samedi 30 novembre 2024 01:58

Le Conseil musulman de Grande-Bretagne (MCB) a appelé, dimanche, à une "action énergique" contre l'islamophobie, sur fond de craintes face à l'augmentation du nombre des crimes haineux contre la communauté musulmane.

Le secrétaire général du MCB, Farouq Mourad, a plaidé lors d'une conférence à Birmingham pour un plus grand contrôle et suivi des crimes anti-musulmans en réponse aux incidents ayant eu lieu, y compris les agressions violentes, les menaces de mort et la profanation de tombes.

"Les attaques islamophobes, sur les personnes et les propriétés, sont commis par une infime minorité, mais le nombre d'incidents est en augmentation. Une action forte est nécessaire, ce qui signifie que nous devons avoir une façon systématique d'enregistrer et d'analyser de telles attaques", a-t-il déclaré.

L'appel a été appuyé par d'éminents académiciens, un think-tank anti-terroriste et plusieurs associations représentant la communauté musulmane, à la lumière des données confirmées par la police métropolitaine faisant état de 762 infractions islamophobes à Londres depuis avril 2009 dont 333 en 2010/11 et 57 depuis le mois d'avril dernier.

12/06/11

Source : MAP

Les travaux de la 12ème session ordinaire du Conseil supérieur des oulémas, qui s'est tenue depuis vendredi à Tanger sur ordre d'Amir Al Mouminine, SM le Roi Mohammed VI, ont pris fin dimanche.

Intervenant lors de la cérémonie de clôture de cette session, tenue en présence du ministre des Habous et des affaires islamiques, Ahmed Toufiq, le secrétaire général du Conseil, Mohamed Yessef a affirmé que les oulémas du Royaume sont unanimes à saluer le déroulement du processus de réforme du champ religieux, mené conformément aux Hautes orientations d'Amir Al Mouminine, SM le Roi Mohammed VI, en vue de réaliser les objectifs et les attentes de la Nation.

Cette unanimité ouvre la voie d'une nouvelle étape dans cette réforme pour laquelle le Maroc est pleinement engagé, a-t-il ajouté, soulignant la disponibilité des oulémas à accompagner cette réforme et à contribuer à la réflexion sur les grandes questions de la Nation.

Par ailleurs, M. Yessef a noté que l'un des sujets les plus importants examinés lors de cette session fut le renforcement des liens des Marocains résidant à l'étranger avec leur identité religieuse et nationale, à travers le Conseil des oulémas des Marocains d'Europe, conformément aux Hautes directives du Souverain, qui entoure de sa Haute sollicitude les Marocains quel que soit le lieu de leur résidence.

Le Conseil des oulémas des Marocains d'Europe, qui a été représenté par une délégation aux travaux de cette session, s'attèlera au raffermissement des valeurs des MRE et de leur attachement à leurs origines, aux constantes de la Nation et à l'institution d'Imarat Al Mouminine, a-t-il indiqué.

D'autre part, M. Yessef a estimé que les jeunes du Maroc, dans leur attachement à leur identité nationale et aux fondements de la Nation, représentent l'espoir en l'avenir du Maroc et doivent bénéficier de la formation nécessaire pour faire émerger les compétences aptes à relever les défis de demain.

Le rapport général des travaux de cette session, rendu public à cette occasion, a passé en revue les différentes questions examinées par les commissions thématiques du Conseil, qui ont émis plusieurs recommandations devant figurer dans le plan d'action du Conseil pour la période à venir.

A cet égard, la Commission de planification de l'action du Conseil des oulémas des Marocains d'Europe a procédé au diagnostic des principaux problèmes relevant de la compétence de cette institution, notamment les questions de la famille, des jeunes, de l'encadrement et de la formation religieuse, et examiné les moyens de promouvoir l'action et le rayonnement de ce conseil.

