mardi 12 novembre 2024 13:05

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Pour l’Union européenne, aide au développement et maîtrise migratoire en Afrique vont de pair

Après avoir noué un accord avec le Mali la semaine dernière, l’UE vient d’obtenir des gages du Niger pour contenir les départs de migrants vers l’Europe en contrepartie d’aides au développement, en marge du Conseil européen du 15 décembre.

Le Nigeria, le Sénégal et l’Éthiopie doivent suivre le même chemin, mais cette stratégie s’attire les critiques de certains experts.

En quoi consistent ces accords sur l’immigration avec les pays africains ?

Pour l’Union européenne, l’objectif est de prévenir les départs de migrants, alors que la route africaine passant par la Libye et l’Italie a dépassé les 170 000 passages cette année. Pour ce faire, Bruxelles a commencé à négocier avec certains États de provenance des migrants.

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Pour obtenir un levier de persuasion plus grand, l’UE veut concocter des accords mettant dans la balance tout à la fois l’aide au développement, les questions de sécurité, la lutte contre l’immigration irrégulière, la facilitation du retour dans les pays d’origine…

Cette logique, lancée en novembre 2015 au sommet de La Valette (Malte) avec un fonds de 1,8 milliard d’euros, commence à prendre forme. Dimanche 11 décembre, un premier accord UE-Mali a été signé. Jeudi 15 décembre, en marge du Conseil européen, c’était au tour du Niger.

Dans les mois qui viennent, trois autres « pays pilotes » doivent leur emboîter le pas : le Nigeria, le Sénégal et l’Éthiopie. Le Conseil européen a par ailleurs soutenu le plan d’investissement de 44 milliards d’euros proposé par la Commission européenne pour le développement économique en Afrique, même s’il reste à confirmer par le Parlement européen.

Sur quoi ont débouché les accords conclus avec le Mali et le Niger ?

Le président du Conseil Européen Donald Tusk a personnellement félicité le Niger pour ses efforts, à la fin du sommet, alors que ce pays de transit sur la route migratoire a réussi à réduire les passages sur son sol de 70 000 en mai à 1 500 en novembre.

Cela a été possible grâce à la lutte des autorités contre les réseaux de passeurs. Le même jour, une enveloppe de 470 millions d’euros a été allouée au pays pour financer des programmes d’éducation et de sécurité alimentaire.

Dimanche 11 décembre, le Mali a conclu une autre forme de pacte. D’un côté, le pays pouvait compter un montant de 145,1 millions d’euros, en partie pour favoriser l’insertion professionnelle des jeunes. De l’autre, il s’est engagé à sécuriser ses frontières et envoyer des fonctionnaires dans les pays membres pour faciliter les retours de leurs ressortissants en situation irrégulière.

Sur le plan éthique, certaines ONG considèrent cette démarche comme un « chantage » aux aides au développement. La commission européenne conteste ce point de vue, soulignant qu’il s’agit d’un bon procédé, qui ne lésera personne : plus d’aide pour les pays qui collaborent plus.

Que peut-on attendre de ce genre de négociations s’ils sont généralisés ?

L’erreur serait d’espérer un retour immédiat, estime Yves Pascouau, chercheur à l’Institut Jacques Delors. Le spécialiste des migrations alerte d’un contresens à ne pas commettre : « Dans un premier temps, du moins, l’aide au développement ne stoppe pas, mais au contraire accélère la migration, elle crée d’autres besoins chez des personnes qui ont davantage accès à l’école et à la consommation ».

Pour Yves Pascouau, parvenir à un accord durable de l’ensemble des pays subsahariens pourrait prendre beaucoup de temps, car les intérêts ne convergent pas nécessairement. « Aujourd’hui, l’apport de fonds privés envoyés par les migrants économiques est bien supérieur à ce qu’apporte l’aide au développement. Les États africains feront vite leur calcul ! », poursuit-il.

D’autres redoutent par ailleurs l’externalisation totale du contrôle migratoire. C’est le cas de Pierre Verluise, docteur en géopolitique à l’université Paris IV-La Sorbonne. « L’Europe est dépendante de la migration, explique l’expert. En 2015, c’est grâce à elle et à elle seule que la population s’est accrue sur le continent. Notre unique problème, c’est que nos sociétés sont de moins en moins capables de les intégrer ».

16/12/2016, Jean-Baptiste

Source : La Croix

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