La compagnie italienne Grandi Navi Veloci qui avait obtenu l'autorisation des autorités marocaines pour l'exploitation des lignes Sète-Tanger, Sète-Nador et Sète-Genova suite à la faillite de la compagnie marocaine Comanav-Camarit fait la pluie et le beau temps sur les traversées méditerranéennes qui concernent généralement nos compatriotes résidant à l'étranger. Ladite compagnie impose ses conditions aux voyageurs marocains et étrangers pour ne pas dire sa loi.
Au niveau des prix, c'est la flambée. Chaque jour, le coût de la traversée augmente sans aucune réglementation ni contrôle des autorités compétentes. Pourtant, ces dernières ont le devoir de protéger les ressortissants marocains à l'étranger qui empruntent le plus souvent cette ligne maritime pour éviter les longues traversées risquées sur les routes ibériques.
Lorsqu'on est sur les bateaux de la compagnie italienne, il faut se conformer aux «règles» imposées par ses responsables à tous les niveaux. Sur les navires de Grandi Navi Veloci, on doit connaître l'italien, le français ou l'anglais pour pouvoir se retrouver dans les méandres du Fantastic ou du Majestic. L'équipage sur les paquebots qui assurent la traversée entre le Tanger-Med et les villes françaises ou italiennes est à majorité italien et parfois asiatique, ce qui pose souvent des difficultés de communication pour les voyageurs en grande majorité d'origine marocaine. La plupart des pancartes et écriteaux d'indication sont en italien, français ou anglais avec une mention ajoutée écrite grossièrement en arabe en bas de l'annonce. Lorsque l'on s'adresse aux passagers via les haut-parleurs, c'est en dialecte égyptien et non marocain.
Par ailleurs, le passager dans les bateaux de Grandi Navi Veloci, contrairement à l'époque de la Comarit et de la Comanav, paie ses repas alors qu'ils étaient offerts par les compagnies marocaines de la belle époque du «Marrakech» et du «Biladi». Concernant les repas à la carte ou au self-service, le passager marocain se retrouve avec des plats culinaires internationaux et qui n'ont rien à voir avec la cuisine marocaine. Et depuis, la plupart de nos compatriotes empruntant cet itinéraire, préfèrent se ravitailler avant de monter à bord où l'accueil laisse vraiment à désirer. C'est fini la belle époque où l'on accueillait les voyageurs avec du lait et des dattes.
C'est fini les belles soirées avec du malhoune et du chaâbi. C'est fini les salles de cinéma qui présentaient des films arabes. Nos compatriotes sont acculés à anticiper eux-mêmes leurs propres distractions en organisant des parties de cartes ou de dames pour passer le temps devant l'indifférence des responsables de la compagnie et des autorités marocaines.
L'excès de zèle était à son comble lorsque, il y a quelques mois, des voyageurs marocains ont protesté contre cette situation à l'arrivée à Sète. La consule était venue de Montpellier pour mettre fin au sit-in observé par les protestataires. Au lieu d'établir un rapport et protester auprès de la compagnie, la responsable consulaire a demandé à ses compatriotes de se soumettre aux règles de la compagnie qui n'a pas hésiter à inscrire les noms des protestataires sur une liste noire. Ils n'ont plus droit à voyager sur les paquebots de Grandi Navi Veloci. C'est donc un acte abusif violant les droits humains. Et on est à se demander ce que fait ce ministère «fantôme» qui, à travers les médias, annonce en fanfare l'opération Transit 2013. Pendant que le gouvernement Benkirane poursuit ses luttes intestines, nos compatriotes de retour d'Europe souffrent le martyre devant l'intransigeance et les exactions de ladite compagnie.
Il faut rappeler que le contrat entre Grandi Navi Veloci (GNV) et les autorités marocaines très mal négocié devait prendre fin en mai dernier mais la GNV opère toujours sur cette liaison maritime! Les responsables marocains avaient annoncé un projet de lancement d'un appel d'offres pour l'exploitation des lignes maritimes vers la France pour la période 2014-2021, voire 2014-2024 avec des bateaux récents, âgés de moins de 15 ans. Pour le moment, il n'en est rien. La compagnie italienne impose sa loi aux passagers sur les traversées entre le Vieux Continent et Tanger-Med.
21 Juin 2013, Kamal Mountassir
Source : Libération