jeudi 26 décembre 2024 13:25

Ils rêvaient de venir vivre libres au Canada. Ils sont aujourd’hui des milliers enfermés dans nos prisons

Le gouvernement canadien a emprisonné 87,317 migrants entre 2006 et 2014. Ces migrants, y compris 807 enfants en moyenne par an, ont passé un total collectif de 503 ans derrière les barreaux.

En 2014, le Haut-Commissariat aux droits de l’homme des Nations Unies et son Groupe de travail sur la détention arbitraire avaient fortement réprimandé le Canada pour le maintien en place de ce régime de détention. Selon le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés, plus de 90 % des demandeurs détenus au Canada le sont pour des motifs qui n’ont rien à voir avec la sécurité.

En 2015, l’Université de Toronto a publié une étude concluant que la hausse de la détention des étrangers non criminels dans les prisons à sécurité maximale du Canada équivalait à un traitement arbitraire, cruel et inhumain qui viole les obligations internationales.

En 2016, sous le nouveau gouvernement canadien de Justin Trudeau, des ajustements au programme de détention ont été proposés et un meilleur financement de certains aspects a été annoncé. Mais le régime d’incarcération en place demeure pour le moment essentiellement inchangé selon différents groupes qui se préoccupent des droits des citoyens.

Le Canada est l’un des seuls pays «occidentaux» où la détention illimitée des étrangers sans statut légal est légale.

Des dizaines d’enfants encore en prison

Durant les années du gouvernement conservateur canadien du premier ministre Stephen Harper, le Canada a maintenu en prison en moyenne de 11 000 migrants par an, y compris jusqu’à un sommet de 807 enfants. Dans certains cas, ces jeunes enfants canadiens ont passé les premières années de leur vie eux-mêmes derrière les barreaux.

En moyenne, 242 enfants ont ainsi été détenus annuellement entre 2010 et 2014, mais ces chiffres excluent tous les enfants détenus en même temps que leurs parents.

L’emprisonnement des enfants se poursuit et cela serait en violation des obligations juridiques internationales du Canada, concluait l’an dernier une étude dirigée par le programme de l’Université de Toronto sur les droits de la personne dans le monde.

Les enfants sont habituellement détenus dans les centres de surveillance de l’immigration de Laval, Toronto ou Vancouver, qui sont conçus pour des détentions à long terme.

La Croix-Rouge du Canada soutient que les mineurs ne devraient être détenus que dans des cas « vraiment exceptionnels » et le moins longtemps possible. Elle réclame aussi l’adoption d’une politique nationale sur cette question qui établirait des normes en matière de conditions de détention pour les migrants mineurs.

Le saviez-vous?

L’Agence des services frontaliers du Canada détient les nouveaux arrivants si elle croit qu’ils pourraient s’enfuir ou qu’ils représentent une menace à la sécurité publique, ou si leur identité ne peut être certifiée.

– En 2014-2015, la durée moyenne des détentions était de 23 jours. Mais dans certains cas, l’incarcération a duré des mois et même des années.

– Certains détenus d’immigration auraient été emprisonnés depuis plus de dix ans sans inculpation ni jugement selon les affirmations du groupe de pression Never Home.

La promesse politique d’une révision de la politique d’incarcération

Ottawa annonçait il y a deux mois qu’il allait investir jusqu’à 138 millions de dollars pour rendre « meilleur et plus équitable » le système de détention des demandeurs d’asile, notamment en construisant au Québec et en Colombie-Britannique de nouveaux établissements de détention gérés par les autorités de l’immigration et uniquement dédiés à la détention de migrants.

Le gouvernement Trudeau souhaite avoir ainsi moins recours aux prisons des provinces, où sont incarcérés les criminels purgeant des peines de deux ans et moins. On veut donc éviter le plus possible que les demandeurs d’asile cohabitent avec des gens coupables de véritables crimes. Ottawa veut aussi diminuer le nombre d’enfants détenus, qui le sont généralement parce que leurs parents le sont aussi et qu’on ne veut pas les séparer de leur famille.

Le ministre canadien de la Sécurité publique, Ralph Goodale, en a fait l’annonce en affirmant vouloir accroître le nombre de solutions de remplacement à la détention. « Une solution de dernier recours », a-t-il spécifié au sujet de la détention.

13 octobre 2016, Stéphane Parent

Source : rcinet.ca

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