jeudi 4 juillet 2024 22:17

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L’enjeu de la reconduite des migrants irréguliers entre Rabat et Madrid

Les chiffres sont impressionnants.  Entre 25.000 et 40.000 jeunes Subsahariens seraient prêts à  franchir les barrières grillagées de Sebta et Mellilia dans les prochains mois. 45.000 d’entre eux auraient déjà réussi leur entrée dans les présides occupés, a rapporté le journal « Le Monde » dans son édition du 18 avril, en se basant sur des statistiques publiées par les autorités marocaines et espagnoles.

« Ces chiffres ont déjà été révélés par le ministère marocain de l’Intérieur mais ils sont relatifs au nombre de  migrants en situation irrégulière concernés  par l’opération de régularisation des sans-papiers. D’ailleurs, ces  statistiques ne concernent pas uniquement les migrants subsahariens mais aussi ceux d’autres nationalités européennes, latino-américaines ou asiatiques », nous a indiqué Stéphane Julinet, chargé du Programme droit des étrangers et plaidoyer au Groupe antiraciste d’accompagnement et de défense des étrangers et migrants (GADEM) avant d’ajouter : « L’Espagne use également de chiffres qui font peur. Il s’agit donc de fuites délibérées à la presse ». 

Mais à quoi jouent les autorités marocaines et espagnoles en faisant circuler pareils chiffres ? « Elles essaient de faire monter les enchères. Le Maroc veut plus d’appui financier et technique de l’Espagne et cette dernière met la pression  sur l’Union européenne  pour disposer de moyens supplémentaires », nous a précisé Stéphane Julinet.   

Pourtant, pour le gouvernement de Mariano Rajoy, la priorité consiste à accorder à la Guardia civil le  pouvoir de reconduire  vers le Maroc les migrants qui arrivent à franchir les barrières séparant Sebta et Mellilia du reste du Maroc dès leur interpellation. Un souhait que l’Espagne tentera de concrétiser  lors de la réunion des chefs d’Etat et de gouvernement des Vingt-huit les 26 et 27 juin prochain à l’occasion de la tenue de la session du Conseil européen. Elle espère ainsi que l’UE va procéder à la signature immédiate avec les pays de transit dont le Maroc d’un accord de rapatriement des migrants.  « Madrid cherche  une interprétation large de cet accord. Elle aspire à procéder à des reconduites sans respecter les procédures individuelles », nous a indiqué notre source.

Le Royaume signera-t-il un tel accord devant la pression conjointe de l’UE et de l’Espagne ?  « Le Maroc ne semble pas opposé au principe de réadmission mais il exige plus de moyens techniques et financiers de la part de l’Espagne. Si cette dernière répond positivement à sa demande,   un accord entre les deux pays sera signé prochainement », nous a révélé notre source. En effet,  le Royaume estime qu’il a « tout », voire « trop » fait pour contrer la pression accrue sur les présides occupés et que c’est aux autorités espagnoles et à l’UE de jouer leur rôle, à savoir mettre en place une coopération technique mais aussi financière avec lui. Les autorités marocaines ne veulent plus accepter de petites contreparties financières, elles espèrent de réels avantages.  A rappeler que Rabat a déjà signé le 23 décembre 2003 dans le plus grand secret un accord permettant  le rapatriement d’immigrés clandestins subsahariens arrêtés par la police espagnole sur l’Ile de Fuerteventura, dans les Iles Canaries.

Si l’on s’en tient aux chiffres officiels, l’accord concernait en 1992 à peine 10 % des quelque 100.000 Subsahariens. En cette même année, le Maroc avait choisi de se rétracter  en demandant que des amendements soient apportés au texte initial. 

23 Avril 2014, Hassan Bentaleb

Source : Libération

 

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