dimanche 24 novembre 2024 21:38

France : les migrants quittent Calais entre inquiétude et rêve de "nouvelle vie"

Soulagement, inquiétude, résignation, résistance... Les migrants qui vivent depuis des mois dans la boue et les abris précaires de la "Jungle" de Calais ont commencé lundi à évacuer ce site du nord de la France, certains y voyant le début d'une "nouvelle vie".

Mazen, un guitariste soudanais fan de reggae, est optimiste : "Tout va bien se passer, faut pas s'en faire", dit-il avec un grand sourire, citant son idole, "the King", Bob Marley.

Wahid, un Afghan de 23 ans, s'est levé à 05H00 (03H00 GMT) dans un froid humide afin d'être "dans les premiers" à monter dans un car pour rallier un des centres d'accueil disséminés dans toute la France.
"Nous ne savons pas encore où nous allons, mais ce sera forcément mieux que la Jungle, la Jungle c'est fait pour les animaux, pas pour les humains", déclare celui qui dit vouloir "rester en France, reprendre mes études, apprendre le français".

Devant le hangar installé pour orienter ces migrants, quatre files s'allongent : adultes seuls, familles, personnes vulnérables et mineurs. Au fil de la matinée, la tension monte, avec des bousculades et des altercations, les policiers interviennent.

Une fois à l'intérieur, il faut choisir sa destination, à l'aide de bracelets de couleur distribués par des fonctionnaires de l'immigration. Puis, les autorités enregistrent les identités.

Le premier car est parti peu avant 09H00 (07H00 GMT). Lundi soir, plus de 2.300 migrants avaient quitté les lieux, sans incidents.

"Bye bye Calais !", disent les migrants, quand ils passent devant la "Jungle" : la tête collée aux vitres du car, ils font un signe de la main en guise d'au revoir, suivant du regard ce camp dans lequel s'entassaient entre 6.500 et 8.000 personnes, selon les sources.

"Nous avons eu le choix entre deux villes possibles, mais on ne connaissait ni l'une ni l'autre. Alors ? On a choisi au hasard", confie Fahim, un Afghan de 26 ans.

Fahim est monté à bord d'un autocar pour Nogent-le-Retrou, à 130 km au sud-ouest de Paris : "Cette ville, c'est un nouveau commencement". Gama, un Soudanais de 27 ans, abonde dans son sens : "La vie dans la +Jungle+ était dure, je suis très content de quitter Calais, maintenant je pense que je vais commencer une nouvelle vie".

Le trajet se déroule dans le calme, les discussions des migrants se mêlent aux variétés françaises qui s'enchaînent à la radio. Dans le car, deux pompiers, "au cas où il y aurait besoin de soins", explique l'un deux.

Le plan d'évacuation vise à raser le site où s'entassent des réfugiés venus de différents pays, pour la plupart d'Afghanistan, du Soudan et d'Erythrée, avec le même rêve : traverser la Manche pour gagner la Grande-Bretagne.

"C'est une urgence pour les migrants mais aussi pour les Calaisiens qui attendent cela depuis longtemps", commenté un député socialiste venu sur le terrain inspecter l'évacuation. Selon lui, "on n'aurait jamais dû laisser cette situation se mettre en place".

"Pour nous, c'est le jour J", se félicite Jean-Marc Puissereau, le gestionnaire du port de Calais sur les ondes de la BBC. "Ce n'était pas la guerre, mais cela fait deux ans qu'on vit dans un état de stress permanent", en raison des attaques par des migrants de camions qui empruntent l'autoroute voisine.

Pour lui, il faudra dans les mois à venir "contrôler d'éventuels retours" sinon ce ne sera qu'"une perte de temps".

"Beaucoup ne veulent pas partir, il pourrait y avoir des problèmes", estime Abbas, un Soudanais de 25 ans, en écho aux craintes exprimées par différentes associations. "Moi, je voulais aller en Grande-Bretagne mais j'ai laissé tomber maintenant", assure-t-il.

"S'ils ne me laissent pas passer, je me cacherai illégalement pour tenter à nouveau de monter dans un camion. J'ai l'habitude maintenant", admet Achram, un Afghan de 17 ans. Arrivé il y a dix mois, Achram espère bénéficier du programme permettant aux mineurs isolés de rejoindre la Grande Bretagne.
Farhan, 12 ans, préférerait rentrer chez lui , mais son pays "n'est pas sûr". "Mon coeur s'est brisé depuis que j'ai quitté ma famille l'an dernier, depuis je ne lui ai plus parlé", confie le jeune Ethiopien qui a franchi la Méditerranée et voyagé seul à travers l'Europe pour retrouver les siens, de l'autre côté de la Manche, à une trentaine de kilomètres à vol d'oiseau.

24/10/2016

Source : AFP

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