Le film "Sac de farine", une production belgo-marocaine, de la réalisatrice Khadija Saidi Leclere, est actuellement en tournage à Ait Ourir, apprend-on auprès des producteurs belges.
Ce long-métrage, tourné au Maroc et en Belgique, est produit par "Sahara Productions", la "Compagnie cinématographique européenne" et "t-chin t-chin Productions" avec notamment le soutien du Centre cinématographique marocain (CCM).
Ce long métrage (90 mn) raconte l'histoire de Sarah, fille de 8 ans d'origine marocaine qui, dans les années 70, grandit dans un foyer d'accueil catholique à Bruxelles.
Elève studieuse, lectrice assidue, elle voit un jour arriver son père biologique qui lui promet un week-end à Paris. Mais au lieu de cela, il l'emmène dans sa famille au Maroc et repart aussi vite en laissant Sarah, sans explication.
Prisonnière du choix du père, elle n'aura d'autre possibilité que de se résigner. Elle mènera la vie d'une petite fille marocaine où la seule scolarité qui lui est proposée est celle de l'école du tricot.
Quelques années plus tard, Sarah a 17 ans et semble avoir trouvé une vie stable. Toutefois son envie de partir, de retrouver la Belgique de son enfance, l'école, les livres et une vie qu'elle imagine libre reste présente.
"Le sac de farine", premier long-métrage de la réalisatrice belgo-marocaine Khadija Saidi Leclere, est une fiction mêlée d'autobiographie. Il s'agit d'une "aventure humaine", à travers laquelle la réalisatrice jette un regard sur le problème de l'intégration et de la bi-culturalité, de "la recherche de la véritable identité profonde".
C'est toujours la problématique du retour au pays d'origine qui est posée, et de la quête de ses racines. Mais ce film aborde le cas d'une jeune femme qui est née en Belgique et qui y a passé son enfance. Elle découvre à son adolescence la culture, les traditions et le mode de vie de son pays d'origine, trouve l'amour et l'affection parmi sa famille, mais demeure déchirée entre une vie toute tracée au Maroc et sa vie en Europe, explique à la MAP le producteur belge Gaetan David.
Elle finira par quitter le Maroc qu'elle avait appris à aimer, avec une certaine amertume, convaincue de perdre quelque chose d'important, mais aussi plus forte que jamais et convaincue de pouvoir enfin vivre sa vie, ajoute-t-il.
La réalisatrice a fait appel à des acteurs marocains : Abderraouf, Souad Saber, Latifa Ahrare, Hassan Foulane, Faouzi Bensaidi, Mohamed Atifi, Jawad Sayeh, Khadija Jamal et Fadila Benmoussa, mais aussi à des acteurs maghrébins établis en Belgique et en France, comme Smain, Hafsia Herzi, Mehdi Dehbi et la comédienne arabo-israélienne Hiam Abbas.
Ce film dont la sortie en salles est prévue pour 2012 est réalisé avec un budget de près de 2,2 millions d'euros.
La réalisatrice du film, Khadija Leclere, est diplômée du Conservatoire Royal d'art dramatique de Bruxelles en 1997, et a travaillé comme directrice de casting. Elle a réalisé trois courts métrages: "Camille" qui sera son école de cinéma, "Sarah" son premier court-métrage professionnel, primé dans plusieurs festivals internationaux notamment celui de Dubaï, Namur, Miami, et Milan, et le dernier en date "la pelote de laine".
28/02/11, Mahjouba Agouzal
Source : MAP
Nicolas Sarkozy a dit dimanche avoir demandé à l'Union européenne (UE) la réunion d'un sommet pour décider d'une "stratégie commune" face à la crise libyenne et aux menaces qu'elle fait peser en matière d'immigration, lors d'une allocution radio-télévisée.
"La France a demandé que le Conseil européen se réunisse pour que l'Europe adopte une stratégie commune face à la crise libyenne, dont les conséquences pourraient être très lourdes pour la stabilité de toute la région", a déclaré le chef de l'Etat.
