L’accès à la formation et au marché du travail sera facilité. En échange, la pression augmente sur les demandeurs d’asile.
Cela faisait longtemps qu’on n’avait pas vu Angela Merkel, Sigmar Gabriel et Horst Seehofer, sur la même photo, le sourire aux lèvres. Jeudi 14 avril, les leaders des trois partis qui forment la coalition gouvernementale sont apparus satisfaits devant la presse, pour présenter leur future loi sur l’intégration des migrants. Il leur a fallu plusieurs semaines de débats et sept heures de négociations finales pour trouver un accord sur le sujet.
La chancelière Angela Merkel, présidente de l’Union chrétienne-démocrate (CDU), a qualifié cet accord de « première » dans l’histoire du pays. Le vice-chancelier Sigmar Gabriel, social-démocrate (SPD), parle de texte « historique ». Même le très critique Horst Seehofer, de l’Union chrétienne-sociale (CSU), juge qu’il « existe aujourd’hui une chance que l’intégration réussisse ».
La future loi d’intégration se base sur deux principes : encourager les demandeurs d’asile à s’intégrer et exiger des efforts de leur part. Cela implique que les prestations de l’État seront réduites si la personne ne coopère pas. Le gouvernement prévoit tout d’abord de rendre obligatoire les cours d’intégration.
Un dispositif pour faciliter l’emploi des réfugiés
Les personnes refusant d’apprendre la langue pourront se voir annuler leur permis de séjour. De même, celles qui trouvent une formation obtiendront un permis de séjour de la durée de leurs études mais le perdront si elles abandonnent leur formation. L’accès au marché du travail se voit par ailleurs facilité. Les demandeurs d’asile pourront désormais travailler en tant qu’intérimaires.
Fini aussi la durée de trois ans durant laquelle ils se voient actuellement refuser des postes auxquels peuvent prétendre des citoyens allemands et des ressortissants de l’Union européenne. Berlin souhaite aussi financer 100 000 « opportunités de travail », des jobs payés un euro de l’heure. Actuellement, ce dispositif vise à réintégrer des chômeurs de longue durée.
Enfin, les demandeurs d’asile seront contraints de résider dans des lieux déterminés par les autorités. Le but est d’éviter la formation de ghettos dans les grandes villes et de repeupler certaines communes où, à défaut de travail, se trouvent des logements vacants.
Éviter une « explosion sociale »
Cette mesure est l’une des plus polémiques. Herbert Brücker, économiste à l’Institut de recherche pour le marché du travail et les professions (IAB) prône davantage de mobilité afin que les migrants trouvent un emploi. Günter Burkhardt, président de l’association Pro Asyl, constate « un manque d’offre d’intégration de la part du gouvernement et non un manque de volonté d’intégration de la part des migrants ».
Le Conseil central des musulmans pose, lui, la question des moyens financiers afin que tous les demandeurs d’asile apprennent l’allemand. La coalition gouvernementale n’a pas évoqué le budget nécessaire à la mise en œuvre de cette loi mais certains parlent de 10 milliards d’euros.
Le quotidien conservateur Die Welt estime de son côté que le texte « calmera les mouvements populistes ». L’hebdomadaire social-démocrate Die Zeit juge lui aussi que cette loi « évitera une explosion sociale dont de nombreux citoyens allemands ont si peur », alors que le pays a accueilli un million de demandeurs d’asile l’an dernier.
Die Zeit estime toutefois que l’Allemagne a besoin de beaucoup plus qu’une simple loi d’intégration. Il appelle de ses vœux une loi générale sur l’immigration.
17/04/2016, Delphine Nerbollier, à Berlin
Source : la-croix.com