Pour sa part, la Commission des avis religieux a relevé l'importance de répondre en ligne aux questions des citoyens, appelant également à l'organisation d'une conférence sur les méthodes suivies par les oulémas dans l'élaboration des avis religieux, alors que la Commission de la promotion du patrimoine islamique a approuvé le projet de publication de l'ouvrage "Al Mouataa" et de plusieurs autres livres du fiqh islamique.

De son côté, la Commission des médias a proposé la mise en place d'une stratégie de communication, la création d'un centre d'information relevant du conseil, le renforcement des programmes élaborés par le Conseil et diffusés sur les stations de radio et chaînes de télévision, l'activation du site du Conseil sur internet et la création de sites dédiés aux conseils locaux des oulémas.

La Commission de qualification des imams a salué la Charte des oulémas et préconisé notamment l'adéquation de la formation des imams, la révision des modules de formation et l'accompagnement des encadrants.

Après lecture du rapport général des travaux de la 12ème session ordinaire du Conseil supérieur des oulémas, les participants à cette session ont adressé un message de fidélité et de loyalisme à Amir Al Mouminine, SM le Roi Mohammed VI, que Dieu L'assiste.

12/06/11

Source : MAP

Claude Guéant va se montrer plus vigilant sur les conditions d'accès à la nationalité française pour les étrangers après la validation de la loi sur l'immigration par le Conseil constitutionnel.

Signe de cette volonté, le ministre de l'Intérieur a récemment refusé la nationalité française à un Algérien marié à une Française pour "défaut d'assimilation", jugeant que les conditions dans lesquelles vivait le couple ne respectaient pas le principe d'égalité homme-femme.

Claude Guéant entend désormais clarifier une situation qui aboutit à ce qu'environ 130.000 étrangers acquièrent la nationalité française chaque année, dont 16.000 par mariage.

Les dossiers seront étudiés "plus attentivement, mais il ne s'agit pas d'un durcissement", dit-on dans son entourage.

La présidente du Front national, Marine Le Pen, a récemment appelé le ministre de l'Intérieur à durcir le code de la nationalité. Elle voudrait notamment supprimer le droit à la double nationalité.

Quatre années de mariage sont nécessaires pour devenir Français par mariage et le gouvernement peut s'opposer à l'acquisition de nationalité en cas d'indignité ou de défaut d'assimilation, comme une situation effective de polygamie.

Selon Europe 1, qui a révélé l'affaire, l'Algérien auquel Claude Guéant refuse la nationalité n'a pas commis de faits graves, n'est pas non plus bigame ou polygame et son épouse ne porte pas le voile intégral.

En revanche, il l'empêcherait de sortir et nourrirait une conception "dégradante" de la place de la femme dans la société, dit-on au ministère de l'Intérieur.

"L'enquête de proximité conduite par la préfecture a permis de constater que l'épouse de cet Algérien ne prenait la parole qu'après accord de son mari, qu'il restreignait sa liberté d'aller et venir, l'interdisant de sortir seule, et qu'il ne souhaitait pas qu'elle travaille", précise-t-on.

Claude Guéant a plaidé la semaine dernière dans une tribune au Monde pour "une assimilation réussie" des immigrants qui "doivent être fiers d'être accueillis sur le territoire français" et "se fondre dans un destin collectif".

Il va pouvoir s'appuyer sur la loi sur l'immigration validée jeudi par le Conseil constitutionnel.

Pour l'acquisition de nationalité par mariage, elle impose désormais, outre une "communauté de vie effective et matérielle", une "connaissance suffisante" du français.

La maîtrise de la langue sera donc évaluée de manière "beaucoup plus objective" en s'inspirant des référentiels linguistiques européens.

Le prochain rapport d'une mission parlementaire sur "le droit de la nationalité pourrait également servir de cadre à une refonte des textes beaucoup plus ambitieuse.

Mais celle-ci pourrait être portée par Nicolas Sarkozy pendant sa probable campagne présidentielle.