Lors de sa visite vendredi en Turquie, M. Sarkozy s'était déjà prononcé pour la réunion d'un "Conseil européen sur cette question-là, de l'Union pour la Méditerranée et de l'avenir des relations de l'Europe et des pays du Moyen-Orient". "C'est un sujet extrêmement complexe, difficile mais qu'il faut affronter en ayant la perspective de l'avenir", avait-il déclaré lors d'une conférence de presse avec son homologue turc Abdullah Gül.
Dimanche soir, le président a souligné les risques de dérapages violents dans les pays arabes.
"Ils peuvent aussi bien sombrer dans la violence et déboucher sur des dictatures pires encore que les précédentes. Nous savons ce que pourraient être les conséquences de telles tragédies sur des flux migratoires incontrôlables et sur le terrorisme", a-t-il déclaré.
Ces derniers jours, l'Italie a mis ses partenaires européens en garde contre un risque humanitaire "catastrophique" et un afflux de réfugiés libyens, mais plusieurs de ses partenaires lui ont opposé une fin de non-recevoir.
27/2/2011
Source : AFP/Le Monde
La situation internationale impose de différer un débat qui s’annonce délicat, estiment plusieurs élus.
L’Élysée et la direction de l’UMP se rendent compte que la programmation, pour le 5 avril, du débat sur la place de l’islam en France a été pour le moins maladroite. Alors que, sur la rive sud de la Méditerranée, le monde arabe est en pleine ébullition, fallait-il ouvrir dans la précipitation un chantier aussi délicat ?
En fin de semaine dernière, l’ancien ministre de l’industrie Christian Estrosi estimait que «la situation internationale crée un trouble et impose de différer ce débat». Peu après, un secrétaire national de l’UMP, joint par La Croix, assurait que la décision était déjà arrêtée de «reporter le débat au 26 avril». Une assertion démentie par l’entourage de Jean-François Copé.
Ces informations contradictoires reflètent bien le malaise suscité par l’initiative prise par le secrétaire général de l’UMP, Jean-François Copé, avec le feu vert du chef de l’État. Au sein de la majorité, de nombreux poids lourds ont fait part de leurs vives réticences. Se souvenant des dérapages du débat sur l’identité nationale qui avait finalement tourné court en 2010, ils craignent que cette nouvelle tentative ne soit pas mieux contrôlée.
Les risques d'un débat insuffisamment «préparé»
Le ministre de la défense, Alain Juppé, ou encore le président du Sénat, Gérard Larcher, ont mis en garde Jean-François Copé sur les risques d’un débat insuffisamment «préparé». Le président de l’Assemblée nationale, Bernard Accoyer, fait part à La Croix des mêmes réserves: «C’est un débat qui doit être soigneusement réfléchi. Mal cadré, il sera contre-productif. L’an dernier, j’avais regretté qu’on parte sur ce thème de l’identité nationale, auquel je préférais celui de l’appartenance à la République.»
En ce domaine, le choix des mots est lourd de conséquence. Selon la formule de Jean-François Copé, la réflexion portera sur «l’exercice des cultes religieux dans la République, avec un point particulier sur l’exercice du culte musulman».
Une formulation qui provoque des polémiques sur deux fronts. Le premier oppose ceux qui refusent de stigmatiser les musulmans et ceux qui veulent briser le tabou sur la place de l’islam. «Focaliser sur le seul islam, ce serait faire une erreur par rapport au principe de laïcité», prévient Gérard Larcher. Dans Le Figaro , vendredi, Édouard Balladur estimait pour sa part: «La France est un pays de tradition catholique qui, l’histoire en témoigne, a du mal à accepter la diversité religieuse. Il faut prendre acte de celle-ci.»
« Remettre en chantier la loi de 1905 serait suicidaire »
L’autre front de divergences, au sein de la droite, concerne la nécessité ou non de réformer la loi de 1905. Après l’annonce de Jean-François Copé, le ministre du logement, Benoist Apparu, s’est déclaré favorable à une réforme législative sur le financement des lieux de culte. Son collègue aux transports, Thierry Mariani, propose d’interdire les prêches en langue arabe…
Ces déclarations ont aussitôt provoqué l’indignation de ceux qui refusent de toucher à la loi de 1905. Dominique Paillé, secrétaire national de l’UMP en charge de l’intégration, accepte un débat «pédagogique, dont le rôle serait de faire comprendre la laïcité». Mais, poursuit-il, «remettre en chantier la loi de 1905 serait suicidaire».
