dimanche 24 novembre 2024 20:07

Passeport pour une citoyenneté universelle

Mediapart publie l'Appel du 23 mai pour une citoyenneté universelle et pour la liberté de circulation et d'installation des personnes à l'échelle mondiale, lancé par Emmaüs international, la Fondation France Libertés-Danielle Mitterrand et le Mouvement Utopia.

Nous, citoyens et représentants d'organisations des différents continents réunis au sein de l'Organisation pour une citoyenneté universelle, lançons un appel pour la citoyenneté universelle et la liberté de circulation et d'installation des personnes.

Une autre politique dans le domaine des migrations est devenue nécessaire aujourd'hui : les systèmes qui régissent les migrations relèvent essentiellement des prérogatives des Etats et ne sont donc plus en adéquation avec les réalités migratoires du XXIe siècle, marquées par la mondialisation. Ces systèmes bafouent ce qui constitue à nos yeux un droit fondamental inscrit dans l'article 13 de la Déclaration universelle des droits de l'homme.

Ces systèmes consacrent l'existence d'une mobilité à deux vitesses : les pays les plus privilégiés offrent à leurs citoyens des possibilités de circulation quasiment sans limites, tandis que les trois quarts de l'humanité ne peuvent échapper à une forme d'assignation à résidence de fait. Il en résulte d'ailleurs des parcours administratifs aberrants, des exigences de garanties financières démesurées, des situations de travail assimilables à l'esclavage et une criminalisation croissante de l'immigration illégale... Les migrants sont aujourd'hui devenus des victimes de l'arbitraire et de la violence institutionnelle ainsi que des proies pour les réseaux criminels.

Dans nombre de pays du Nord, on perçoit une résurgence des mythes fondés sur la peur et les préjugés xénophobes et racistes. Ceux-ci nourrissent de multiples formes d'intoxication et d'exploitation politiques ; ils alimentent les courants les plus réactionnaires, en agitant dangereusement la fable de l'invasion, la menace d'altération de l'identité nationale et les dangers d'une intégration soit disant impossible. Ces préjugés servent alors de fondement aux politiques de fermeture des frontières les plus irrationnelles et de justification aux violations systématiques des droits élémentaires reconnus aux migrants par les traités et les conventions internationales.

Plus gravement, la fermeture et la militarisation des frontières, notamment européennes, nord-américaines et australiennes se révèlent des dispositifs meurtriers pour des milliers de personnes depuis plus de deux décennies. Coûteux en vies humaines, ce système l'est aussi en fonds publics, mobilisant en pure perte et en période de crise plusieurs centaines de millions de dollars pour une inefficacité patente.

Nous affirmons qu'il est illusoire de croire à la fermeture des frontières et au contrôle des flux migratoires pour empêcher celles et ceux qui ont perdu tout espoir d'une vie meilleure d'aller tenter leur chance ailleurs. Nous sommes certains de ne pas pouvoir empêcher non plus celles et ceux dont le cadre de vie a été détruit par la crise écologique d'aller s'installer sous des cieux plus cléments. Les réfugiés climatiques, déjà estimés à plus de 38 millions aujourd'hui, pourraient être 150 millions d'ici 2050.

Il est urgent de regarder enfin et de façon apaisée la migration comme un fait social ordinaire, caractéristique des temps présents et à venir, profondément liée aux transformations mondiales, dont elle est à la fois cause et conséquence.

Nous avons appris que l'humanité a construit son histoire et sa richesse avec les migrations : c'est une erreur et un déni de réalité de penser qu'il pourrait en être autrement demain.

Nous sommes déterminés à agir aujourd'hui pour garantir à toutes et tous le respect de leurs droits fondamentaux.

Nous appelons à l'organisation d'une conférence internationale des Nations unies sur le thème de la liberté de circulation et d'installation des personnes, et à l'adoption d'une convention internationale contraignante sur le sujet. Elle devra être préparée par une large concertation des parties prenantes.

Nous invitons à soutenir une initiative symbolique forte : le Passeport de Citoyenneté Universelle. Ce Passeport sera un document de voyage reconnu aux frontières des États signataires, symbolisant leur engagement pour le respect des droits des migrants et pour la reconnaissance de la liberté de circulation et d'installation comme liberté fondamentale de tout être humain, fondée sur l'Article 13 de la Déclaration Universelle des Droits de L'Homme de 1948.

Nous demandons l'effectivité d'une citoyenneté universelle pour chaque habitant de la planète, lui garantissant l'accès aux droits élémentaires dans chaque pays où il séjourne ou réside. Nous demandons parallèlement le découplage de la citoyenneté et de la nationalité, comme c'est déjà partiellement le cas, par exemple, dans le cadre de l'Union européenne, du Mercosur, de la Cédéao ou du Trans Tasman Travel Agreement.

Nous appelons en conséquence les mouvements associatifs et citoyens, les ONG, les partis politiques, les syndicats, les mouvements sociaux ainsi que les acteurs économiques partageant notre vision à soutenir nos initiatives, à en relayer les messages et à rejoindre l'Organisation pour une citoyenneté universelle.

Nous appelons aussi les États et leurs gouvernements, les collectivités et organisations internationales à rallier notre projet de Passeport de citoyenneté universelle et à lutter pour la reconnaissance du droit effectif à liberté de circulation et d'installation par les instances internationales et onusiennes. Nous les encourageons à signer des accords multilatéraux favorisant la libre circulation, à conduire des politiques nationales d'ouverture des frontières et à garantir les droits des migrants.

Nous appelons enfin chaque citoyen à se mobiliser pour la citoyenneté universelle et la liberté mondiale de circulation et d'installation des personnes. Nous les invitons à faire pression à tous les niveaux pour que ces perspectives deviennent des réalités.

Pour vous associer, citoyen ou organisation, à l'appel du 23 mai 2013, rendez-vous sur le site de l'Organisation pour une Citoyenneté Universelle: www.o-c-u.org

04 juin 2013

Source : Mediapart

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