Les corps de 22 migrants morts dans un naufrage en Méditerranée ont été ramenés en Sicile vendredi tandis que les rescapés ont décrit les scènes de panique et de violence qui se sont emparés de leur groupe quand l'eau a commencé à envahir leur canot pneumatique.
Certains survivants portaient des traces de morsure, témoignage de leur lutte désespérée pour échapper à la mort.
Le bateau en perdition a été repéré flottant au large de la Libye mercredi par Médecins sans frontières (MSF), qui a sauvé 104 personnes avant de découvrir les cadavres défigurés.
Les passagers du canot pneumatique ont expliqué à MSF que les passeurs en Libye avaient forcé trop de migrants à monter à bord et que le fond du bateau avait cédé, se transformant en piège mortel pour les jeunes femmes assises dans la partie centrale de l'embarcation.
"Je n'arrêtais pas de demander de l'aide. Personne ne m'aidait. Ils grimpaient sur moi pour rester hors de l'eau. J'ai cru que j'allais mourir", a déclaré Mary, une Nigériane âgée de 24 ans, à l'organisation humanitaire.
"J'ai dû mordre pour pouvoir respirer. La femme que j'ai mordue s'est levée. Des hommes étaient debout au-dessus de moi. Une femme a marché sur mon visage (...). Une femme enceinte est morte. Nous étions toutes les deux ensemble sous l'eau."
Erna Rijnierse, une femme-médecin de MSF qui était à bord de l'Aquarius, navire de l'ONG qui secourt les migrants en Méditerranée, a déclaré que le silence régnait lorsque MSF s'est approché du canot et qu'il était évident qu'il y avait eu une lutte à bord.
"On pouvait le voir avec les traces d'ongles sur les bras et les jambes des passagers mais nous avions aussi dix personnes portant des traces de morsures humaines sur les bras, le dos, et aussi le bas du dos et les chevilles", a-t-elle dit.
Près de 3.000 migrants et réfugiés sont morts depuis le début de l'année en Méditerranée en essayant de rallier l'Europe, les trois quarts entre l'Afrique du Nord et l'Italie, a déclaré l'Organisation internationale pour les migrations (OIM) vendredi.
Mary, la réfugiée nigériane, a déclaré à MSF qu'elle avait été emprisonnée pendant deux mois en Libye avant de trouver une place sur le canot.
"Ils violent là-bas. Ils cherchent des jeunes femmes, on ne peut pas dire non, ils ont des armes, ils crient, ils parlent dans leur langue", a-t-elle ajouté, décrivant le chaos régnant dans la prison dont elle a réussi à s'évader avant de retrouver son mari.
Un autre rescapé, un Nigérian de 30 ans appelé David, a appelé les candidats à l'exil à ne pas effectuer la traversée.
"C'est très dangereux de prendre le bateau. C'est la vérité. Je me sens mal en pensant à ces femmes qui sont mortes. Cela n'était pas censé arriver."
22/07/2016,Crispian Balmer
Source : Reuters