Six jours après le naufrage meurtrier de centaines de migrants au large des côtes européennes, les ministres de l'Intérieur de l'UE ont planché mardi sur un renforcement des moyens de Frontex. Une agence méconnue du grand public, malgré son rôle-clé.
Après le drame, les questions. Alors que les recherches se poursuivent au large de Lampedusa, pour retrouver les corps des plus de 200 migrants noyés jeudi dernier en essayant de rejoindre l'Europe, l'Union européenne cherche des solutions. Aux 27 ministres de l'Intérieur réunis mardi à Luxembourg, la commissaire européenne chargée des Affaires intérieures, Cecilia Malmström, a proposé de lancer une vaste opération de "sécurité et de sauvetage" en Méditerranée. Qui reviendrait à un organisme méconnu des Européens : Frontex.
Créée en 2004, Frontex est une agence chargée à l'origine de surveiller les frontières extérieures de l'Union. Pour mener à bien cette mission, les pays-membres mettent à sa disposition une flotte d'une vingtaine d'avions, autant d'hélicoptères et une centaine de navires. La marine nationale française, par exemple, y participe. Confrontée à la réalité des naufrages de migrants en Méditerranée, l'agence s'est peu à peu assignée une autre mission : "sauver des vies humaines". Elle revendique 16 000 vies sauvées à ce jour.
"Europe forteresse"
Un bilan qui ne convainc pas tout le monde. "Jusqu'en 2011, le budget de Frontex n'a cessé d'augmenter et pourtant, le nombre de migrants morts en Méditerranée est passé de 1 500 en 2009 à 2 000 en 2011. Cela pose quand même la question de leur efficacité !", relève Olivier Clochard, président du collectif d'associations Migreurop, auprès de metronews. Pour le réseau, cette touche humanitaire vise à "édulcorer" le réel objectif "sécuritaire" de Frontex : défendre "une Europe forteresse". "L'UE montrerait une vraie volonté de sauver des vies si les Etats arrêtaient de poursuivre les navires civils qui ont secouru des migrants", martèle Olivier Clochard.
Dans les instances européennes, les avis se partagent sur le renforcement de la mission humanitaire de l'agence, entre "beau signal" et "naïveté finie". "Nous allons faire les passeurs : dès que les navires de Frontex sont signalés, les embarcations prennent la mer", a assuré un diplomate à l'AFP, sous couvert d'anonymat. Sans toutefois proposer d'alternative. Un fait met en tout cas tout le monde d'accord : si l'on veut que Frontex monte en puissance, il va falloir lui en redonner les moyens. Car le budget de l'agence est passé de 118 millions d'euros en 2011 à 85 millions cette année. Pour cause d'austérité.
8/10/2013, Thomas Vampouille
Source : metronews.fr