manuel I relate en publiant un édit de conversion forcée de la minorité juive et musulmane «mudéjar» du Royaume. Maria propose, ainsi, d'analyser cette politique et aussi la position de la propre communauté musulmane, partagée entre ceux qui restent au Portugal et ceux qui optent pour la diaspora, néanmoins pour le dār al-Islām. Beaucoup d'autres interventions ont suivi, tout au long de ce colloque fructueux et analytique, cernant la question de tous les côtés et enlevant, de ce fait, plusieurs points noirs de nos esprits. Des débats et des échanges de points de vues ont pris place au cours des quatre journées et n'ont pas manqué d'intéresser aussi bien les chercheurs que les étudiants présents. Une initiative très porteuse, car seule cette relecture très objective et bien profonde de l'histoire des morisques parviendra à nous affranchir des idées reçues et à démanteler les stéréotypes au profit de postures équilibrées et raisonnables.


Source : Le Matin

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