Après "Illuminations" qui réunissait en un spectacle des jeunes hommes issus de l'immigration, le metteur en scène qui a fait ses débuts, autrefois, au Val Fourré, a choisi dix jeunes femmes, de 18 à 28 ans. L'une après l'autre, elles racontent leurs vies, exposent leurs points de vue. C'est "F(l)ammes. A la Poudrerie de Sevran, avant une longue tournée.
D'abord il y a Sevran et le Théâtre de la Poudrerie que dirige avec fermeté et imagination Valérie Suner. Un théâtre sans lieu mais qui intéresse de nombreux artistes qui ont accepté, ces dernières saisons, de diriger des ateliers et de présenter des spectacles en appartement.
Cela crée des liens et la salle des fêtes de la municipalité du nord de Paris était comble, vendredi soir, pour la première représentation de F(l)ammes.
Un spectacle dont nous aurons l'occasion de reparler puisqu'après les représentations de Sevran, la troupe sera à la Maison des Métallos avant une longue tournée qui la conduira jusqu'au Théâtre des Halles d'Avignon en juillet prochain.I
Dix jeunes filles, jeunes femmes de 18 à 28 ans, des célibataires, des femmes mariées. L'aînée a déjà cinq enfants. De longues séances ont présidé aux choix. Elles se nomment Anissa Aouragh, Ludivine Bah, Chirine Boussaha, Laurène Dulymbois, Dana Fiaque, Yasmina Ghemzi, Maurine Ilahiri, Anissa Kaki, Haby N'Diaye, Inès Zahoré.
Elles sont issues de l'émigration : Maghreb, Afrique noire, Haïti. Mais la Guadeloupe est également représentée : un département français d'Outre-Mer.
Aucune n'est issue de l'immigration asiatique, ce qui aurait pu être intéressant. Aucune n'est une "Gauloise" des quartiers. Ce qui aussi aurait été intéressant.
Elles ont beaucoup travaillé. Elles ont du caractère. De fortes personnalités et physique et sensible. Elles ont de l'énergie et on ne peut qu'être admiratif devant le travail accompli.
Chacune a son moment de monologue, face à la salle. Le "spectacle" est déchiré par des interventions venues de la salle, des discussions chorales, des disputes sérieuses mais sans agressivité.
On pourrait discuter de la succession elle-même des séquences. Par exemple, la parole sur l'excision vient à la fin. Elle pourrait être plus en amont. Car on a le sentiment qu'Ahmed Madani qui a réécrit les interventions avec elles, a pensé aux thématiques qui les concernent. Il est beaucoup question des pères. Peu des grands frères, peu de leurs amours, peu de ce qu'elles rêvent de faire...au-delà de cette expérience exceptionnelle. Ou de ce qu'elles rêvaient de faire avant la rencontre avec l'écrivain et metteur en scène.
Elles bougent très bien. Elles savent danser, chanter. Bref des filles de France d'aujourd'hui, sympathiques, attachantes. Elles ont toutes obtenu le statut d'intermittentes du spectacle pour mener à bien le projet. Elles mesurent leur chance. Mais elles savent qu'elles la doivent d'abord à elle-mêmes.
F(l)ammes suit donc Illumination(s) qui réunissait des jeunes gens. Ahmed Madani terminera avec Des garçons et des filles, titre provisoire d'un travail à venir qui fera une trilogie bien intéressante.
A Sevran, jusqu'au 13 novembre. Puis à la Maison des Métallos, à Paris, du 16 novembre au 4 décembre. Tous renseignements sur la tournée :www.madanicompagnie.fr
6 novembre 2016, Armelle Héliot
Source : lefigaro.fr