vendredi 27 décembre 2024 03:49

Le premier centre humanitaire pour migrants va ouvrir à Paris

Géré par Emmaüs solidarité, ce centre de « pré-accueil » est destiné à orienter et abriter provisoirement les migrants qui arrivent dans la capitale.

Depuis de nombreux mois, des milliers de réfugiés transitant par Paris campent sous le métro aérien entre Stalingrad et Jaurès, dont ils sont régulièrement évacués. Ces « camps sauvages » se sont étendus ces derniers temps le long de l’avenue de Flandres, où plus de 2 500 migrants s’entassent dans des conditions humanitaires et sanitaires indignes.

Pour les sortir de la rue, la maire de Paris Anne Hidalgo avait promis au printemps dernier d’aménager deux sites d’hébergement d’urgence dans Paris : l’un destiné à accueillir des familles avec enfants et des femmes, en cours d’aménagement dans l’ancienne usine des eaux d’Ivry-sur-Seine, sera prêt d’ici à la fin de l’année.

L’autre, près de la Porte de la Chapelle, destiné aux hommes, devait être opérationnel dès la mi-octobre. Mais ce calendrier a été différé en raison de l’afflux important des migrants dans les rues de la capitale. Il devrait néanmoins ouvrir dès le lendemain de l’évacuation des campements éphémères, prévue de façon imminente.

Situation qui n’est plus vivable

« Nous attendons que l’État effectue cette opération de mise à l’abri de grande ampleur, précise Dominique Versini, adjointe à la maire de Paris, chargée des affaires sociales. L’état cherche activement des places un peu partout en France car la situation n’est plus humainement supportable et se dégrade chaque jour. La vocation du centre parisien sera ensuite d’accueillir au jour le jour les nouveaux arrivants. »

Le centre est « techniquement prêt ». Implanté sur un grand terrain vague de la SNCF du 18e arrondissement et géré par Emmaüs solidarité, il a été aménagé en trois mois grâce à l’architecte Julien Beller, qui a imaginé des structures modulaires à la fois facilement démontables, et susceptibles d’offrir un accueil « digne ». Il a également fait appel à des artistes pour humaniser le lieu.

Un pôle d’accueil et d’orientation

Ce centre de pré-accueil se compose de trois parties. À l’entrée du camp, un vaste chapiteau gonflable abrite un « pôle d’accueil et d’orientation » destiné à faire une première évaluation de la situation de chaque personne et à l’accompagner ensuite vers une autre structure adaptée à son cas : centre d’hébergement d’urgence, centre d’accueil et d’orientation (CAO), centre d’accueil de demandeurs d’asile (Cada) ou Aide sociale à l’enfance (Ase) pour des mineurs isolés.

À côté de l’accueil, un bâtiment abrite un « pôle santé », géré en partenariat avec le Samu social et Médecins du monde. Là, une équipe de médecins, infirmiers et traducteurs proposera aux migrants des soins de première nécessité et un diagnostic sur leur état de santé.

Au milieu du terrain, un ancien entrepôt de la SNCF a été transformé en centre d’hébergement. Dans des cubes de bois, une centaine de chambres de 4 lits s’alignent sur deux étages, auxquelles il faut ajouter des espaces cantine et des salles de repos.

Une rotation permanente

« Ces lieux sont destinés à héberger des hommes majeurs et seuls, qui relèvent de la demande d’asile, pour une mise à l’abri provisoire de 5 à 10 jours, avant qu’ils ne soient redirigés ailleurs », précise Patrick Vieillescazes, chef de cabinet du préfet de la région. « Le défi est de faire de ce site un sas, ajoute-t-il, et qu’il y ait une rotation permanente pour éviter la reconstitution de campements sauvages. »

Il ne s’agit donc pas d’un centre d’hébergement où les occupants seraient amenés à séjourner. « L’idée est de les mettre à l’abri, le temps d’amorcer une réflexion sur leur devenir et [qu’ils soient] orientés vers des solutions d’accueil à plus long terme », souligne Emmanuelle Cosse, ministre du logement.

Reste à convaincre les migrants de s’y rendre

« Il s’agit bien d’un centre humanitaire de premier accueil », insiste Aurélie El Hassak-Marzorati, directrice générale adjointe d’Emmaüs Solidarité. « Un lieu qui permettra enfin d’accueillir de façon décente les migrants qui arrivent sur Paris, et de les conseiller pour mener à bien leur projet migratoire » précise-t-elle, ajoutant que l’information des migrants sur leurs droits et les démarches qu’ils peuvent effectuer est « au cœur de ce projet ».

C’est la « première fois qu’un tel centre humanitaire est créé dans une grande ville française », rappelle Paul Duprez, président d’Emmaüs solidarité. Il restera à convaincre les migrants de s’y rendre. Des maraudes seront organisées par les associations pour informer ceux qui continuent à affluer, de plus en plus nombreux, dans les rues de la capitale.

Plus de 400 places d’hébergement

Le centre humanitaire pour migrants du Nord de Paris a représenté un investissement de 6,5 millions d’euros, assumé à 80 % par la ville de Paris et à 20 % par l’État. L’état prendra en charge l’intégralité des dépenses d’hébergement.

Pour assurer son fonctionnement, Emmaüs Solidarité a recruté 117 salariés. Un appel a été lancé à tous les Parisiens bénévoles pour renforcer l’équipe et accompagner physiquement les personnes qui ne seront pas hébergées sur place vers d’autres lieux d’accueil.

Le pôle hébergement a pour l’instant une capacité d’accueil de 400 personnesencadrées par des « référents ». Il pourrait dans un second temps en accueillir 600.

03/11/2016, Christine Legrand

Source : la-croix.com

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