mardi 26 novembre 2024 00:17

Conférence de Tanger sur la création de l'OMJ : Aider les talents sans piller les ressources

La conférence de Tanger qui a réuni les 17 pays fondateurs du projet de l'Office méditerranéen de la jeunesse (OMJ) à savoir le Maroc, la France, l'Albanie, l'Algérie, la Bosnie-Herzégovine, Chypre, la Croatie, l'Egypte, l'Espagne, la Grèce, l'Italie, le Liban, Malte, le Monténégro, la Slovénie, la Tunisie et la Turquie, en plus de l'Union européenne pèsera lourd dans la politique de migration du nouvel ordre mondialisé

La rencontre de Tanger qui sera suivie par d'autres réunions à Monténégro et à Paris avait pour objectif de définir l'architecture générale de l'Office et le périmètre retenu pour la promotion de la mobilité des jeunes dans l'espace méditerranéen grâce à des bourses, la France ayant déjà avancé le chiffre d'un million d'euros. L'OMJ ayant pour mission de faciliter la libre circulation des étudiants de certaines filières universitaires d'excellence, identifiées au Nord comme au Sud de la Méditerranée pour leur capacité à construire les compétences de demain ». Au-delà de ce bel édifice de mots, que faut-il en retenir ? C'est après s'être rendu à la frontière entre les Etats unis et le Mexique, point sensible de la planète en matière d'émigration où se déversent chaque jour des milliers d'émigrés qu'Eric Besson a développé une idée.

« Les Mexicains, les américains et nous Français et Européens avons une même conviction déclare-t-il c'est que nous allons développer la migration circulaire. C'est une façon de ne pas piller les cerveaux, c'est une façon d'utiliser les compétences dont nous avons besoin sur les métiers en tension dans nos pays du Nord. C'est en même temps la conviction qu'il faut qu'au bout de quelques années, trois ans par exemple, la personne retourne dans son pays «Dans un autre entretien accordé à France 24, Mr Besson développe. l'idée de cette émigration circulaire «La France et l'Europe vont essayer de développer cette politique. L'autre jour, j'étais à la préfecture de police, je voyais un informaticien marocain qui va venir en France deux ou trois ans et qui dit clairement : un, je vais apporter des compétences – nous avons besoin d'informaticiens en France ‑ ; deux, je vais continuer à me former ; trois, je vais ensuite retourner au Maroc, parce que c'est mon pays d'origine et que je veux vivre au Maroc, je ne veux pas vivre en France.

C'est de l'immigration circulaire. Avec un titre de séjour provisoire, un CDD, de trois ans, accepté dès le début… Cela répond à une critique légitime de l'immigration choisie, c'est que « nous ne devons pas contribuer au pillage des cerveaux des pays en développement ».
Aider les talents sans piller les cerveaux comme l'affirme un slogan du ministère de M. Besson ? Mais au-delà des déclarations d'intention, comment résister à cette lame de fond, à cette tendance lourde de l'exode des cerveaux des pays du Sud vers le Nord, de ces Hight potentiels, polyglottes, voyageurs du cyberspace, architectes cardiologues médecins biologistes informaticiens physiciens, ces « travailleurs de la connaissance » dans le nouvel ordre mondialisé, qui sont autant de cerveaux des pays du Sud qui ont en tant besoin ? Comment résister à ce formidable appel d'air des compétences du Sud qui feront tout pour s'installer dans les pays du Nord vieillissant où la qualité de vie est assurée ? Les pays du Nord pourront-ils honorer leurs engagements ?
Le Maroc, par une politique de mobilisation des compétences vivant à l'étranger tente de renforcer les liens et d'éviter tout délitement de ce lien, les compétences marocaines pouvant s'impliquer dans le développement du Maroc tout en restant à l'étranger. M. Ameur tente d'anticiper le phénomène en sensibilisant les compétences marocaines à l'étranger en multipliant les rencontres à Fès, à Casablanca et dans les capitales européennes. Une cartographie précise de ces compétences est à l'étude dans son département.

A Tanger, le ministre délégué de la communauté marocaine à l'étranger a appelé à faire de la mobilité des jeunes «un gain futur de compétences pour les pays d'origine», ce qui permettra de réorganiser le phénomène de «drainage des cerveaux», pour être finalement perçu non pas comme une perte irréversible et définitive pour ces pays, mais comme un vivier d'experts établis à l'étranger et sur lesquels ils peuvent compter à tout moment. » Il a défendu l'idée de la création d'un espace méditerranéen des talents juniors et seniors dans différents domaines, la création de réseaux transnationaux des compétences qualifiées, estimant que ce programme contribuera à organiser l'échange d'expériences et d'expertises entre les pays partenaires sur des thématiques précises d'intérêt commun. Pour être opérationnel, ce programme méditerranéen de mobilisation de compétences doit être doté des moyens humains et financiers, d'un calendrier de travail et d'un comité de pilotage stratégique pour suivre et évaluer son développement, a déclaré M. Ameur.

Reste que la mobilisation des compétences est en effet un champ nouveau d'investigation dans lequel tout est à construire en terme de dispositifs, d'outils, de veille et de prévisions. La captation de cette valeur ajoutée, de cette richesse des ressources humaines et sa pérennité requièrent une réflexion nouvelle du gouvernement.

Elle requiert également un changement de culture et de prisme par rapport à un  Etat ou à une administration de contrôle qui doit évoluer vers un  Etat et une administration qui facilite, un état médiateur, stratège et démocratique qui accepte, négocie avec une multiplicité d'intervenants notamment en terme de bénéficiaires comme les universités, les instituts, les agences, les émigrés qui ne sont plus les travailleurs d'antan « taillable à merci ». Elle requiert également une responsabilité historique de ceux qui sont actuellement en charge de la politique d'émigration dans les pays du Nord.

En d'autres termes pour transformer le brain drain, fuite des cerveaux en « brain drain », pour un bénéfice mutuel du phénomène de la migration, il faudra rester très vigilant sur les modalités de cette mobilité des compétences. Si les pays du Sud sont privés de leurs compétences, l'émigration clandestine se renforcera et a avec elle ses capacités de nuisance. Rien n'y fera et aucun obstacle n'empêchera le flux vers le nord, ni les murs que l'on construira, ni la mer qui chaque jour rejette des dizaines de corps.

Source : Le Matin

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