Malgré l'adoption de nouvelles règles pour la régularisation des sans-papiers par le gouvernement en novembre 2012, peu de demandes supplémentaires ont été examinées, selon la Cimade.
Pour l'association d'aide aux étrangers, les conditions de dépôt des dossiers sont toujours mauvaises et les règles continuent à varier d'une préfecture à l'autre.
Pour la Cimade et pour l'ensemble des associations d'aide aux sans-papiers, la circulaire du gouvernement sur la régularisation était « source de nombreuses attentes (...) après plus de dix années de lois et de pratiques restrictives », rappelle-t-elle en préambule du rapport publié mardi 24 septembre. Des attentes qui, du point de vue de l'organisation d'aide aux migrants, ont été déçues.
Alors que le gouvernement reporte sans cesse le bilan de la circulaire du 28 novembre 2012, la Cimade, service œcuménique d'entraide qui soutient au quotidien les étrangers sans-papiers dans leurs démarches administratives, a mobilisé ses bénévoles de décembre 2012 à juin 2013 dans 48 départements pour établir ce rapport.
Peu de régularisations effectives
La Cimade déplore pour commencer un « démarrage chaotique ». Présentée par le gouvernement comme une clarification des conditions de régularisation, la circulaire a été à l'origine à la fin de l'année 2012 d'un engorgement des services « étrangers » des préfectures, déjà très sollicités en temps normal. Dans les départements en tension, comme Paris, les Bouches-du-Rhônes ou le Nord, certains demandeurs commençaient à faire la queue la veille pour espérer obtenir un rendez-vous dans la matinée.
Les résultats de ces visites à la préfecture sont eux aussi décevants. Le nombre de personnes à avoir déposé des dossiers est faible. Dans le Nord, sur 1100 personnes accueillies, 360 dossiers ont été déposés. 2700 dossiers ont été déposés avant le 30 juin à Paris, 1200 en Essonne, 721 dans les Yvelines. Ce décalage entre visites à la préfecture et dépôts d'un dossier représente pour le service œcuménique d'entraide un « indicateur des attentes déçues par les personnes sans papiers ».
Quant aux régularisations effectives, elles sont encore plus faibles, la majorité des dossiers n'ayant pas encore été traités sept mois après l'adoption de la circulaire. Le gouvernement avait certes estimé fin 2012 que sa circulaire n'aurait pas d'impact sur les volumes de régularisations, comprises habituellement entre 30000 et 35000 par an, pour un nombre d'étrangers en situation irrégulière généralement évalué entre 300 000 et 400 000. Mais la Cimade rappelle que « la réglementation prévoit que les préfectures ont quatre mois pour répondre aux demandes de titres de séjour ».
les résidents depuis plus de dix ans pénalisés
Pour ceux qui ont fait l'objet d'une réponse, la Cimade constate tout de même un progrès pour les parents d'enfants scolarisés et les conjoints d'étrangers en situation régulière. Mais les jeunes majeurs et les travailleurs, dont la circulaire devait faciliter la régularisation, semblent buter notamment sur la difficulté à fournir des feuilles de paie.
Enfin, l'association regrette que l'insistance de la circulaire pour quatre profils de demandeurs de titres de séjour – les parents d'enfants scolarisés en France, les conjoints d'étranger en situation régulière, les jeunes majeurs et les admissions au titre du travail – pénalise les autres profils. Les étrangers résidant en France depuis plus de dix ans ou les étrangers malades se voient ainsi fréquemment refuser le droit de déposer un dossier ou se voient appliquer des « délais d'instruction déraisonnables » pour son examen, certaines préfectures ayant mis l'accent sur le traitement des « dossiers circulaire », rapporte l'association.
La Cimade regrette aussi la non-application de la circulaire aux familles roumaines ou bulgares. Jugées trop pauvres pour pouvoir prétendre à un droit au séjour en qualité de travailleurs, ces dernières sont empêchées de déposer un dossier en tant que parents d'enfants scolarisés.
Le texte du gouvernement, qui visait à mettre un terme à l'arbitraire géographique en uniformisant les pratiques préfectorales, échoue là aussi, selon la Cimade, qui relève des interprétations variables, notamment sur l'appréciation du niveau de Français et les pièces justificatives à fournir. La préfecture de Paris demande ainsi les carnets de santé des enfants, quand elle refuse les factures sous forme d'échéanciers comme preuve de résidence, cite l'association.
2013-09-25, Julien Duriez
Source : la-croix.com