mardi 26 novembre 2024 08:43

Onzième Forum social mondial de Dakar Liberté de circulation pour tous et partout

Le onzième Forum social mondial de Dakar, au Sénégal, est le second a être organisé en Afrique. Aussi les organisateurs ont-ils décidé de mettre en avant la thématique des diasporas africaines, et notamment des enjeux liés aux politiques migratoires mondiales.

Les participants aux multiples tables rondes organisées sur la thématique des diasporas africaines et particulièrement, sur les enjeux liés aux politiques migratoires mondiales, finissent toujours par faire le même constat: certains ont le droit d'aller où ils veulent, d'autres ont une liberté de mouvement plus... limitée. Les politiques migratoires restrictives des pays du Nord sont mises en cause, ainsi que les pratiques d'expulsions abusives et les décisions arbitraires pour la délivrance de visas. Et cela au Nord comme au Sud.

Les pratiques d'expulsion abusives du Nord

Spitou Mendy est Sénégalais et vit à Almeria, en Espagne, depuis quatorze ans. Au cours d'une table ronde sur les politiques migratoires, il témoigne: “Je suis resté quatre années sans papier. En 2004, quand ma situation a été régularisée, j'ai voulu procéder au regroupement familial. En 2006, la préfecture a accepté, mais c'est au Sénégal qu'il y a eu un problème. Ma femme et une de mes filles ont eu un visa, mais pas mes deux autres filles...”

L'année dernière Spitou Mendy finit par venir chercher ses filles à Dakar pour les faire entrer sur le territoire espagnol... où il se fait arrêter par la police. Ses filles sont placées en détention. Après une procédure judiciaire, au bout de plusieurs mois, la justice espagnole finit par lui donner raison et permet à toute la famille de rester. Soulagé, Spitou Mendy n'en est pas moins amer.

“A aucun citoyen européen on aurait infligé cette souffrance-là, estime-t-il. Aujourd'hui je me défoule, et je dénonce ces politiques néfastes pour les êtres humains. Les gens devraient pouvoir respirer là où ils veulent, aller là où ils veulent !”

Spitou Mendy

Sans oublier les responsabilités du Sud

Au détour d'une allée de l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar, qui accueille le Forum, on croise une file de personnes vêtues d'un étrange gilet orange. C'est la Caravane des migrants. Parmi eux, Sissoko Anzoumane. Il est Malien et vit en France depuis dix-sept ans, dont quatorze passées en situation irrégulière. Porte parole d'une ONG française baptisée “Ministère de la régularisation de tous les sans-papiers”, il ne veut pas que les responsabilités des pays du Sud soient oubliées.

Sensibiliser les populations locales aux politiques migratoires n'est pas le seul objectif des militants qui participent au forum. Il s'agit aussi d'expliquer, de raconter son expérience, en prenant son temps. C'est pour cela qu'Evelyne Deugoué a fait le voyage. Camerounaise, elle vit à Paris en situation irrégulière. Sans permis de séjour, sans permis de travail. Douze ans que ça dure. Alors elle a envie de s'adresser aux jeunes candidats au départ,  pour leur dire que l'émigration n'est peut-être pas la meilleure solution.

Le forum est aussi le lieu d'initiatives plus étonnantes. Comme celle de José Douglazzi. Ce syndicaliste suisse, d'origine italienne, rappelle que la population suisse est à 23% composée de citoyens d'origine étrangère. Et c'est donc en immigré qu'il s'adresse aux sans-papiers africains au cours d'un atelier qu'il a lui-même organisé. “On partage les mêmes problèmes! La légalité de la migration, la régularisation des sans-papiers, l'accès à la sécurité sociale, les difficultés d'intégration... Mon but, en venant au Forum social mondial, c'est de créer un réseau syndical international des migrants.”

D'ici la fin du forum, les participants comptent élaborer une série de propositions destinées aux représentants politiques afin de trouver de nouvelles stratégies migratoires. Et jeudi, une grande marche traversera Dakar pour réclamer la liberté de circulation pour tous et partout.

Une Charte mondiale pour les migrants

En marge du Forum social, l'île de Gorée a accueilli du 2 au 4 février, la rencontre mondiale des migrants dont le but était de rédiger et proclamer une Charte mondiale garantissant la liberté de circulation et d’installation des êtres humains sur la planète. La charte des migrants est partie de l'initiative d’un migrant “sans papiers” lors d’une lutte engagée par 120 familles ainsi que leurs enfants en 2006 à Marseille en vue d’obtenir des titres de séjour en France. D'où son originalité puisque jusqu'ici, tous les textes sur les migrants ont été rédigés par les Nations unies. La charte comprend trois droits fondamentaux:
• La liberté de se déplacer sur la planète et de s’installer librement où on le souhaite au même titre que les droits qui sont accordés à la libre circulation des marchandises et des capitaux.

• L’égalité de droits dans tous les domaines de la vie entre migrants et nationaux dans les pays d’accueil.
• L’exercice par tous d’une pleine citoyenneté fondée sur la résidence et non la nationalité.

8/2/2011, David Baché

Source : Aufait

Google+ Google+