Dans le même sens, Bernard Accoyer estime que l’ouverture du dossier du financement des lieux de culte présente «trop de risques de dérapages.» Pour les chrétiens-sociaux, Christine Boutin explique pour sa part qu’en voulant s’attaquer à quelques abus, c’est tout l’équilibre sur la liberté d’expression qu’on risquerait de bouleverser.
Et puis, l’interdiction des prières dans la rue aux abords des mosquées risque d’avoir des conséquences pour les processions chrétiennes, estime également la présidente du Parti chrétien-démocrate (PCD).
27/2/2011, Bernard GORCE
Source : La Croix
Le énième débat sur l’islam et la République que le chef de l’État a annoncé à TF1 et que l’UMP veut entreprendre début avril est bien mal engagé. Au point même que le ministre de la Défense Alain Juppé – qui n’a pas l’habitude de faire dans la surenchère gauchiste ! – craint les dérapages…
Opposer un « islam de France » et un « islam en France » ne me semble pas une bonne façon de poser le problème. Met-on les catholiques, les juifs et les protestants devant la même alternative ?
Il existe un « catholicisme de France » avec sa Conférence des évêques, les Assemblées plénières de Lourdes, etc. Il n’en existe pas moins un « catholicisme en France ». Ce dernier n’est pas réductible au « catholicisme de France », car le catholicisme est une réalité internationale. Sauf erreur de ma part, son chef spirituel est, en même temps, un chef d’État.
L’ambassadeur du Vatican en France, le nonce apostolique, participe même aux entrevues officielles qui ont lieu entre la délégation catholique et le gouvernement, comme le remarquait un ministre de l’Intérieur, s’appelant Nicolas Sarkozy en réponse à une question de Ph. Verdin sur « l’indépendance des musulmans français » (1).
On constate, certes, une souplesse plus grande de l’épiscopat français sur certaines questions. Ainsi, contrairement à ce qui se passe en Colombie ou en Pologne par exemple, les médecins français catholiques qui pratiquent des IVG ne se trouvent pas menacés d’excommunication.
Mais, sur beaucoup d’autres points, comme le mariage des prêtres ou l’accès des femmes à la prêtrise et au diaconat, ce sont les règles générales, les « normes canoniques » du catholicisme qui s’imposent, même si les enquêtes faites montrent qu’une majorité des catholiques français, y compris chez les catholiques pratiquants (2) ont des attentes différentes.
Qui va affirmer que l’État devrait imposer des femmes prêtres au nom de l’égalité hommes-femmes ou, comme la Révolution française l’a fait, imposer l’autorisation du mariage des prêtres au nom de la liberté individuelle ?
On peut, à titre personnel, sympathiser avec celles et ceux qui luttent pour des changements internes à l’Église catholique, on peut aussi être indifférent en la matière. Mais aucune force politique ou sociale ne va chercher à imposer ces changements. Il est clair que c’est l’affaire du catholicisme. Et ses évolutions comportent des zigzags.
Il en est de même pour l’islam. D’ailleurs, il y a quelque chose que je ne comprends pas. Le même ministre de l’Intérieur, déjà évoqué, a largement contribué, il y a maintenant 7 ans, à organiser un « islam de France » par la création du Conseil français du culte musulman (CFCM ) et des Conseils régionaux du culte musulman (CRCM).
Chacun peut avoir son avis sur ces structures : il n’en demeure pas moins que c’est l’État qui s’est fortement engagé dans cette démarche. L’État ne peut ignorer ou tenir pour négligeable ce dont il est un co-auteur. Serait-ce trop lui demander d’avoir un peu de cohérence interne ?
Il existe donc un islam de France et un islam en France, car l’islam, comme le catholicisme et bien d’autres religions, est une réalité internationale.
