mardi 26 novembre 2024 19:37

Etrangers : souvent, Sarkozy varie

Que reste-il du Sarkozy 2007 en matière de politique d’immigration ? Presque rien. Si ce n’est un bilan sujet à caution. Le Sarkozy 2012 a décidé de faire table rase de son passé. Et de renier ses engagements et convictions. Pour de purs motifs électoraux : partir à la chasse des voix d’un Front national toujours élevé dans les sondages. Le Sarkozy 2007 était pour le droit de vote des étrangers non communautaires aux municipales, le Président candidat est contre.

Même volte-face quand Claude Guéant, son ministre de l’Intérieur, a annoncé jeudi vouloir faire adopter dans les prochains mois une loi qui permettrait de priver de titre de séjour un étranger qui se rendrait coupable d’un délit grave, dès lors qu’il vit en France «depuis peu de temps» et «qu’il n’a pas d’attache familiale». Ce qui revient à rétablir le retour de la double peine, que le Sarkozy ministre de l’Intérieur avait réformée en 2003. A ce tableau, on peut ajouter que les ambitions sarkozystes en matière de discrimination positive sont devenues lettre morte. Que le gouvernement est passé de la lutte contre l’immigration irrégulière à celle de la réduction de l’immigration régulière. Et que la parole d’un Guéant s’exprimant sur l’islam a le bruit et l’odeur de celle d’une Marine Le Pen.

Rétropédalage. Autre tête-à-queue pour l’accueil des étudiants étrangers. Dans le cadre de sa politique d’immigration choisie, le Président du début de quinquennat en avait fait un objectif prioritaire en matière d’attractivité. Mais, en mai, il laisse Guéant publier une circulaire qui restreint les conditions de recrutement de ces étudiants. «Il fallait prendre acte que la crise a changé la donne du marché de l’emploi», justifie aujourd’hui Brice Hortefeux, vice-président de l’UMP et fidèle du chef de l’Etat. Devant la mobilisation, l’Elysée a exigé de Guéant qu’il revoie légèrement sa copie. Vendredi, il était à l’Elysée pour ajuster le rétropédalage. Et donner rendez-vous aux présidents d’université en janvier pour «lever les malentendus».

Ces trois reniements se font avec la bénédiction silencieuse de l’Elysée. Car, depuis l’été 2010 et le discours de Grenoble, le chef de l’Etat ne s’est quasiment plus exprimé sur ces sujets d’immigration. Tout à sa représidentialisation, il a été convaincu par ses conseillers de s’en tenir à l’écart. Depuis, il avance masqué, avec Guéant en porte-voix.

«Job». Etrangement, personne au gouvernement, y compris parmi les ministres de la droite modérée, ne semble s’émouvoir de cette droitisation du discours et des pratiques. Sur le dossier des étudiants étrangers, seuls Laurent Wauquiez et Frédéric Mitterrand ont osé prendre leurs distances publiquement. Sinon, c’est le même cynisme. Guéant ? «Il fait le job, confie un ministre, pas parmi les plus droitiers. Il occupe le terrain. Ça marche bien.» Sous-entendu, il parle aux électeurs de Le Pen. «On ne peut pas à la fois s’insurger contre la montée du FN et dénoncer un discours qui cherche à faire revenir des électeurs vers un parti plus républicain», justifie Brice Hortefeux.

Pendant ce temps-là, Sarkozy se tait. «C’est normal, il n’est pas encore candidat. Quand il le sera, il dira les choses fortement», assure le député (UMP) Franck Riester. A l’UMP, on est convaincu qu’il rependra à son compte la politique de baisse de l’immigration légale de Guéant. «Mais, en matière d’étudiants étrangers, il prendra un peu de distance avec lui», confie un député. Histoire de tenter de sauver le peu qu’il reste du Sarkozy de 2007.

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Source :  le Monde

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