jeudi 4 juillet 2024 22:20

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Nouveau dérapage raciste d'un journal français

Les stéréotypes ont la peau dure. C’est ce que vient de confirmer la une du  quotidien régional français basé à Lyon : «Le Progrès». Une infographie intitulée «Délinquance, à chacun sa spécialité» a présenté un classement de type de délinquance en fonction de la nationalité des auteurs sans préciser pour autant la source de ces statistiques. Ainsi, on y apprend que le trafic de stupéfiants serait une spécialité des Marocains et  des Albanais, la prostitution serait, entre autres,  l’apanage des Africaines, des Roumaines et des Russes. Les Géorgiens seraient des cambrioleurs et les Bulgares, champions du piratage des distributeurs de billets. Quant aux petits vols, la palme revient aux Roms et aux gens du voyage. 

Pour le journal, l’élaboration de cette infographie est basée, essentiellement, sur de nombreux interlocuteurs locaux ainsi que sur le Service d’information, de renseignement et d’analyse stratégique de la criminalité.  Une aberration, selon SOS Racisme, qui rappelle que le fichage ethno-racial est interdit en France par la loi du 6 janvier 1978. «Dans ces conditions, les policiers, les gendarmes et les douaniers qui seraient à la source de cette cartographie réalisée par les journalistes du quotidien «Le Progrès», n’ont pas pu créer des catégories ethniques sans enfreindre la loi», a indiqué un communiqué de l’association française. 

A noter qu’en 2007, le Conseil constitutionnel a réaffirmé cette interdiction en déclarant l’article 63 du projet de loi relative à la maîtrise de l’immigration, à l’intégration et à l’asile, non conforme. L’article prévoyait de légaliser les statistiques faisant apparaître les origines raciales ou ethniques.

Pour les responsables de SOS Racisme, « Le Progrès »  a fait une lecture stigmatisante, ultra-violente et inadmissible pour les populations visées.  Ils qualifient ce travail journalistique de «dérive» et jugent l’article du quotidien comme étant «nauséabond». 

Un état de fait qui a poussé cette  organisation chargée de  lutter contre le racisme, l’antisémitisme et toutes les formes de discrimination, à déposer le  22 avril courant une plainte contre X pour les faits de fichage ethno-racial, diffamation raciale ou provocation à la haine raciale et à la discrimination. Elle compte également saisir la Commission nationale informatique et liberté (CNIL) et le Défenseur des droits «pour faire la lumière sur cette affaire».

De son côté,  la rédaction du journal s’est défendue de toutes intentions stigmatisantes et a présenté ses excuses à ses lecteurs par le fait que certains termes de son infographie ne sont pas assez précis ou maladroits et peuvent, pris isolément, faire accroire des intentions malveillantes.  

Pour elle, les sources de cette enquête sont précises et s’appuient essentiellement sur de nombreux interlocuteurs locaux. Le SIRASCO de la police judiciaire aurait également été sollicité.

Leur version vient, néanmoins, d’être remise en cause par une enquête du magazine français «Les Inrockuptibles», familièrement appelé Les Inrocks, qui a démontré que la brigade de la gendarmerie de Lyon, a nié le fait d’avoir eu d’entretiens avec les journalistes du «Progrès» sur ce dossier. La même infirmation a été réitérée du côté du service de presse de l’Hôtel de police de Lyon et du service de presse de la Direction interrégionale des douanes de Lyon qui a rappelé qu’«il est illégal de tenir des fichiers sur les nationalités des personnes arrêtées et qu’il a encore moins à communiquer sur des nationalités dans les communiqués de presse qu’il envoie régulièrement au Progrès».   

25 Avril 2014, Hassan Bentaleb

Source : Libération

 

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