Dès maintenant, au-delà de l’organisation spécifique qui a été mise en place, des façons spécifiques et multiples d’être musulman sont en train de se forger en France (et en Europe) ; et une gestion teintée de néo-colonialisme risque d’être contre-productive (3).
Mais c’est à un niveau international que l’islam bouge. Par exemple, un féminisme musulman se développe (4) et, aujourd’hui, on constate la soif de démocratie dans l’ensemble du monde dit « arabo-musulman ».
Ce thème de l’« islam de France » me rappelle un certain discours laïque traditionnel sur les femmes : elles étaient suspectes d’être sous influence cléricale. Il fallait les « éduquer » avant de leur donner le droit de vote. Et naturellement, on considérait qu’elles n’étaient jamais assez éduquées pour l’obtenir. Si bien que le premier projet donnant le droit de vote aux femmes, fut le projet de Constitution élaboré par Vichy !
De même, d’année en année, on a l’impression que les musulmans français ne sont jamais assez français…
Notes :
1. N. Sarkozy, La République, les religions, l’espérance, Paris, Éd. du Cerf, p. 93.
2. 61 % contre 36 % pour le mariage des prêtres, 51 % contre 44 % pour l’accès des femmes à la prêtrise (respectivement 81 % contre 16 % et 67 % contre 31 % chez les catholiques pratiquants irréguliers). Source : enquête CSA-La Vie : « Les attentes des Français à l’égard du prochain pape », 15 avril 2005.
3. Lire, entre autres, l’ouvrage de Franck Frégosi, Penser l’islam dans la laïcité. Les musulmans de France et la République (Éd. Fayard, 2008).
4. Lire sur ce sujet Critique internationale, n° 46, 2010.
* Jean Baubérot, professeur émérite (Sorbonne), est l’auteur d’une quarantaine d’ouvrages, dont Histoire de la laïcité en France et Les Laïcités dans le monde, tous deux parus dans la collection « Que sais-je », aux éditions PUF. Il commente l’actualité sur son blog
Derniers ouvrages parus : Laïcités sans frontières, avec M. Milot (Éd. du Seuil, 2011) ; Sacrée médecine. Histoire et devenir d’un sanctuaire de la Raison, avec R. Liogier (Éd. Entrelacs, 2011).
26 Février 2011, Jean Baubérot
Source : Atlas info
L'historien et politiste Olivier Le Cour Grandmaison dénonce les prélèvements mirifiques opérées par les banques sur l'argent envoyé par les immigrés à leurs familles restées au pays.
Ils ont en moyenne des revenus largement inférieurs aux nationaux des pays dans lesquels ils vivent, ils occupent les emplois les moins qualifiés et les moins bien rémunérés. Ils sont victimes de discriminations à l'embauche, de la précarité et de licenciements qui les frappent plus souvent qu'à leur tour; et pourtant, ils s'obligent à des sacrifices financiers significatifs pour envoyer chaque mois de l'argent à leur famille demeurée au pays. Pauvreté, privations, épreuve douloureuse de l'exil, et pour les sans-papiers la peur constante de l'arrestation et de l'expulsion. Telle est la situation de beaucoup d'immigrés qui vivent en France; elle n'est une douce terre d'accueil que dans les discours ronflants mais fallacieux des membres du gouvernement et de la majorité qui le soutient.
En 2010, les sommes ainsi transférées se sont élevées, au niveau international, à 325 milliards de dollars selon une étude de la Banque mondiale, laquelle constatait aussi que ces montants sont trois fois supérieurs à l'aide publique consentie par les Etats qui, pour les plus riches d'entre eux, ne consacrent que 0,30% de leur revenu national brut à l'aide au développement. Voilà qui en dit long sur la générosité prétendue des principaux bailleurs de fonds et sur le développement solidaire tant vanté par certains ministres de la République qui, en cette matière comme en beaucoup d'autres, se paient à bon compte avec la fausse monnaie de leurs déclarations convenues.
