jeudi 28 novembre 2024 10:43

Immigration : la droite à l'offensive à l'Assemblée

Promis par François Hollande dès le début du quinquennat et présenté en Conseil des ministres le 23 juillet 2014, le projet de loi relatif aux droits des étrangers entre en discussion ce lundi à l'Assemblée nationale.

Le communiqué de l'Élysée publié à l'époque résume sa philosophie: «L'immigration peut être une opportunité pour la France, si elle est maîtrisée, si l'accueil des talents est encouragé et si l'intégration est favorisée.» Qualifié d'«équilibré» par le ministre de l'Intérieur, Bernard Cazeneuve, ce texte a été découplé de la réforme du droit d'asile pour cause de contexte défavorable: le gouvernement craignait d'être taxé de laxisme dans un espace Schengen incapable de gérer l'accélération des flux migratoires.

Si le FN va profiter de l'occasion pour fustiger une nouvelle fois l'Europe, la droite a bien l'intention de marquer sa différence sur ce sujet ô combien sensible. Guillaume Larrivé, orateur du groupe Les Républicains, présentera une motion de rejet du projet et Thierry Mariani demandera son renvoi en commission. «On nous demande d'examiner ce texte au cœur de l'été et en procédure accélérée pour éviter au maximum le débat, accuse le député des Français de l'étranger. Contrairement à ce que prétend le gouvernement, le dispositif qu'il veut mettre en place est totalement déséquilibré. Je n'ai rien contre l'instauration d'une carte de séjour pluriannuelle, qui est présentée comme la mesure phare du projet: les autorisations actuelles étant systématiquement reconduites, sauf exceptions rarissimes, c'est une facilitation administrative. En revanche, des mesures sur lesquelles le ministère de l'Intérieur s'est bien gardé de communiquer me paraissent totalement aberrantes.»

Pour Mariani, qui préside aussi la commission des migrations et des réfugiés à l'Assemblée parlementaire du Conseil de l'Europe, «la disposition la plus dangereuse concerne les déboutés du droit d'asile en attente d'expulsion». «Pour eux, l'assignation à résidence devient la règle et la rétention administrative, l'exception. Autrement dit, on demande à un étranger en situation irrégulière de bien vouloir ne pas changer d'adresse, le temps qu'on vienne le chercher, explique-t-il. C'est de l'angélisme, et le résultat sera à coup sûr de rendre les mesures d'expulsion encore moins applicables qu'aujourd'hui.»

Autre disposition inconséquente, selon Mariani: la délivrance d'une «carte d'étranger malade» à tous les étrangers «qui ne peuvent pas accéder au système de soins» dans leur pays d'origine. «Dans le texte initial, rappelle-t-il, cette carte était réservée aux personnes nécessitant des soins qui n'existent pas dans leur pays. La modification adoptée en commission à l'initiative de l'aile gauche du PS aboutit à créer un droit de tirage quasiment illimité sur la Sécurité sociale pour les étrangers malades qui ne sont pas pris en charge par leur pays. Pouvons-nous le supporter, alors que l'AME (Aide médicale de l'État), réservée aux immigrés en situation irrégulière, nous coûte déjà près de 1 milliard d'euros?»

Un gage donné à la gauche de la majorité

«La gauche de la gauche a aussi supprimé en commission le raccourcissement du délai de recours en cas d'expulsion, que souhaitait le gouvernement», ajoute le cofondateur de la Droite populaire, pour qui ce texte est, «en l'état, un gage donné à la frange la plus à gauche de la majorité».

De fait, selon toute vraisemblance, les frondeurs ne fronderont pas. Pascal Cherki, qui considère que «la France n'accueille pas assez d'immigrés étant donné sa puissance et son rang en Europe», aurait souhaité que «toutes les lois votées par la droite sur le sujet depuis 2002 soient abrogées dans le cadre d'une véritable remise à plat». Constatant que «ce choix n'a pas été fait», il juge que ce texte est «une réformette plutôt positive, même si elle est perfectible sur quelques points». De quoi désespérer les associations de défense des sans-papiers, la Cimade ou encore la LDH, cosignataires avec le Syndicat de la magistrature d'une analyse qui accuse ce texte de ne «diminuer en rien laprécarité» de la situation des étrangers en France.

19/07/201, Judith Waintraub

Source : Le Figaro

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