10/6/2011, Gérard Bon, édité par Yves Clarisse

Source : Le Point/Reuters

 

Ismaïl Alaoui, ancien ministre et président de l'Association pour le développement du monde rural (ADMR), a plaidé, jeudi à Lyon, pour une approche de co-développement dans les relations entre le nord et le sud de la Méditerranée.

M. Alaoui, qui intervenait lors d'une journée d'étude sous le thème "Aux confluences des coopérations : la diversité un atout, un enjeu", a mis en évidence le sens du concept de la "diversité" en relation avec "l'immigration", un phénomène dont il faut "revoir le mode de gestion" entre les deux rives de la Mare Nostrum.

"La meilleure façon de gérer cette problématique est d'entrer dans un processus de co-développement", a-t-il estimé en mettant en exergue la complémentarité entre les deux rives.

L'ancien ministre a jugé nécessaire que l'Union pour la Méditerranée (UPM) "passe des voeux pieux à l'acte et ne réédite pas l'expérience du Processus de Barcelone", relevant que l'UPM se doit de "mettre en branle tout un programme d'aides où tout le monde serait gagnant".

Cette journée a été organisée par l'Association confluence pour le respect et la diversité (ACRD), en coopération avec le Centre d'études de la politique et des institutions américaines (CEPIA) de l'Université Jean Moulin Lyon3. Elle a rassemblé des responsables politiques, universitaires et experts de divers horizons et de plusieurs pays.

Elle a permis de mettre en contact autour du même thème, directement par visioconférence, des étudiants de plusieurs établissements universitaires dans et hors du Maghreb, dont les universités de Rabat, de Tunis et de Lyon.

Les participants ont débattu principalement des flux migratoires, de la fuite des cerveaux, de l'apport de la diversité dans les échanges économiques et les perspectives de la coopération.

L'objectif de cette journée était d'étudier la "diversité" aux temps des transformations politiques de la rive sud, en mettant l'accent sur ses atouts et incidences sur l'espace européen, ainsi que de débattre de l'interaction entre diversité, sécurité et coopération, "un triptyque possible et nécessaire".

Un appel à "construire avec nos convergences, à repenser nos modèles, à mettre en commun nos connaissances et techniques pour travailler ensemble", a été lancé, à cette occasion, par Jean Michel Serouart, modérateur de cette visioconférence et secrétaire général de l'ACRD.

Dirigée par le Franco-marocain Abdelaziz Dahhassi, l'ACRD a été créée, à Lyon, en décembre 2010 en partenariat avec la région Rhône-Alpes et le département d'Etat américain.

Elle a pour objet la création, l'animation et la gestion à Lyon d'un Centre dédié à la diversité et à la lutte contre les discriminations. Dans le cadre d'une démarche de reconnaissance internationale, cette association ambitionne de devenir à terme une Fondation avec un rôle consultatif auprès de l'ONU. 

10/06/11

Source : MAP

Pas moins de 204.000 ressortissants étrangers ont obtenu la nationalité britannique en 2009, selon une étude publiée samedi par le Daily express.

Ce chiffre place la Grande Bretagne au premier rang des pays européens ayant accordé la nationalité aux étrangers, devant la France (136.000) et l'Allemagne (96.000) au cours de 2009, selon la même source.

Le nombre de passeports accordés aux étrangers a augmenté de 57% par rapport a 2008.

"Ce taux qui équivaut à la délivrance de deux passeports toutes les cinq minutes, fait de la Grande Bretagne le pays le plus ouvert à l'immigration", commente le quotidien.

La majorité des nouveaux passeports britanniques ont été délivrés aux Indiens (26.500), aux Pakistanais (21.000) et aux Bengalais (12.000), précise l'étude. Les statistiques montrent que la Grande Bretagne a accordé la nationalité a un immigré sur quatre (25%) des 776.000 nouveaux citoyens accueillis dans l'UE en 2009.

Pour le quotidien, cette augmentation peut être partiellement expliquée par la "quasi-amnistie" accordée aux demandeurs d'asile dont 450.000 dossiers ont été enregistrés en 2006.