En France, ces transferts atteignent 8 milliards d'euros en 2010, soit une progression de 10% par an depuis 2002. Leurs destinations principales sont les pays du Maghreb et de l'Afrique subsaharienne. Toutes origines confondues, ces sommes représentent 6,6% du PIB du Maroc, 7 % au Togo, 9,1% au Sénégal, entre 11 et 12,5% au Mali et 20% aux Comores. Concrètement, cela signifie que de dizaines voire des centaines de milliers d'hommes, de femmes et d'enfants, sans doute parfois aussi les habitants de villages, voire de quartiers entiers de certaines villes, dépendent très largement de cet argent pour vivre, manger, se loger et, dans le meilleur des cas, étudier. Une manne indispensable donc qui n'a, en l'espèce, rien de céleste puisqu'elle est le fruit du dur labeur de ceux qui ont été contraints à l'exil. A preuve, selon certaines sources, ces transferts de fond représentent plus de 50% des revenus des bénéficiaires au Maroc, au Sénégal et aux Comores, et 2/3 au Mali cependant que près de 80% des sommes ainsi perçues sont affectées à la consommation courante. Comme le note Claire Naiditch, en conclusion de sa thèse d'économie soutenue à l'université de Paris I en 2009, l'argent ainsi envoyé à un «effet positif de court terme sur les revenus des ménages et les indices de pauvreté».
Reste que les immigré(e)s qui travaillent dans les conditions que l'on sait, en prélevant sur leur maigre salaire des sommes substantielles doivent payer, en France notamment, des commissions particulièrement élevées: 15 % en moyenne pour 140 euros envoyés. Toujours selon la Banque mondiale, les tarifs pratiqués dans ce pays sont parmi les plus élevés au monde. Deux opérateurs financiers principaux dominent ce marché international particulièrement lucratif: Western Union et Money Gram qui réalisent environ 65% des opérations et s'enrichissent en touchant chaque jour des commissions très importantes. D'après une étude réalisée par des chercheurs américains, des commissions de 12,5% représentent entre 10 et 15 milliards de dollars par an; au lieu de parvenir à leurs destinataires dans les pays du Sud, ces derniers finissent en partie dans les caisses des sociétés spécialisées en transfert d'argent.
Ce scandale financier et humain est parfaitement connu puisque des experts de la Banque mondiale ont établi de leur côté qu'une baisse de 5% seulement du coût de ces transactions permettrait d'augmenter de 3,5 milliards de dollars par an les sommes envoyées par les immigrés à leur famille et à leurs proches. Lors de la réunion du G8, qui s'est tenu en juillet 2009 à l'Aquila en Italie, les chefs d'Etat et de gouvernement, avaient promis d'agir et de réduire de 50% les coûts réels des transferts à l'horizon 2013. Quelle hâte! Les immigrés concernés seront sans doute particulièrement touchés par tant de prévention à leur endroit. Qu'a fait le ministre français, Eric Besson alors en charge de l'Immigration, de l'Identité nationale, de l'Intégration et du développement prétendument solidaire? Rien ou presque. Quelques négociations ici et là auxquelles s'est ajoutée la rénovation d'un tableau comparatif établi en 2007 par l'Agence française de développement permettant de prendre connaissance des tarifs pratiqués par les différentes sociétés de transferts, les banques et la Poste.
Comme on peut le lire sur le site officiel du ministère de l'Intérieur aujourd'hui en charge de l'Immigration, ce tableau «est l'illustration de l'engagement, aussi bien de l'Etat que des établissements financiers, à aboutir à une plus grande transparence et à une information claire et complète des migrants sur les modalités et coûts de ces envois d'argent». Cette prose convenue et creuse, qui mobilise quelques «éléments de langage» aujourd'hui en vogue parmi les conseillers en communication chargée de promouvoir l'action des membres du gouvernement, n'engage à rien. Plus grave, les tarifs pratiqués restent très onéreux pour les immigrés. De l'aveu même d'Eric Besson, qui a tenu une conférence de presse le 20 mai 2010 sur cette question: «les coûts des transferts de fond demeurent trop élevés, dépassant bien souvent 8 à 10 % de la somme transférée et approchant quelquefois 20%». Remarquable bilan, assurément, de celui qui se vantait de mettre en œuvre une «politique ferme mais humaine» et cherchait à redorer son misérable blason par la promotion d'actions réputées favorables aux migrants et à leur pays d'origine.
