mercredi 27 novembre 2024 11:49

M’barek Bouchedda, gardien d’immeuble le jour, musicien le soir.

Féru de musique, M’barek Bouchedda arrive en France avec un rêve ; suivre des études musicales. Il lui faudra d’abord connaître toute « la galère » du travailleur immigré avant de pouvoir rejoindre une école de musique. Et, pour pouvoir,le soir, s’adonner à son art, travailler comme gardien d’immeuble le jour.

Son premier instrument de musique, comme bien des enfants marocains, M’barek Bouchedda se l’est fabriqué tout seul. A partir d’une boite et de quelques fils tendus. C’est tout seul également qu’il a appris à en extirper des sons. Pour cela, il lui a suffi de regarder jouer des musiciens. Né à Agadir en 1954, M’barek ne se souvient plus comment il a chopé le virus. Il se rappelle juste que, très tôt, il a voulu devenir musicien. Des conditions familiales difficiles ayant affecté sa scolarité, il quitte le collège en deuxième année secondaire. Son oncle, commerçant, l’emmène avec lui en Mauritanie, puis au Sénégal dans la perspective de l’initier à son métier. Mais l’adolescent n’a pas la bosse des affaires. La seule chose qui l’intéresse, c’est jouer de la musique. Son périple africain prend donc fin rapidement et le jeune homme est renvoyé au Maroc où il retrouve avec délice l’atmosphère ghiwanie et baba cool dans laquelle baigne alors Agadir. Des hippies venus du monde entier y ont installé leurs pénates pour le plus grand bonheur de la jeunesse locale. C’est également le temps où Nass El Ghiwan électrise le public marocain.

Des occasions multiples de jouer

Pour 300 DH – une fortune à l’époque – M’barek a acquis un vrai violon. Avec ses copains, il forme un petit groupe amateur qui se produit à l’occasion des manifestations nationales. Mais, en 1972, le risque de se faire enrôler dans l’armée – il a maintenant 18 ans et le service militaire le guette – le fait monter dans la voiture d’un cousin en partance pour l’Europe. Arrivé à Colmar, M’barek a le choix entre Paris et l’Allemagne. Il opte pour la capitale française où vit déjà son frère. Son ambition est d’intégrer une école de musique pour acquérir une vraie formation, lui qui s’est formé sur le tas. Mais il lui faut d’abord assurer sa subsistance. Il s’inscrit comme intérimaire et connait la galère du travailleur immigré, la vie à plusieurs dans des logements sordides, la dureté du travail, la gamelle à préparer le soir. Il ne pourra réaliser son rêve et s’inscrire à l’école communale de musique qu’au bout de trois ans, une fois ses papiers en règle. Sa soif de savoir est si grande qu’il accumule les cursus. Il en poursuit trois, de cinq ans chacun, soit quinze ans d’études musicales au total. Il acquiert ainsi une grande maitrise de ses deux instruments de prédilection, le violon et le luth.

9 dec 2015,  Hinde Taarji

Source : Portait des Marocains du monde

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