Par ailleurs, le total des immigrés ayant obtenu les nationalités des pays de l'UE a enregistré une hausse de 11% en 2009 par rapport à l'année précédente. Le gouvernement de coalition projette de réduire l'immigration à quelques dizaines de milliers à l'horizon 2015.

11 juin 2011

Source : Agence de presse algérienne (APS)

Les Marocains sont les plus nombreux, parmi les extra-européens, a avoir été naturalisés en 2009. Eurostat a publié vendredi un rapport sur l’acquisition de la nationalité dans les 27 pays de l’UE.

Les descendants d’Ibn Batouta ont raflé la plus grande partie des nationalités européennes octroyées en 2009. Sur les 776 000 naturalisations, 7,7% ont été acquises par des citoyens du Maroc, soit 59 900 Marocains devenus Européens. Suivis par les Turcs (51 000) et les Indiens, avec 31 100 naturalisations.

Les Marocains, citoyens du monde

Les Marocains arrivent en tête en France également. En 2009, sur les 136 000 passeports rouges octroyées par le pays de Voltaire 19% étaient accordées à des Marocains. Viennent ensuite les Algériens avec 15% de naturalisations.

La Belgique a également ouvert grand ses portes aux Marocains. Elle leur a réservé 24,2% des passeports attribuées pour 2009. De même que les Pays-Bas. 18,5% des naturalisations ont concerné nos compatriotes.

Les Marocains emportent 15,3% des octrois de nationalité italienne, pas loin derrière les Albanais (16%). En Espagne, le Maroc (8,4%) ils se font devancer par contre par l’Equateur et la Colombie.

Les premiers de la classe

L’UE 27 a enregistré en 2009 une hausse des naturalisations par rapport à 2008. A savoir 776 000 en 2009 pour 699 000 en 2008. Le rapport d’Eurostat, qui avance ces chiffres, s’empresse d’expliquer que c’est dû à une baisse des octrois de citoyenneté britannique, qui était à la traine en 2008 pour des raisons « purement » administratives. Fausse hausse donc.

Le Royaume-Uni s’est d’ailleurs bien rattrapé cette année. Devant la France et l’Allemagne, c’est le Royaume-Uni qui a accordé, en 2009, la nationalité au plus grand nombre de personnes. En ce qui concerne les bénéficiaires, les nouveaux européens sont majoritairement d’origine africaine, soit 29% du nombre total des nationalités obtenues.

Ces octrois n’ont pas uniquement bénéficié aux citoyens hors union européenne, mais également à des ressortissants de pays de l’UE 27, souhaitant avoir la nationalité d’un autre pays de l’Union.

10/6/2011, Rim Battal

Source : Yabiladi

Lorsque l'Allemagne a annoncé l'arrêt de son programme nucléaire quelques semaines à peine après la catastrophe de Fukushima, le gouvernement français a été prompt à dénoncer une décision "politique", prise "sous la pression des événements" et sans considération pour les enjeux de long terme que sont la compétitivité et la réduction des émissions de CO2. La cause est entendue : la panique est rarement bonne conseillère.

Cette sagesse en matière énergétique contraste avec les à-coups de la politique migratoire menée par ce même gouvernement français et par ses partenaires européens au cours des dernières années. La réforme de la Convention de Shengen, exigée par MM. Fillon et Berlusconi suite à l'arrivée massive de réfugiés tunisiens sur l'île de Lampedusa est un premier exemple de cette gestion "à chaud" de nos flux migratoires. A peine plus ancien, le projet de loi élargissant la déchéance de nationalité juste après l'affaire Liès Hebbadj donne le même sentiment d'empressement.

Certains y voient une expression de la démocratie. Après tout, si les électeurs soutiennent majoritairement ces politiques, la messe est dite. Mais c'est nier le rôle de l'information dans la formation des opinions. Or ce qui frappe le plus dans les débats récents, c'est la pauvreté de l'argumentaire du gouvernement quant à l'efficacité de sa politique "protectrice". Hélas, on n'entend pas davantage les économistes et les démographes sur ces questions.

