lundi 25 novembre 2024 08:43

Mohammed Moussaoui : « Ce n’est pas un débat sur l’islam »

Invité, mercredi 16 décembre, de l'Association des journalistes d'information religieuse, le président du Conseil français du culte musulman s'est inquiété de la tournure prise par le débat sur l'identité nationale. Reçu le 23 décembre prochain par Nicolas Sarkozy, il lui fera part «des préoccupations et inquiétudes» des musulmans

Le président du Conseil français du culte musulman (CFCM), Mohammed Moussaoui, n'y va pas par quatre chemins : « la façon dont se déroule le débat sur l'identité nationale nous inquiète », a-t-il confié en réponse à une question de La-Croix.com.

Invité, mercredi 16 décembre, de
l'Association des journalistes d'information religieuse (Ajir), il a dénoncé les « dérapages inadmissibles tenus par des personnalités du gouvernement ou de partis politiques ». « La tribune publiée dans Le Monde par le président de la République était équilibrée et tentait de recadrer le débat, mais ce n'était pas suffisant », a-t-il regretté.

Reçu le 23 décembre prochain à l'Élysée par Nicolas Sarkozy, il aura d'ailleurs l'occasion de lui faire part « des inquiétudes et préoccupations des musulmans de France ».

Se pencher sur toutes les pratiques radicales

Selon lui, ce débat, qui « se transforme en une stigmatisation des musulmans » a besoin d'être « clarifié ». « Le débat est là : discuter de son opportunité serait purement théorique, a-t-il expliqué. Il laisse des interrogations qui nécessitent de rappeler certaines choses de façon ferme. »

Et notamment, selon lui, « le principe d'égalité » : « l'islam doit être traité à égalité avec les autres religions. Ce n'est pas un débat sur l'islam ».

C'est avec la même optique que le président du CFCM voit le débat autour du voile intégral. « J'avais été choqué par l'idée d'une commission d'enquête : cela supposait quelque chose de délictueux, explique-t-il. La mission d'information a été admise par tous, mais j'aurais trouvé plus judicieux qu'elle se penche sur toutes les formes d'expression radicales, y compris d'ordre politique. »

Ne pas cultiver la victimisation des musulmans

Si, sur le fond, il rappelle que « le CFCM ne souhaite pas que la pratique voile intégral s'installe en France », Mohammed Moussaoui redoute les effets d'une loi contre une pratique dont il rappelle qu'elle est très minoritaire.

« Comment va-t-on l'appliquer, s'interroge-t-il ? Va-t-on arrêter les femmes qui portent le voile intégral ? Va-t-on confisquer leur burqa ? Alors ces femmes vont être forcées à vivre recluses chez elles et ce n'est pas ainsi qu'on règlera le problème de leur émancipation et de leur intégration. »

Il redoute aussi qu'une loi ne légitime, par extrapolation, un certain nombre d'actions islamophobes, « comme on l'a vu avec la loi sur le voile où des femmes portant un foulard ont été humiliées lors de leur passage à des caisses de supermarché».

« Cette loi, dont on peut s'interroger sur le fondement juridique, risque enfin de donner des arguments aux extrémistes qui vont cultiver la victimisation des musulmans », estime-t-il enfin.

« La République n'est pas menacée »

Concernant l'islam radical, Mohammed Moussaoui estime d'ailleurs que « la République n'est pas menacée ». « Ces courants sont minoritaires et la République a les moyens suffisants pour les contenir, soutient-il. Leur idéologie n'a pas d'avenir en France : il ne faut pas sous-estimer le bon sens des citoyens, qu'ils soient musulmans ou non. »

Le président du CFCM fait en effet l'apologie d'un islam du « juste milieu » et se situe « dans une logique de dialogue ». « Il est clair que le CFCM a été créé comme interlocuteur des pouvoirs publics, et qu'il ne peut qu'avoir une attitude de critique constructive, même sur les sujets gênants », explique-t-il.

Il espère d'ailleurs que la réforme en cours du CFCM permettra à celui-ci de plus s'affirmer dans les débats théologiques entre musulmans. Un conseil des imams, rassemblant les diverses institutions existant dans les fédérations membres du CFCM, pourrait ainsi être créé, apte à délivrer des avis juridiques.

Source : La Croix

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