lundi 25 novembre 2024 07:23

Belgique : Réformer l’islam sans les musulmans

La mort de l'Exécutif des musulmans de Belgique est annoncée. Elle est à l'ordre du jour d'une réunion au sommet, ce mardi, avec le ministre fédéral des Cultes, Stefaan De Clerck (CD&V). L'Exécutif sortant, dont l'existence n'est assurée que jusqu'au 31 décembre, doit faire des propositions de renouvellement. Trois projets sont sur la table. Mais la communauté musulmane, qu'on évalue à 400.000 citoyens, n'a pas eu son mot à dire.

« Peut-on se permettre de renouveler les instances sans avoir pris le pouls des principaux concernés ? »... La vice-présidente de l'Exécutif, Isabelle Praile, craint que l'organe réformé ne gagne pas en crédibilité, faute d'implication de la communauté musulmane.

« L'Exécutif sortant a certes tenu quatre journées de réflexion, en janvier, mars, mai et juin, mais à destination de cercles restreints, sans le moindre appel à projets et sans répondre aux questions préalables qui conditionnent la refonte... Devons-nous effectivement nous en tenir au temporel du culte musulman, c'est-à-dire à la gestion des mosquées, alors même qu'à peine 10 à 15 % de la population musulmane fréquente ces lieux de culte ? Continue-t-on à encadrer le "parachutage" d'imams venus du Maroc ou de Turquie sans prendre les mesures qui s'imposent pour développer une filière belge de formation d'imams ? Continue-t-on à fonder notre représentativité sur des élections générales basées sur des catégories ethniques controversées, dans le cadre d'un scrutin auquel à peine 10 % des musulmans ont participé ? »...

Autant de questions qui restent sans réponse, à la veille du bilan qu'entend dresser le ministre des Cultes, avec les responsables sortants de l'Exécutif. Son président, Semsettin Ugurlu, issu de l'islam étatique turc (la Diyanet), semble pressé de conclure : il a adressé, en novembre, un « coupon-réponse » à sa communauté, afin de lui demander d'opter pour la « formule de renouvellement » qu'elle privilégie : des élections générales au sein des mosquées, une représentation par des délégués issus des fédérations musulmanes, ou un système mixte qui intégrerait des élus, des délégués, les professeurs de religion islamique, les aumôniers, les minorités et les femmes. Sans autre explication... Le nombre de coupons rentrés était si faible que le président a préféré ne pas divulguer les résultats.

« Ne tranchons pas dans l'urgence, plaide Isabelle Praile. Ce ne serait ni dans l'intérêt des musulmans ni dans celui de la société. »

Trois scénarios

L'islam des fédérations

Président sortant de l'Exécutif musulman, Coskun Beyazgül, annonce au Soir, le 9 février 2008, son projet de confier aux grandes fédérations musulmanes la gestion du temporel du culte, sur le modèle du Conseil français du culte musulman. Solution sur mesure pour deux fédérations turques, la Diyanet, réseau d'une septantaine de mosquées (sur environ 350), sous le contrôle de l'Etat turc, et le Milli Görüs, réseau international comptant une trentaine de mosquées en Belgique. La proposition désavantage la communauté marocaine, qui n'est pas organisée en fédérations.

L'islam des mosquées

En réplique à la proposition turque, le 26 février 2008, Abdelghani Benmoussa suggère d'instaurer un Conseil administratif du temporel du culte musulman, émanation des mosquées reconnues. Là encore, la Diyanet y trouverait son compte, ainsi que les mosquées proches des autorités marocaines. Un régime des mosquées qui ne favoriserait pas forcément l'essor d'un islam soustrait aux influences étrangères.

L'islam « citoyen »

Le Rassemblement des musulmans de Belgique a rendu publique, samedi, une nouvelle alternative, « issue d'un mouvement citoyen, indépendante des pays d'origine ». La proposition est portée, notamment, par Mohamed Tojgani, l'imam de la mosquée Al-Khalil, à Molenbeek. Le nouvel Exécutif musulman serait élu sur base d'un conseil général composé de 350 délégués (un par mosquée), avec une représentation additionnelle garantie par le biais de cooptations pour les convertis, les femmes et la société civile.

Source : Le Soir.be

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