Dans ce contexte, la publication de nouvelles études sur l'impact économique des migrations apporte une bouffée d'air frais à tout ceux qui tentent de prendre un peu de recul. Celles-ci convergent pour démontrer que si l'immigration est impopulaire, c'est avant tout car les débats portent essentiellement sur son coût et rarement sur ses bénéfices.

Pas question de faire de l'angélisme ici : l'immigration a un coût. Elle a d'abord un coût humain, celui de migrants, arrachés pour bon nombre d'entre eux à leurs familles et qui parfois périssent dans l'accomplissement de leur destin. Elle a aussi un coût social quand leur intégration dans le pays d'accueil est mal préparée et leur contribution à la richesse nationale mal expliquée. Enfin, elle a un coût économique, qui se mesure par un taux de chômage a priori plus élevé que la moyenne nationale et qu'il faut bien payer.

Ce coût est-il correctement estimé ? Il est permis d'en douter. D'abord parce que les statistiques sérieuses manquent. A défaut, les décisions sont prises sur la base de témoignages. Ensuite parce que le peu de chiffres disponibles amalgament souvent migrants et français de deuxième ou troisième génération, dont l'accompagnement ne relève pas de la politique migratoire. Enfin, il y a ce vieux travers humain qui fait qu'on se passionne pour le migrant chômeur ou délinquant, mais qu'on tourne le dos à celui qui, silencieusement, travaille, paie ses impôts et éduque ses enfants.

Le plus important dans cette affaire, comme l'explique l'excellent livre de Ian Goldin, Geoffrey Cameron et Meera Balarajan de l'université d'Oxford, c'est que l'essentiel du coût engendré par les migrants est supporté par un faible nombre de localités (nos banlieues) et de catégories sociales (les moins qualifiés), créant des tensions localement intolérables. A l'inverse, le bénéfice de cet échange est lui diffusé uniformément sur l'ensemble du territoire, ce qui déforme encore plus notre perception des choses. Pour qu'une économie prospère et soit à même de financer ses dépenses sociales, elle a besoin de capital, de travail et d'innovation. Or, tout laisse à penser qu'une politique migratoire plus ouverte et mettant davantage l'accent sur l'intégration favoriserait l'Europe sur au moins deux de ces facteurs.

D'abord, en fournissant les jambes et les bras qui nous feront cruellement défaut lorsque nos baby-boomers auront déserté les entreprises et les usines pour les tables de bridge et d'opération. Ensuite, en bousculant nos habitudes et en stimulant la création. Rappelons ici qu'un quart des demandes de brevets internationaux déposés aux Etats-Unis le sont par des migrants de première génération alors que ces derniers ne représentent que 12 % de la population. Des entreprises telles que Google, Intel, Paypal, eBay et Yahoo ont été créées par des migrants de première génération. Enfin, la main d'œuvre moins qualifiée nous sera tout aussi utile pour développer les services à la personne, dont le potentiel économique est significatif, tout comme leur impact sur notre qualité de vie.

Sur la base des chiffres disponibles, on ne peut pas exclure qu'il existe une corrélation positive entre immigration et niveau de compétitivité ; mais notre connaissance des faits est encore trop fragile et d'autres travaux nous permettront d'affiner cette observation. En tout état de cause, si notre pays part du postulat inverse pour fonder sa politique économique et sociale, il est permis de s'inquiéter pour son avenir.

10.06.11, Arnaud Vaganay

Source : Le Monde

Un demi-siècle après la décolonisation, dont l'une des conséquences a été l'installation permanente en France de ressortissants venus de l'ex-empire et l'adoption par ceux-ci de la nationalité française, force est de constater que la récente polémique autour de la présence de binationaux au sein de l'équipe de France de football emprunte encore ses termes à des logiques de domination.

