mercredi 27 novembre 2024 14:48

"Eux, c’est nous", une main tendue aux réfugiés

Si un homme, une femme, un enfant, souffrent et que personne ne veut les secourir, vous entendrez tout. Toutes les excuses, toutes les justifications, toutes les bonnes raisons, de ne pas leur tendre la main. Dès qu’il s’agit de ne pas aider quelqu’un, on entend tout. À commencer par le silence…

C’est avec ces mots que débute Eux, c’est nous, un livre d’utilité publique. Un ouvrage pour les enfants, pour les aider à comprendre la dramatique situation des réfugiés dont ils entendent parler depuis cet été.

Avec une introduction de Daniel Pennac et des dessins de Serge Bloch, l’ouvrage, en trente pages, explique, décortique et raconte avec humanité, ce qui pousse des individus sur les routes de l’exil. Et s’attache à déconstruire les préjugés.

A partir des lettres du mot RÉFUGIÉS (R comme Réfugié, É comme Étranger, F comme Frontière…) le texte de Eux, c’est nous rappelle que les vagues d’immigration ont toujours existé : celles des juifs d’Europe de l’Est, des Russes fuyant la Révolution, des Arméniens, pour échapper au  génocide, des Italiens, pour se soustraire à la pauvreté, des Chiliens, des Argentins, qui refusaient la dictature ou, dans les années 1990, les habitants des Balkans jetés sur les routes par la guerre.

Cet ouvrage donne des chiffres simples pour relativiser l’ampleur des arrivées en France : depuis 2004, seulement 200 000 immigrés, soit à peine 0,3% de la population française, se sont installés. 

C’est sous l’impulsion de Frédéric Lavabre, des Éditions Sarbacane qu’un collectif de plus de cinquante éditeurs jeunesse s’est réuni, et a proposé cet ouvrage, appelé à être une sorte de manifeste à la manière d'Indignez-vous ! de Stéphane Hessel. Acquérir Eux, c’est nous est aussi un beau geste : les trois euros du prix d’achat seront reversés à la CIMADE, l'association qui vient en aide aux personnes déplacées.

Carole Saturno, auteur jeunesse :

"Il y a eu un petit noyau dur d'éditeurs qui s'est rassemblé qui a réfléchi à comment, en plus du texte de Daniel Pennac qui est déjà très fort, expliquer aux enfants des notions complexes, et apaiser leurs inquiétudes sur des informations d'une extrême violence. Ils ont choisi de décliner les huit lettres du mot "réfugiés" en huit textes assez courts, très bien illustrés.

Après les attentats du 13 novembre, on a eu une petite crainte que le livre soit mal reçu, mais les libraires jouent le jeu. Et effectivement le livre "cartonne".

On avait cet espoir-là : que le livre soit partagé en famille, qu'il serve véritablement à aider les enfants à comprendre, et les soulage, et qu'il soit un geste de solidarité.

Un des engagements de ce livre est de rappeler que d'accueillir des réfugiés dans notre pays est un devoir, et qu'être réfugié, n'est pas une situation choisie, mais subie.

Dans ce livre, il y a un passage, que j'aime beaucoup parce qu'il éclaire particulièrement ce qui est noué en nous dans cette crise des réfugiés : comment on lutte contre nos instincts. Daniel Pennac écrit :

« Nous voyons bien que ce n'est pas une question de nombres (de réfugiés), mais de volonté. Si nous voulons accueillir l'homme, l'enfant ou la femme qui souffrent, nous le pouvons. Seulement, dès que nous cessons d'y réfléchir, quelque chose nous en empêche, quelque chose en nous ne le veut pas, quelque chose ferme notre porte et notre cœur. Ce quelque chose, c'est notre vieille et terriblement humaine peur de l'autre, notre vieille et terriblement humaine peur du changement, notre vieil et terriblement humain instinct de conservation. Cet instinct n'est pas mauvais en lui-même. Il a bel et bien conservé notre espèce humaine tout au long de l'histoire. Mais c'est un instinct, il faut le raisonner.  C'est ce que l'on veut faire avec ce livre : raisonner. Et la raison nous apaise ».

26/11/2015

Source : franceinter

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