Acteur incontournable de la scène plastique et culturelle marocaine, Fouad Bellamine s’est d’emblée demandé pourquoi dans nos rapports avec les arts au Maroc le quantitatif l’emporte sur le qualitatif. Une question qui ne peut être abordée « sans parler d’enseignement, de formation et notamment des cursus des écoles des beaux-arts » ou sans parler des « maisons de culture, ces beaux édifices dans les différents coins du pays qui sont toujours fermés ».
Certes, « on ne fabrique pas un artiste dans une école », explique-t-il mais « nous avons un artisanat qui est riche, une culture qui est riche, nous pouvons former des techniciens, des ingénieurs et des architectes qui s’en inspirent » si on développe leur fibre artistique et créative par des programmes éducatifs qui s’y intéressent.
Parlant des métiers artistiques, Fouad Bellamine estime que « dans le monde culturel, nous continuons à fonctionner comme un monsieur qui a acheté un terrain et qui veut faire l’architecture lui-même ». Il voudrait que des spécialités techniques comme « le décor, les costumes ou l’éclairage au théâtre soient professionnalisées par des programmes qui les rendraient apte à la dimension internationale ».
Pour sa part, Driss Khrouz soutient que « la culture n’est pas toujours vertueuse car elle peut aussi occulter le mensonge et l’hypocrisie » et que l’art « se donne la mission de changer le monde, mais peut le changer vers le pire, ou vers quelque chose de merveilleux, l’interconnexion des savoirs ».
La culture c’est surtout ce qui permet à l'individu d’être libre au niveau de sa conscience, mais une fois inscrite dans un pouvoir, elle suppose des liens et une connaissance profonde de son environnement, car « l’art et la créativité ne sont pas un état de la nature, ce sont un état de la culture et de la connaissance ». Pour cela, la culture doit se prêter à l’exercice de la problématisation et de la complexité, tel que pensé par le sociologue Edgar Morin. « Cette complexité ne se réduit ni à la science ni à la philosophie, elle constitue une forme de communication entre les deux ».
Pour Driss Khrouz, il n’y a pas d’art dégagé ou pur : « l’art vaut par les capacités ou par les moyens qu’il utilise pour s’inscrire dans son milieu », il n’y a donc art que dans la collectivité car « vus du ciel on est tous une famille ».
Pour s’inscrire dans cette pensée, il faut comprendre qu’« on ne passe vers la créativité que quand on règle le problème de l’utilitaire car l’art ne peut pas être un métier mais une forme d'expression. Pour ce faire il faudra libérer les esprits : « l’école et l’université n’ont pas la mission de créer des employés pour des fonctions déterminées, elles créent une connaissance, une intelligence collective ».
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