Aux responsables politiques qui disent savoir de quoi ils parlent et affirment être bien informés des réalités sur lesquelles ils prétendent agir, recommandons l'expérience simple suivante. Entrez donc dans une agence parisienne de Western Union, par exemple, et vous pourrez constater que la situation n'a pas véritablement changé. A destination de l'Afrique, les «prix du service» sont les suivants: jusqu'à 100 euros, les frais sont de 10 euros, de 100,1 à 200 euros, de 15 euros. Mais ils sont de 8 euros 50 pour un transfert inférieur à 50 euros et de 15 euros pour un transfert compris entre 50, 1 euros et 100 euros selon d'autres tarifs fournis par la Banque Postale cette fois. En effet, dans le cadre d'un partenariat sans doute lucratif établi depuis 1994 avec Western Union, et régulièrement reconduit depuis cette date, la Banque postale propose dans son réseau de plus de 6000 points de vente les prestations de cette société de transfert de fonds. Comme l'a reconnu le vice-président et directeur exécutif de Western Union en Europe, Hikmet Ersek, «la Banque postale nous aide véritablement à étendre l'offre de service (...) en France». Assurément.
Mais quelles sont les conditions financières de cet accord? Combien ces prestations rapportent-elles à la Banque postale? Comment les tarifs sont-ils établis? Impossible de le savoir. Le bilan d'activité et le bilan financier de cet établissement n'en disent rien, et l'un de nos interlocuteurs, salarié de la Banque postale joint par téléphone, a refusé de nous communiquer ces éléments d'information. La Banque postale aurait-elle des choses à cacher en la matière, elle qui communique pourtant régulièrement sur le sujet et a mobilisé il y a peu le joueur de football sénégalais, Mamadou Niang, pour promouvoir la nouvelle tarification applicables aux transferts d'argent? Mystère. Ajoutons enfin que l'Etat est actionnaire à 100% du groupe La Poste et de sa filiale la Banque postale, et que le ministre de tutelle actuel n'est autre qu'Eric Besson qui prétendait, dans le cadre de ces responsabilités passées au ministère de l'Immigration, vouloir faire baisser les tarifs de façon significative. Il n'en a rien fait dans le passé et il persévère dans cette voie lors même qu'il aurait les moyens d'agir. Admirable.
«Service» ose écrire le dirigeant de Western Union. «Service» peut-on lire aussi sur les dépliants fournis aux clients potentiels. Une ignominie bien plutôt qui prospère, dans tous les sens du terme, sur un «marché» toujours «oligopolistique» comme on le reconnait du côté du ministère des Finances cependant qu'à cause de cela les immigré(e)s et leur famille perdent chaque année des sommes très importantes en frais exorbitants.
A quand un véritable service public pour venir vraiment en aide à celles et ceux qui sont victimes de ces pratiques indignes? Il n'y a rien à espérer de ce gouvernement qui s'acharne contre les immigrés et les sans-papiers. Que les candidates et les candidats, qui aspirent à remplacer Nicolas Sarkozy à la présidence de la République en 2012, disent ce qu'ils comptent faire pour que cesse ce scandale. Il y a urgence; la vie de centaines de milliers d'hommes, de femmes et d'enfants, parmi les plus pauvres du monde, dépend en partie de leur réponse.
27 Février 2011, (mediapar)
Source : Atlas info
Plus...
- Monsieur Driss El Yazami souligne l'importance d'intégrer la coopération décentralisée dans l'histoire de l'immigration marocaine.
- Rahma El Mouden: Un parcours inspirant
- Rencontre avec l'autrice et entrepreneure culturelle Chafina Bendahmane
- Immigration en Sicile : 14 000 migrants employés illégalement dans le secteur agricole
- Immigration au Royaume-Uni: Starmer prône une réforme du système