dimanche 24 novembre 2024 23:40

Le modèle suédois face au défi de l'extrême droite

L'année 2013 a été marquée en Suède par une recrudescence des activités de groupuscules et de formations d'extrême droite, qui n'hésitent plus à recourir à la violence pour s'affirmer. Mais le plus inquiétant c'est que ces groupes gagnent en popularité auprès des Suédois.

Les récents sondages d'opinion donnent au Parti des Démocrates Suédois (SD-extrême droite) près de 8 pc voire 9 pc des intentions de vote à neuf mois des prochaines élections législatives.

Le SD avait créé la surprise lors des dernières élections législatives de 2010 en obtenant 5,8 pc des suffrages. Il avait ainsi franchi la barre des 4 pc requise pour avoir des députés à l'Assemblée. Et c'est ainsi que ce parti a glané 20 sièges au parlement suédois.

Cette formation politique qui prône la tolérance zéro envers les immigrés a été secouée récemment par une affaire de commentaires haineux révélée par le tabloïd +Expressen+, qui a révélé l'identité de plusieurs personnes ayant posté des commentaires racistes et haineux sur le site internet controversé Avpixlat.
Marie Stensby, déléguée du parti des Démocrates Suédois pour le comté de Jamtland (nord-ouest), a été forcée récemment de quitter le SD, après des révélations sur des commentaires xénophobes qu'elle avait postés sur le net.

Elle avait écrit: "J'espère qu'ils meurent de faim" dans une discussion sur des migrants non accompagnés qui observaient une grève de la faim.

Selon un récent rapport, les groupes néo-nazis suédois ont été plus actifs en 2012 en comparaison avec l'année d'avant.

Un rapport de la Fondation Expo indique en effet que les groupes néo-nazis suédois ont eu 1824 activités en 2012, soit une augmentation de 24 pc par rapport à 2011.

Le Parti des Suédois et le Mouvement de résistance suédois sont les groupes les plus actifs, avec respectivement 1024 et 435 activités signalées, précise la même source.

Les activités citées par le rapport englobent la diffusion de la propagande des groupes, les manifestations, les marches, les crimes et les activités internes telles que les conférences et les réunions.
Le Parti des Suédois -formation néo-nazie- avait mené récemment des campagnes de provocation et d'intimidation visant plusieurs bâtiments publics et locaux d'entreprises médiatiques, en laissant le message suivant ''Stop à la propagande anti-suédoise''.

Le Mouvement de résistance suédois (SMR) est considéré pour sa part comme le groupuscule le plus radical et le plus violent du courant de l'extrême droite en Suède.

Des membres de ce groupe ont été reconnus coupables d'une longue liste de crimes violents (meurtres, agressions, port illégal d'armes). Le 15 décembre, des membres de ce groupe ont mené une attaque spectaculaire contre les participants à un rassemblement contre le racisme à Karrtorp (sud de Stockholm).
Cette attaque a fait plusieurs blessés parmi les manifestants et les forces de l'ordre, suscitant l'indignation et des critiques acerbes à l'égard de la police.

La presse suédoise a critiqué la passivité de la police et le peu de policiers mobilisés lors de ce rassemblement.
Le SMR a eu en 2013 près de 560 activités, selon la Fondation Expo, soit une hausse de 30 pc par rapport à l'année d'avant.

Selon des experts, le SMR est une organisation extrêmement hiérarchisée et contrôlée. Ses membres sont très actifs et prennent part à diverses activités (manifestations, diffusion de la propagande nazie, agressions ). Le groupe recrute aussi des hooligans connus des groupes des clubs de Djurgarden et de l'AIK Solna.

La montée de l'extrême droite en Suède n'est pas passée inaperçue auprès des partisans de cette idéologie. C'est ainsi que Marine Le Pen, dirigeante du Front national (FN), s'était rendue récemment à Stockholm pour rencontrer Jimmie Akesson, chef du parti xénophobe des SD.

Selon plusieurs sources médiatiques, les deux partis ont convenu d'un plus grand rapprochement en vue des élections européennes prévues en 2014.

Les deux leaders ont même évoqué la possibilité de former une alliance, au Parlement européen, avec d'autres partis eurosceptiques.

Par ailleurs, les émeutes qu'a connues la Suède en mai dernier dans certaines banlieues ont dopé le courant d'extrême droite et lui ont fourni une tribune médiatique inattendue.

C'est ainsi que Akesson avait souligné à l'époque que ces émeutes sont "le résultat direct d'une politique d'immigration irresponsable". Un discours qui a apparemment séduit nombre de Suédois qui se sont élevés contre les meneurs des émeutes, dont la plupart sont des immigrés.

Par ailleurs, plusieurs Suédois craignent de voir le scénario norvégien se reproduire dans leur pays.

En Norvège, les dernières élections législatives ont permis au Parti du progrès, formation d'extrême droite, d'entrer au gouvernement et d'obtenir deux ministères stratégiques, à savoir ceux du pétrole et des finances.

Longtemps diabolisé et cantonné dans l'opposition, ce parti a gagné en popularité et est entré pour la première fois au gouvernement, quarante ans après sa création.

Toutefois la répétition en Suède du scénario norvégien ne parait pas si inéluctable. Or les deux principaux partis suédois, à savoir le parti du rassemblement modéré et les Sociaux-démocrates, excluent toute alliance avec la formation des Démocrates suédois.

Le rassemblement Karrtorp 2, tenu dimanche dernier, et auquel ont pris part des milliers de Suédois se veut en quelque sorte une réponse à ces craintes. Les Suédois ont répondu en masse lors de ce rassemblement et d'autres manifestations similaires organisées un peu partout au pays pour réaffirmer leur refus du racisme, de la haine et du nazisme.

Néanmoins, il faudrait attendre les prochaines élections législatives, prévues en septembre prochain, pour avoir une réponse décisive à toutes ces interrogations.

27 déc. 2013, Jihad BENCHEKROUN

Source : MAP

 

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