vendredi 29 novembre 2024 02:54

En Libye, les étrangers sont de retour et de nouveau maltraités

La Libye attire nombre de migrants, qui représentaient un quart de la population avant la chute du colonel Kadhafi.

Dans un rapport rendu public jeudi 11 octobre, la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH) dénonce la « criminalisation généralisée des migrants ».

« C’était difficile avant la guerre, terrible pendant la guerre, mais c’est pire maintenant. » Voilà le diagnostic que porte un Nigérian sur la situation des migrants en Libye dans un rapport intitulé « Libye. En finir avec la traque des migrants », rendu public jeudi 11 octobre par la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH). Lui-même travaillait depuis cinq ans dans ce pays, jusqu’au jour où, il y a cinq mois, il a été arrêté par une milice. Depuis, il croupit dans l’un des nombreux centres d’enfermement pour migrants gérés par les katibas, les milices d’ex-rebelles qui font régner l’ordre, armées de kalachnikovs.des conditions de détention inhumaines

À l’issue d’une mission d’enquête menée en Libye en juin dernier par la FIDH, Justice sans frontières et le collectif d’associations de Migreurop, les rapporteurs dressent un tableau accablant de la situation de milliers de migrants subsahariens détenus arbitrairement dans des camps d’enfermement pour quelques semaines ou de longs mois depuis le printemps 2011.

La délégation a pu localiser 14 de ces camps, et en visiter cinq d’entre eux, autour de Tripoli et Benghazi et surtout dans le désert du sud du pays sur les routes en provenance du Niger et du Tchad. Les droits humains élémentaires y sont systématiquement bafoués : arrestations arbitraires au « faciès » des migrants, qu’ils soient installés depuis plusieurs années en Libye ou fraîchement venus du Sud, conditions de détention inhumaines, violences, tortures psychologiques, etc.

Les « premiers signes de gangstérisation »

Des milices autoproclamées « bouclier du désert » assurent le contrôle des frontières du sud du pays. L’un des dirigeants de la katiba « Libye libre » a affirmé vouloir « nettoyer » le pays des étrangers qui apportent crimes, maladies et mauvaises mœurs.

La délégation sur place a vu les « premiers signes de gangstérisation » de ces milices qui agissent en toute impunité, dépouillent les migrants, organisent du travail forcé à la rémunération aléatoire ou détournée.

Le rapport n’hésite pas à parler de « criminalisation généralisée des migrants, abandonnés au contrôle arbitraire des milices armées », qui prospèrent d’autant plus que la Libye a un lourd héritage de racisme longtemps instrumentalisé par le colonel Kadhafi.

L’espoir de trouver du travail dans l’eldorado libyen

Le phénomène alerte d’autant plus les ONG des droits de l’homme que l’espoir de trouver du travail dans l’eldorado libyen attire nombre de migrants. Ces derniers représentaient environ un quart de la population avant la chute du colonel Kadhafi, il y a bientôt un an.

Avec toute la réserve qu’il convient d’apporter aux chiffres dans un tel contexte, environ 1 500 migrants franchiraient chaque jour les frontières du sud. Dans le même temps, nombre de migrants cherchent à fuir au péril de leur vie une Libye de plus en plus inhospitalière.

Le rapport formule une série de recommandations à l’adresse des autorités libyennes pour mettre fin à ces graves violations des droits de l’homme, mais aussi à l’Union européenne et à ses États membres qui, selon les ONG, sont focalisés sur le contrôle des flux migratoires et refoulent des migrants sur la rive sud de la Méditerranée, sans se soucier du respect des droits humains.

11/10/2012, MARIE VERDIER

Source : La Croix

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