Peu chaut, en effet, à nos dirigeants que des Français possèdent la nationalité norvégienne, comme c'est le cas d'Eva Joly, candidate potentielle à l'élection présidentielle de 2012, et qui, si elle venait à être élue, disposerait du feu nucléaire. Mais l'admettrait-on d'un Franco-Algérien ? Le doute est permis, car c'est bien la binationalité d'anciens ressortissants de l'empire qui alimente un imaginaire dont on peut douter qu'il soit lui-même décolonisé.

La France, toutes sensibilités politiques confondues, ne parvient pas en effet à admettre son caractère fondamentalement postcolonial. Ainsi, après avoir longtemps magnifié notre empire, nous sommes entrés dans une phase d'amnésie, voire de déni, qui nous interdit de penser les conséquences de sa perte. Il est donc indispensable de s'interroger sur la manière dont pèsent aujourd'hui encore dans la société française les anciens rapports coloniaux.

C'est le cas pour les nouvelles formes de binationalité, qui font sens, tant sur le plan historique que sur celui de la proximité entre la société française et les sociétés anciennement colonisées. Certes, on ne dispose d'aucune statistique - du fait de la censure exercée par la législation française -, mais les données ne manquent pas qui mettent en lumière comment, dans l'espace public français, le lien colonial s'est reformulé d'une façon insolite.

Entre la politique de mise en place d'une barrière de sécurité, destinée à contenir l'immigration clandestine, et les mesures en faveur d'une "immigration choisie", le phénomène de la binationalité est-il en passe de devenir une sorte de code destiné à réguler les relations entre l'ancienne métropole et les sociétés autrefois dominées ? Voilà toute la question.

La décolonisation a, en effet, au milieu du XXe siècle, conduit à l'émergence de nouveaux Etats impliquant la reconnaissance de nouvelles territorialités et de nouvelles nationalités. Or, en l'espace de moins d'un demi-siècle, l'Etat-nation, tel que les traditions européennes l'ont produit, s'est trouvé confronté à des processus des identités de plus en plus détachées des territoires. La binationalité est l'un des marqueurs.

Les mobilités qui conduisent des flux migratoires vers la France (élites qualifiées, sans-papiers) peuvent donc tout à fait être attribuées aux soubresauts des nouveaux Etats indépendants. Une de leurs causes les plus déterminantes tient à l'échec de ces Etats-nations à construire et à conforter leur lien national. Les nouvelles modalités de la migration constituent autant de signes de la complexité de l'entreprise qui consiste à chercher à construire des identités sociales et nationales postcoloniales, à l'heure où le lien entre peuple, territoire et souveraineté légitime est en plein bouleversement du fait de la mondialisation.

Porteurs de nouvelles solidarités dépassant les frontières, les nouveaux acteurs de la migration procèdent de fait à des constructions identitaires qui outrepassent, transgressent, transcendent le cadre national et s'inscrivent dans un espace multipolaire. Un espace qui préfigure un ordre du monde où l'Etat-nation en viendrait à être remplacé par d'autres formes d'allégeance et d'identité.

En ce sens, ce que la binationalité souligne, c'est le caractère désormais mobile des appartenances et des identités. Le territoire, qui était l'un des socles de la construction des identités des acteurs collectifs et individuels, est devenu fluide, et l'Etat-nation est aspiré par une mondialisation qui ne sacralise plus les frontières. Pour le philosophe Paul Virillo, la "fin de la géographie" signe la désuétude de la notion de frontière géophysique : "Ailleurs commence ici et vice versa."

Stigmatisation des politiques de régularisation des sans-papiers, expulsions massives, tentation d'une politique de quotas et maintenant remise en cause du droit de vote des binationaux apparaissent ainsi comme autant de mesures de rétorsion, en particulier à l'encontre des flux migratoires en provenance de l'ex-empire.

