La coûteuse politique nataliste mise en place au début de l'ère Merkel semble porter ses fruits. Mais le taux de renouvellement de la population reste loin d'être atteint.
Certes, ce n’est qu’un frémissement… Mais pour la troisième année d’affilée, l’Allemagne a vu augmenter son taux de fécondité en 2015, selon les statistiques officielles publiées lundi. La coûteuse politique nataliste mise en place au début de l’ère Merkel semble commencer à porter ses fruits.
Le taux de natalité du pays le plus vieux d’Europe est passé en 2015 à 1,5 enfant par femme, contre 1,47 en 2014. De ce point de vue, 2015 est ainsi la meilleure année depuis 1982 (1,51 enfant par femme). L’an passé, 715 000 bébés sont nés dans le pays, 33 000 de plus qu’en 2014, une progression de 4,8%.
Le taux de fécondité indique combien d’enfants une femme aura statistiquement au cours de sa vie. Il doit être de 2,1 enfants par femme pour assurer le renouvellement des générations. En France, pays dont la natalité est particulièrement dynamique pour le Vieux Continent, ce taux est actuellement de 2,01 enfants par femme.
L’évolution positive constatée depuis trois ans en Allemagne est essentiellement due aux mères issues de l’immigration. Les étrangères ont un taux de fécondité moyen de 1,95 enfant en 2015 (1,86 en 2014) alors que le nombre de bébés par mère allemande a lui quasiment stagné 1,43 au lieu de 1,42. Les différences régionales restent également importantes : le Land le plus fécond du pays est la Saxe (ex-RDA) avec 1,59 enfant par femme en moyenne. En queue de liste se trouve la Sarre (ouest du pays) avec 1,38 enfant par femme. Globalement, l’ex-RDA – dont la natalité très dynamique du temps du régime communiste s’est effondrée à la chute du Mur — connaît un taux de fécondité toujours supérieur (1,56 enfant par femme en moyenne) à celui de l’ouest du pays (1,50).
L’âge moyen des mères à la naissance de leurs enfants continue à augmenter : 29 ans et 7 mois à la naissance du premier enfant ; 32 à la naissance du deuxième, 33 à la naissance du troisième. L’Office fédéral des statistiques constate une sorte de «rattrapage» des naissances de la part des femmes nées entre 1976 et 1985 qui avaient jusqu’alors repoussé à plus tard leur projet de maternité.
156 mesures pour 55,4 milliards d'euros par an
«Ces statistiques sont un encouragement à faire plus pour les familles en Allemagne, s’est félicitée la ministre sociale-démocrate de la famille, Manuela Schwesig, qui vient elle-même de donner naissance à son deuxième enfant. Les mères et les pères ont besoin de notre soutien, et attendent à raison des politiques qu’ils créent un cadre permettant aux familles de mieux concilier vie privée et carrière. Avec le salaire parental et le développement des places de crèches, nous sommes sur la bonne voie.»
L’Allemagne a l’une des politiques familiales les plus coûteuses au monde, avec un catalogue complexe de 156 mesures, pour un coût annuel total de 55,4 milliards d’euros. Allocations familiales de 184 euros par enfant et par mois, maintien du salaire à hauteur de 60 % pour les parents d’un jeune enfant désirant l’élever pendant un an à la maison, développement du nombre de places de crèche et de plus en plus souvent gratuité de la garde des enfants…, l’Etat, depuis la fin du gouvernement Schröder, ne renâcle pas sur les moyens. La politique d’encouragement de la natalité «commence à montrer des résultats, explique Sebastian Klüsener, chercheur à l’institut Max-Planck de Rostock. L’Allemagne commence à se rapprocher du comportement démographique des pays riverains de l’ouest et du nord, qui ont introduit plus tôt des mesures similaires.»
17/10/2016, Nathalie Versieux
Source : Libération