lundi 25 novembre 2024 09:03

Les pays de destination entre le marteau de la crise économique et l'enclume des droits de migrants

Les pays de destination ou d'accueil, confrontés aux effets de la crise économique et financière ayant frappé de plein fouet le monde, se sont retrouvés entre le marteau de la révision de leurs législations nationales et l'enclume des exigences du respect des droits des millions de migrants.

Soulevé toujours en termes de gestion de la sécurité, la migration est en effet l'un des grands défis de ce siècle qui nécessite une coopération, une solidarité et une cohésion renforcées entre les Etats concernés.

"En raison des liens étroits entre la migration et la sécurité se construisent dorénavant dans le monde des murs physiques, des murs électroniques, des murs biométriques et parfois des murs d'incompréhension et de rejet", a déclaré dans un entretien à la MAP, M. Omar Zniber, ambassadeur, représentant permanent du Maroc auprès des Organisations internationales en Autriche.

Dans ce sens, le diplomate marocain, qui participe au Caire à la conférence méditerranéenne de l'Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE), a déploré les débats publics "stigmatisant les populations immigrées pour des raisons politiciennes de bas étage", comportement qui, selon lui, ne prend pas en considération la situation de précarité sociale et économique, et de fragilité juridique dans laquelle vivent ces personnes et qui est accentuée par l'actuelle crise économique et financière.

200 millions migrants dans le monde, menacés par la crise économique

L'immigration, qui concerne 200 millions personnes, soit 3 pc de la population mondiale, est un phénomène qui touche aussi bien les pays développés, que ceux en développement des continents africain et asiatique.

Ce chiffre est à mettre en perspective avec l'ère de la globalisation "où il existe une contradiction fondamentale entre la libre circulation de l'information, des idées, des marchandises et des capitaux, et les restrictions souvent imposées à la libre circulation des personnes", a relevé le diplomate marocain.

Tout en relevant que la crise économique et financière actuelle a accentué cette contradiction, il a précisé que les migrants, notamment les moins qualifiés, sont les premières victimes de cette situation du fait qu'ils sont régulièrement exclus du marché du travail et qu'ils sont recrutés ou licenciés en fonction des fluctuations des économies nationales. Les immigrés représentent en général et proportionnellement un pourcentage double au niveau du chômage par rapport aux populations autochtones, a-t-il dit.

A cet égard, il a souligné que durant la période de crise, les politiques de restriction, de repli identitaire, de fermeture des marchés de l'emploi et des frontières contribuent également à "renforcer certains préjugés à l'encontre des migrants et à alimenter des ressentiments xénophobes au sein des populations d'accueil".


Des politiques "regrettables" en matière d'immigration

Le diplomate marocain a qualifié de "regrettables" les politiques de repli des pays d'accueil du fait qu'elles ne tiennent pas compte des besoins à moyen et long termes des économies des pays industrialisés, ni des tendances démographiques.

Dans ce sens, il a rappelé certaines études qui révèlent qu'en l'absence d'immigration, la population en âge de travailler dans les pays développés devrait reculer de 23 pc d'ici à 2050. Par contre, cette population devrait tripler en Afrique pour passer de 408 millions de personnes en 2005 à 1,12 milliard.

A cet égard, il a souligné que la crise financière ne doit pas constituer un obstacle à "l'établissement d'une vision à long terme en matière de gestion de la migration par une approche équilibrée, une gestion commune tenant compte du niveau démographique dans certains pays de l'OSCE et des Etats partenaires".

"Il s'agit tout simplement d'évaluer les besoins réels dans le cadre d'une politique commune, et bien entendu dans le respect des politiques arrêtées par chacun des Etats", a suggéré M. Zniber.

Pour remédier à cette situation, il a insisté sur la nécessité d'oeuvrer pour limiter l'impact de la crise sur les pays d'origine de la migration qui comptent souvent sur les transferts de fonds dans le maintien de l'équilibre de leurs économies et leurs politiques de développement.

M. Zniber a souligné, dans le même sens, l'impératif pour les pays de destination de lutter contre la "marchandisation" des immigrés en mettant leurs droits au coeur de toutes les politiques migratoires, notamment ceux concernant la protection et le renforcement des droits socio-politiques.

Il a également plaidé pour l'élargissement de l'accès légal aux marchés du travail, notamment par la promotion de nouvelles formes de migrations, la lutte contre les discriminations et les stéréotypes, le renforcement du dialogue régional sur la migration, ainsi que l'information et l'éducation.

Volet économique, financier et social, le diplomate a insisté sur la nécessité de la mise en place d'une politique à long terme pour minimiser au maximum les conséquences des flux migratoires sur le plan de la gestion de la sécurité à travers l'encouragement d'une migration bien réglementée.

Il a aussi plaidé pour l'encouragement des transferts en matière du savoir et savoir-faire des immigrants et la mise en place des modèles de croissance où la migration est conçue comme une partie intégrante de la solution, ainsi qu'un système de formation et de requalification d'immigrants pour leur permettre de s'adapter aux changements et aux aléas du marché de travail.

La gestion de la migration requiert également l'implication des pays d'origine et de transit. En matière de lutte contre la migration illégale, l'action des Etats concernés doit, en particulier, viser à contrecarrer les activités des organisations criminelles qui extorquent les économies des migrants et organisent les départs dans des conditions très dangereuses, avec les drames humains que l'on connaît.

Source : MAP

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