De telles stratégies minimisent indûment les apports, pourtant de plus en plus visibles en France, de l'immigration, toutes origines confondues. Seule l'intégration de l'épisode colonial dans les représentations collectives françaises fragilisées par la mondialisation permettrait de repenser la question de l'altérité, et, par là, celle de la construction nationale dans le cadre d'une République qui serait à même de reconnaître une forme de "diversité" de la société française susceptible de faire échapper les populations issues de l'empire à un statut d'éternelle infériorité. Il faut pour cela conjurer la hantise du communautarisme et d'un délitement du lien national. En toute hypothèse, l'infléchissement de ce lien s'impose dans le cadre de la construction européenne ; mais pas seulement dans cette perspective.

L'un des points sur lequel porte cet infléchissement est la place faite aux binationaux, ces Français singuliers tout à la fois porteurs de composantes identitaires françaises assumées et du poids de la mémoire coloniale. Le monde contemporain postnational, qui est aussi un monde postcolonial, impose ainsi que l'on repense les relations entre nationalité et territorialité.

La binationalité, tout en s'inscrivant dans le champ plus large des phénomènes migratoires, des identités collectives et des mobilités individuelles observées de par le monde, ne peut en effet s'entendre sans que l'on fasse référence au fait colonial.

Celle-ci, malgré les prudentes dénégations des Etats, reste porteuse d'effets de sens différés de l'époque coloniale. Nombre de signaux l'attestent. La revendication d'une filiation algérienne s'est ainsi donné libre cours à l'occasion du match France-Algérie du 6 octobre 2001, qui a vu de jeunes Français d'origine algérienne siffler La Marseillaise et brandir des drapeaux algériens au nom d'une "algérianité" controversée dans l'espace public français. Plus près de nous, on peut rappeler la violence des polémiques suscitées par la projection, lors du Festival de Cannes de 2010, du film Hors-la-loi, réalisé par Rachid Bouchareb, un Franco-Algérien, et dont les acteurs principaux étaient soit franco-marocains (Jamel Debbouze et Roschdy Zem), soit franco-tunisien comme Sami Bouajila. Leur tort ? Avoir voulu présenter un autre regard sur la guerre d'indépendance algérienne.

Ainsi, chaque événement lié à notre passé algérien est-il irrémédiablement décliné sur un mode passionnel. Le consensus n'est toujours pas fait autour des tabous de la décolonisation et de la perte de l'Algérie française.

Autant d'occasions manquées qui auraient pu permettre de prendre publiquement acte de la présence, au sein de la société française, de millions de Français issus des ex-colonies, et d'achever par cette unique voie le deuil de l'empire ainsi que la réconciliation des Français, d'où qu'ils viennent, autour de valeurs communes fondatrices d'une identité nouvelle et enrichie.

Il convient, à cet égard, de rappeler que, durant ses cent trente-deux ans de présence en Algérie, la France n'a jamais accepté d'octroyer la nationalité pleine et entière aux musulmans qui vivaient dans ses départements d'outre-Méditerranée. Or, depuis les accords d'Evian de 1962, qui mettent fin à la guerre d'Algérie, nos concitoyens issus de ce joyau de l'empire ont la latitude de jouir des mêmes droits que n'importe quel autre Français.

Aussi convient-il de cesser de poser la question de la place de l'islam dans les termes où elle l'est le plus souvent comme de la compatibilité de ses expressions avec les valeurs de la République. Au-delà d'une confusion dangereuse entre enjeux de politique internationale et intérieure, il y a là une réminiscence du passé colonial, notamment algérien, qui pourrait se révéler funeste pour notre cohésion nationale.

Quelles que soient les réponses apportées à ces questions, on ne pourra faire l'économie d'une réflexion sur les nouvelles modalités d'un "vivre-ensemble" qui donne toute sa place aux expressions publiques de la "diversité" de notre société assortie d'une notion de citoyenneté qui aura su prendre ses distances avec les valeurs de l'Etat-nation tel que nous l'avons hérité du XIXe siècle.

12.06.11, Séverine Labat

Source : Le Monde

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