Ce film attachant montre l’émigration à travers trois jeunes Sénégalais découvrant Turin, New York et Dakar.
Sophie a quitté Dakar pour retrouver son mari Abdoulaye, dont elle est sans nouvelles. Elle débarque à Turin où une belle Sénégalaise lui explique qu’il est parti sur un chantier. Sophie décide d’attendre son retour. Elle ignore qu’Abdoulaye vit depuis peu aux États-Unis, où il espère de meilleurs revenus. Mais il n’obtient qu’un emploi payé 200 dollars par mois. Comment vivre avec une si petite somme ? Sa seule planche de salut serait un oncle de Sophie, mais il hésite à lui demander son soutien.
En même temps arrive à Dakar Thierno, 19 ans, qui a grandi à New York, venu assister à l’enterrement de son père au Sénégal où il n’a jamais mis les pieds. Ses parents se sont séparés quand il était enfant et sa mère, qui l’accompagne pour les obsèques, a toujours refusé de le laisser voyager seul. Pour les jeunes de son âge, il incarne un idéal, celui de l’émigré qui a réussi en Amérique.
Un entrelacs de découvertes et de désillusions
Trois jeunes Sénégalais, trois trajectoires, trois pays. Pour son premier long métrage, Dyana Gaye explore les figures de l’exil et le statut de l’étranger par ce triangle de personnages, qui se succèdent dans les mêmes lieux mais ne se rencontrent pas.
Avec Sophie, la plus touchante dans sa détresse, elle montre l’arrivée d’un migrant ignorant la langue du pays, mais aussi la liberté qu’offrent à une femme la mise à distance de la famille et des traditions. Résolue à ne rien faire d’autre qu’attendre son époux, la jeune femme se laisse convaincre par une assistante sociale d’entreprendre des démarches pour obtenir des papiers et un travail. De son côté, Abdoulaye se demande s’il a fait le bon choix et demeure comme fermé à la ville autour de lui.
Plus encore qu’un pays et une culture d’origine, Thierno découvre sa famille : des oncles et tantes qui parfois critiquent sa mère, des demi-frères et sœur dont il ignorait l’existence.
La réalisatrice laisse chaque ville imposer son cadre, sa lumière et son tempo. Le récit se tisse dans l’entrelacs de leurs découvertes et de leurs désillusions. « Une étoile paraît seule si on se concentre sur elle, mais elles sont un nombre infini », lance l’assistante sociale qui épaule Sophie à Turin, tandis que Melody Gardot chante : « Dites-moi, étoiles, de qui obtenez-vous la lumière ? »
28/1/2014 CORINNE RENOU-NATIVEL
Source : La Croix