vendredi 27 décembre 2024 15:46

Des épingles pour s'attacher aux plus menacés, face au climat installé par Trump

Les épingles à nourrice sont devenues, pour les manifestants qui battent le pavé depuis quatre jours aux Etats-Unis, le symbole du soutien envers les minorités contre la haine ordinaire favorisée, selon eux, par le discours du président élu Donald Trump.

Depuis l'élection présidentielle, des célébrités comme l'actrice Debra Messing ou la chanteuse Nancy Sinatra, mais aussi des centaines d'anonymes ont adopté ce petit morceau de métal comme étendard.
Le mouvement fait écho à celui lancé sur Twitter au Royaume-Uni après le vote des Britanniques en faveur d'une sortie de leur pays de l'Union européenne (Brexit).

Un utilisateur du réseau social avait alors choisi cette épingle en signe de solidarité, après avoir observé un regain d'attaques contre les immigrés et les minorités après le vote.

Samedi, elles étaient des centaines, à Chicago (nord), Los Angeles (sud-ouest) ou New York (nord-est), accrochées aux vêtements, souvent très discrètes, même si un manifestant en avait dessiné une géante sur sa pancarte "Bienvenue aux réfugiés".

Certains, sur les réseaux sociaux ou parmi les médias, ont critiqué la démarche, parfois vertement. Christopher Keelty, dans un éditorial publié par le site Huffington Post, estime que cette épingle, "une honte", "est faite pour que les Blancs (démocrates) se sentent mieux".

Samedi, il n'y avait pourtant pas que des Blancs qui s'étaient épinglés, comme Margarita Sanchez, universitaire de 52 ans issue de l'immigration qui travaille avec des sans-papiers. "J'ai peur", a-t-elle dit, "pas seulement pour moi, mais pour les gens qui me sont proches".

Pendant la très virulente campagne électorale, Donald Trump a promis d'expulser les immigrés clandestins, d'interdire l'entrée sur le territoire américain aux musulmans, et qualifié les Mexicains de violeurs et de trafiquants de drogue.

Son élection surprise a amplifié les craintes d'une poussée xénophobe dans tout le pays.

Samedi, dans la rue, tous voulaient braver le cynisme et le scepticisme pour adresser un message, à Donald Trump mais pas seulement.

Pour Ryan Kasdin, New-yorkais de 29 ans, il s'agit de "dire au monde, à mes voisins, ici et plus loin, que ce n'est pas mon Amérique. C'est une partie de nous, mais ce n'est pas moi."

Peu ont été directement victimes d'insultes ou de menaces depuis la victoire du candidat républicain à l'élection présidentielle, mais assurent que des amis ou des proches en ont fait l'expérience.

"J'ai des amis musulmans qui ont peur de mettre un foulard", a raconté Nadia Sisneros, une immigré mexicaine de 29 ans, manager de restaurant. "Pas tellement à New York, mais je connais des gens au Texas. Il y a tellement de haine aujourd'hui."

L'organisation américaine de défense des droits civiques SPLC (Southern Poverty Law Center) a créé une page sur son site internet pour recenser les incidents à caractère raciste depuis l'élection de Trump mardi. Elle en a décompté 200.

"Cela ne fait aucun doute qu'il y a une augmentation", a souligné dans le New York Times Richard Cohen, président du SPLC, qui suit les mouvements racistes et extrémistes aux Etats-Unis.

A Wellsville, dans le nord-ouest de l'Etat de New York, l'inscription "Make America White Again" (rendre l'Amérique blanche de nouveau) a été peinte sur l'abri d'un terrain de baseball, à côté d'une croix gammée.

Donald Trump "n'a pas créé la violence à laquelle nous assistons", reconnaît Ryan Kasdin, pour qui "elle est là depuis longtemps". Il cite ainsi les crimes racistes et les nombreux Noirs non armés tombés sous les balles de la police ces dernières années.

"Mais ce qu'il a fait tout au long de sa campagne, c'est de la valider", dit-il. "Et pour couronner le tout, il ne fait pas de déclaration pour la condamner. Donc les gens ne se disent pas que ce qu'ils font pose problème, ils se sentent soutenus."

"La misogynie, le sectarisme, l'homophobie, tout cela existait, mais aujourd'hui, ils se sentent le droit de l'exprimer", s'insurge Annie L, 38 ans, qui n'a pas voulu donner son nom de famille.

"J'ai l'impression que le progrès social, c'était juste du vernis, qui vient de craquer", dit-elle, dépitée. "Cela va détruire le pays. Nous valons mieux que ça."

13/11/2016

Source : AFP

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