jeudi 5 décembre 2024 04:22
mercredi, 15 mai 2024 14:42

« Mora est là », les témoignages saisissants des mineurs marocains en France Spécial

Le cinéma Renaissance à Rabat a accueilli dans la soirée du 14 mai 2024 l’avant-première du long-métrage documentaire (90 min) « Mora est là », de son réalisateur Khalid Zaïri, fruit d’un partenariat entre le Conseil de la communauté marocaine à l’étranger, la Fondation Hiba et la chaîne de télévision 2M.

Le film présente des témoignages saisissants qui retracent une étape essentielle de la migration des travailleurs marocains dans les mines de charbon au nord de la France. Le personnage de « Félix Mora », même s'il n'apparaissait pas dans la bande, était présent dans tous les témoignages des mineurs et de leurs familles, puisque « Mora » fut, pendant vingt ans, le lien entre la société charbonnière du Nord-Pas de calais et ces travailleurs dont la plupart étaient des paysans.

Felix Mora était le superviseur du processus de sélection des travailleurs, triés en fonction de leur physique et de leur niveau d'éducation, mais d’un point vue très spécial, car il s’agissait d’une sélection « primitive » : avoir un niveau d’éducation, aussi simple soit-il, était éliminatoire. Le documentaire, dont les événements se déroulent entre les villages du sud du Maroc et le nord de la France abritant autrefois les mines de charbon, raconte la souffrance de ces mineurs marocains partis travailler dans les profondeurs d'une terre qu'ils n'avaient jamais connue auparavant, et qui ont passé toute leur jeunesse dans des conditions de vie extrêmement difficiles restées aujourd’hui toujours gravés dans la mémoire de leurs enfants qui y sont nés et y ont grandi.

En plus de la souffrance physique, les témoignages documentés racontent le racisme et la discrimination auxquels ils ont fait face, que ce soit dans les droits, les salaires, ou en matière de logement par rapport aux travailleurs français, suscitant des mouvements de protestation parmi les travailleurs pour des droits simples et circonstanciels. Ici également, le personnage de « Félix Mora » était présent en tant que personne et parfois en tant qu'institution, intermédiaire entre l’administration et les travailleurs, ils pouvaient les calmer, les menacer ou les licencier quand les voix s'élevaient en faveur de l'égalité et de l'équité.

Le réalisateur est arrivé à relater des réalités alarmantes, comme la dissimulation par les médecins des compagnies minières des dossiers médicaux des mineurs souffrant de maladies respiratoires chroniques et mortelles, afin que les entreprises se déchargent des indemnisations, ou encore la rupture provoquée au sein des familles par cette migration économique, dont le but était initialement de voyager pour quelques mois afin d'améliorer la situation sociale puis retourner au village au Maroc.

A travers le personnage imaginé de « Lahcen », qui recevait les messages audios enregistrés de sa femme, « Zahra », restée au village pour s’occuper de la maison et élever les enfants en attendant de rejoindre son mari, le réalisateur transmet le cri des femmes des travailleurs qui sont restées à la marge de la vie. Pour l’espoir d’une meilleure vie pour leurs familles, maris et femmes étaient condamnées à la solitude et à l’amertume de l’alinéation avec pour seul refuge le rêve de retourner chez soi et oublier le cauchemar du charbon noir.

Si le travail de mineur a pu rapporter ses fruits pour les chanceux, beaucoup comme Lahcen, sont restés seuls en exil, confrontés à la maladie et à la vieillesse. Il a rendu son dernier souffle seul, loin de ses enfants et de Zahra, qui n'a pas réussi à obtenir un visa pour lui faire ses adieux.

 

Consulter sur le site du CCME la biographie de Khalid Zaïri

 

CCME

 

Dernière modification le mercredi, 15 mai 2024 14:44
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