mercredi 27 novembre 2024 11:52

Les migrants refusent de bouger, après la mort d'un des leurs à la frontière gréco-macédonienne

Nous mourrons tous ici, mais nous ne partirons pas" : Abdul, un Marocain, désigne le corps sans vie d'un compatriote, qui s'est apparemment suicidé jeudi à Idomeni en saisissant à deux mains des câbles électriques, après des jours d'attente à la frontière gréco-macédonienne, fermée par Skopje à certains migrants.

Portant le corps de l'homme brûlé, un groupe de Marocains s'avance vers la frontière en criant "Allahou akbar". La police grecque leur répond par des gaz lacrymogènes. Un autre Marocain s'était sévèrement brûlé dans des circonstances similaires samedi.

"Cela fait cinq jours que nous sommes ici", affirme Mohammed à l'AFP, "nous n'avons rien à manger et nous avons froid. Pourquoi est-ce qu'ils ne nous laissent pas passer. Nous ne sommes pas des terroristes".
Mais désormais, Skopje n'autorise plus que les ressortissants des pays en guerre --Syrie, Irak, Afghanistan-- à passer, et les autres stagnent là pendant des jours et des semaines.

Leur colère a débordé jeudi matin. Des groupes d'hommes ont saisi des tentes collectives et détruit des préfabriqués apportés par des ONG et l'Agence des Nations Unies pour les réfugiés.

"Nous avons été attaqués à l'aube. Notre sécurité étant menacée, nous avons décidé de nous retirer pour voir comment la situation évolue", explique Antonis Rigas, chef de la mission de Médecins sans frontières dans la région.

L'organisation internationale pour les Migrations (OIM) a d'ailleurs "recommandé aux organisations internationales et aux ONG de ne pas pénétrer dans le camp, pour raisons de sécurité".

Une autre bagarre a éclaté jeudi lorsque les migrants empêchés de passer ont bloqué le passage aux réfugiés qui en avaient le droit.

La police anti-émeute grecque a dû intervenir, alors que les deux groupes avaient commencé à se lancer des pierres.

'Chrétien et en danger'

"Nous ne sommes pas des migrants économiques, nous avons de l'argent", fait valoir Omid, un Iranien de 35 ans qui a participé à cette manifestation. Il se dit "chrétien et en danger ici". "Il y a des musulmans qui crient +jihad+ et +tuer pour Allah+. Ce matin, ils nous ont attaqués avec des pierres et des barres de fer".

En désespoir de cause, les autorités grecques ont envoyé sur place trains et autobus, encourageant ceux qui n'ont pas l'espoir de passer à retourner vers Thessalonique (nord de la Grèce) ou même Athènes. Seules quelque 120 personnes ont accepté.

Or, selon la police, il y a sur place plus de 3.000 migrants dits économiques, venus d'Iran, du Maroc, du Pakistan et du Bangladesh notamment, en plus de 2.500 Syriens, Irakiens et Afghans ayant droit au statut de réfugié.

Les liaisons ferroviaires entre la Grèce et la Macédoine sont bloquées aussi depuis plusieurs jours par des Iraniens occupant les voies ferrées.

Le ministre grec en charge des Migrants, Iannis Mouzalas, a assuré jeudi qu'il serait mis fin "sans violence" à cette situation, avançant l'espoir "d'une solution dans les dix prochains jours" à la frontière. Avec d'autres bagarres en perspective en attendant.

La violence a également éclaté ce week-end alors que les Macédoniens se hâtaient d'achever une barrière de trois kilomètres pour fermer la frontière. Samedi, un groupe de migrants a tenté de forcer le passage en lançant des pierres, tandis que la police ripostait à coups de grenades assourdissantes.
Dix-huit policiers macédoniens ont été légèrement blessés, et plusieurs véhicules de la police et de l'armée endommagés.

L'OIM estimait à fin novembre que près de 860.000 migrants avaient débarqué en Europe cette année, et que plus de 3.500 étaient morts en tentant cette traversée de la Méditerranée.

Depuis l'été, les pays d'Europe centrale et du sud-est ont renforcé leurs frontières pour contrôler le flux, une tendance qui s'est accélérée après les attentats du 13 novembre à Paris, où l'enquête a révélé qu'au moins deux assaillants étaient entrés en UE par la Grèce en se faisant passer pour des réfugiés syriens.

3 déc 2015,Vassilis KYRIAKOULIS, avec Catherine BOITARD 

Source : AFP

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