Dans un reportage enregistré en octobre dernier et diffusé dans le cadre de son magazine d’investigation « Inquiesta », les téléspectateurs on même pu entendre le témoignage du Marocain El Hassan Mesrhati, ouvrier agricole, avant que sa vie ne soit brutalement abrégée, lundi dernier, par des balles assassines, dans la commune corse de San Giuliano.
C’est à travers Marounae, guide et interprète de l’équipe réalisatrice du reportage, que Mesrhati s’exprimait. Tous deux ont pris le soin de ne pas se faire filmer de face par l’équipe réalisatrice du reportage « Les filières des sans papiers ».
Le Marocain, obligé depuis son arrivée en Corse en 2006 de vivre dans la clandestinité, affirme que son unique demande de régularisation a été refusée par les autorités préfectorales françaises, malgré le fait que tous les membres de sa famille, déjà établis sur place, disposent de papiers en règle.
En l’absence du RCS, ou « reçu de demande de carte de séjour », Hassan est expulsable, avait souligné le narrateur du reportage.
Devant la tentation de trouver de la main d’oeuvre bon marché, certains employeurs n’hésitent pas à embaucher des clandestins, principalement dans le bâtiment et l’agriculture, à des tarifs dérisoires et avec des conditions de travail plus que pénibles, affirme-t-on.
Dernièrement, la police de Bastia a procédé au démantèlement d’une filière d’immigration clandestine composée de rabatteurs dont un avocat et un médecin français qui sont accusés de monter de vrais-faux dossiers de demande de régularisation.
Même les contrats de travail temporaire, qui permettent aux immigrés de venir travailler en Corse, la plupart du temps pour une saison agricole, sont monnayés au prix fort, selon les témoignages recueillis.
Marouane indique avoir payé 6.000 euros pour avoir son contrat.
« Je les ai payés en cash à une personne qui s’est présentée comme proche du propriétaire chez lequel je venais travailler », affirme-t-il.
Pour ce « clandestin », qui dispose tout de même depuis cinq ans d’un RCS, « on fait venir les ouvriers pour les faire travailler gratuitement. Quand c’est fini, on vous dit bonne journée« .
Un autre cas, celui d’un Tunisien, est plus édifiant.
Faouzi, est un « clandestin » qui paye ses impôts, contracte un crédit bancaire mais se voit refuser ses multiples demandes de régularisation par les autorités corses.
Comble de l’absurde, à Nice il avait reçu une réponse favorable de la préfecture, mais devant l’impossibilité de trouver un emploi sur place, législation oblige, il a du quitter la Côte d’Azur pour rejoindre la Corse où l’offre de travail était plus abondante.
Aujourd’hui, Faouzi est passible d’une mesure de reconduite aux frontières. Malgré cette menace, il avait accepté de se faire filmer à visage découvert et était présent sur le plateau de l’émission « Inquiesta ».
« Selon une note confidentielle de la Police au Frontières (PAF) de la haute Corse, le nombre de « reconduites aux frontières » à atteindre en 2009 est de 180 expulsions, une tous les deux jours », indique-t-on.
L’assassinat, lundi après-midi, d’El Hassan Mesrhati, ouvrier agricole marocain âgé de 40 ans et le suicide, mardi, de son compatriote Mohamed Addi (30 ans), dans une prison corse à la veille de son expulsion de France pour séjour irrégulier, avaient suscité la colère et l’indignation des mouvements des droits de l’Homme et des Associations anti-racistes qui attribuent ces gestes au climat délétère créé par la politique d’immigration adoptée par le gouvernement français.
MAP