lundi 25 novembre 2024 18:23

La mise en place poussive des accords sur les réfugiés

À peine 2 000 réfugiés arrivés en Grèce et Italie ont été relocalisés dans un pays européen sur les 160 000 promis l’été dernier. Et 6 000 venus du Proche-Orient ont été accueillis. Le président turc Erdogan menace de ne plus respecter l’accord avec l’Union européenne si la libéralisation des visas n’est pas opérationnelle fin juin.

 « Nous attendons de la Turquie qu’elle respecte ses engagements et les menaces ne sont pas le meilleur outil diplomatique dont on puisse faire usage ». Le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker a ainsi répliqué jeudi 26 mai au président turc Recep Tayyip Erdogan qui avait menacé de remettre en cause l’accord de réadmission des réfugiés conclu entre la Turquie et l’Union européenne, le 18 mars.

Si aucune libéralisation des visas pour les ressortissants turcs n’est obtenue d’ici à la fin juin, « aucune décision, aucune loi dans le cadre de l’application de l’accord de réadmission ne sortira du parlement de la République de Turquie », a tancé le président Erdogan, mardi 24 mai lors du sommet humanitaire mondial qui se tenait à Istanbul. L’Union européenne avait listé 72 conditions pour l’exemption de visas, dont une réforme de la loi antiterroriste qu’Ankara n’entend pas mener.

En marge du sommet du G7 qui se tient au Japon, le président du conseil européen Donald Tusk a appelé les pays membres de ce club « à accroître l’aide mondiale pour satisfaire les besoins immédiats et à long terme des réfugiés et des pays hôtes ». « La communauté internationale doit reconnaître que lorsque la Turquie, le Liban et la Jordanie viennent en aide aux réfugiés, ils fournissent en réalité une (assistance) mondiale », a-t-il plaidé.

428 réfugiés ont débarqué en Grèce en quinze jours

Si l’accord UE-Turquie a eu pour effet de réduire considérablement le flux des réfugiés et migrants qui arrivent en Europe, il n’a en rien réglé le sort de ces derniers.

En effet, ils n’étaient plus que 428 Syriens, Irakiens et Afghans - pour la plupart - à avoir débarqué en Grèce les deux dernières semaines, du 8 au 22 mai, selon l’organisation internationale des migrations (OIM). Dans le même temps, 2 719 migrants venants d’Afrique subsaharienne ont gagné l’Italie via la dangereuse traversée de la Méditerranée depuis la Libye. Depuis le début de l’année, près de 200 000 personnes ont gagné l’Europe, dont plus de 191 000 par la mer.

L’organisation des secours s’est certes perfectionnée. Mercredi 25 mai, la marine italienne a ainsi sauvé du naufrage 562 personnes, mais déploré cinq victimes. Vingt à trente personnes ont à nouveau péri jeudi 26 mai lorsqu’une embarcation a chaviré au large de la Libye. Elles viennent alourdir la liste des 1 370 personnes qui ont perdu la vie en mer depuis le début de l’année.

55 000 sont toujours bloqués en Grèce

Près de 55 000 réfugiés et migrants en Grèce restent bloqués dans l’attente d’une décision les concernant.

Depuis le 4 avril, 441 d’entre eux ont été renvoyés en Turquie. Des retours moins massifs que ne l’escomptait l’accord. Deux explications au moins peuvent être avancées. L’annonce que les dossiers seraient traités en une quinzaine de jours semblait un laps de temps fort peu réaliste. Ensuite, la plupart des personnes arrivées en Grèce ont, depuis l’accord, déposé une demande d’asile sur le sol grec et ces demandes une fois traitées font, d’après des informations de première source, presque systématiquement l’objet de recours.

Les relocalisations patinent

Vu la situation humanitaire en Grèce, la commission européenne avait appelé les États européens à réagir le 18 mai en jugeant « de plus en plus urgent d’intensifier les actions de relocalisation » de réfugiés présents en Grèce et en Italie. Mi-mars, elle avait demandé que 20 000 relocalisations _ sur les 160 000 promises en septembre 2015_ soient effectives mi-mai.

Or, au total 1 956 réfugiés ont été relocalisés dans un pays européen à la date du 24 mai, 1 044 venaient de Grèce, 632 d’Italie et 280 de Turquie (depuis l’accord qui prévoit que pour tout Syrien renvoyé en Turquie, un Syrien présent en Turquie serait réinstallé dans un État membre dans la limite de 54 000 places comprises dans les 160 000 promises). La France en a accueilli 500.

Des aides d’urgence européennes

Le 20 mai, la commission a octroyé un fonds d’urgence de 56 millions d’euros à la Grèce, à la fois pour améliorer les conditions d’accueil des migrants et pour accélérer les procédures d’enregistrement et de demande d’asile. Le 26 mai, elle a débloqué 47 millions d’euros à destination de la Turquie pour, d’un côté renforcer le travail des gardes-côtes et de l’autre faciliter l’accès à l’éducation des réfugiés.

De plus, l’Union européenne s’était engagée en juillet 2015 à accueillir 22 500 réfugiés directement depuis les premiers pays d’accueil, à savoir essentiellement le Liban, la Jordanie et la Turquie au travers d’un programme dit de réinstallation. Un peu plus de 6 000 d’entre eux ont effectivement trouvé une terre d’accueil en Europe, l’Autriche et le Royaume-Uni en ayant à eux seuls reçus plus de 3 300 (la France 300).

26/05/2016, Marie Verdier

Source : La Croix

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