vendredi 27 décembre 2024 00:17

Brexit : les Tories durcissent le ton sur l'immigration

Engagée sur la voie d'un Brexit sans compromis, la Première ministre britannique Theresa May a durci le ton sur l'immigration mercredi, s'attirant les foudres de l'opposition qui l'accuse de "souffler sur les braises de la xénophobie".

La dirigeante du parti conservateur a clos le congrès des Tories à Birmingham (centre) en s'adressant en priorité aux "travailleurs ordinaires" et en soulignant que la gauche n'avait "pas le monopole du coeur".
Assurant que son camp représentait désormais le "vrai parti des travailleurs", elle a brocardé le leader du Labour, Jeremy Corbyn, dont la "prétendue supériorité morale" l'empêche d'entendre les peurs de la population sur l'immigration.

Elle a aussi fustigé le mépris qu'éprouveraient les "élites progressistes" pour le "patriotisme" et les "craintes sur l'immigration" des "gens du peuple".

"Nous n'allons pas quitter l'UE pour abandonner de nouveau le contrôle de l'immigration", a-t-elle martelé, alors que Bruxelles fait de la libre circulation des citoyens de l'UE une condition sine qua non de l'accès au marché unique.

Cette intransigeance affichée, qui ouvre la perspective d'un "Brexit dur", a fait plonger la monnaie britannique à un plus bas depuis cinq ans.

Avec son discours aux allures de grand écart, Theresa May visait autant les électeurs travaillistes que ceux du parti populiste Ukip, réceptacle des crispations de la société britannique et premier avocat d'une sortie de l'Union européenne.

Il était parfaitement dans le ton du congrès où le thème de l'immigration a été matraqué du matin au soir depuis dimanche.

A Birmingham, la ministre de l'Intérieur, Amber Rudd, a ainsi dévoilé un nouveau plan destiné à pousser les entreprises à publier une liste de leurs employés non-britanniques et à privilégier la main d'oeuvre nationale.

L'idée est de ramener le solde migratoire, qui s'établit actuellement à 330.000 par an, sous la barre des 100.000, a-t-elle insisté.

Au même moment, le ministre de la Santé, Jeremy Hunt, a expliqué comment il voulait rendre "autosuffisant en médecins britanniques" le système de santé public NHS, dont un quart des effectifs est actuellement constitué d'étrangers.

Quant au ministre de Commerce international, Liam Fox, il a souligné qu'il était hors de question à ce stade de garantir les futurs droits des trois millions de citoyens européens déjà établis au Royaume-Uni. "C'est l'une de nos principales cartes lors des négociations à venir sur le Brexit. On ne va pas l'abattre dès maintenant", a-t-il dit.

Cette offensive torie a suscité de vives critiques dans l'opposition. "Les leaders du parti conservateur ont touché le fond en soufflant sur les braises de la xénophobie", a vivement réagi Jeremy Corbyn.

"La vision de Theresa May sur le Royaume-Uni du Brexit est répugnante", a abondé la Première ministre de l'Ecosse, Nicola Sturgeon. "C'est celle d'un pays où les gens ne sont pas jugés sur leurs capacités ou leur contribution à l'intérêt général mais sur leur lieu de naissance ou la couleur de leur passeport".
La danseuse espagnole Tamara Rojo, directrice artistique de l'English National Ballet, a même évoqué l'Allemagne nazie. "Après avoir contribué pendant 20 ans à la vie de ce grand pays (...), combien de temps va-t-il s'écouler avec que je ne doive coudre mon étoile?", s'est-elle emportée sur twitter.

De nombreux députés de l'opposition regrettaient un alignement sur le programme du parti Ukip, au moment même où celui-ci est plongé dans une crise de succession.

Sa nouvelle dirigeante Diane James a démissionné pour raisons "personnelles et professionnelles" mardi soir, dix-huit jours seulement après avoir été désignée pour prendre la suite du leader emblématique Nigel Farage.

Unique personnage du parti identifié par le grand public, Nigel Farage a exclu tout retour aux commandes, même s'il reste "techniquement" le leader provisoire du parti jusqu'à l'élection d'un nouveau chef, fin novembre a priori.

En attendant, les conservateurs ont bien compris qu'il y avait un espace à occuper, selon Matthew Goodwin, professeur à l'Université du Kent. "Theresa May, a-t-il déclaré à la BBC, a garé ses chars sur le territoire de l'Ukip".

5 oct 2016

Source: AFP

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