mercredi 27 novembre 2024 05:46

Immigration: crèches sauvages pour les enfants de clandestins à Tel-Aviv

Leur sort a ému jusqu'à Hollywood, qui a décerné cette année l'Oscar du meilleur court métrage documentaire à "Strangers, No More" (Nous ne sommes plus des étrangers), un film sur une école accueillant les enfants d'immigrés dans un quartier pauvre de Tel-Aviv.

Parmi les 220.000 travailleurs étrangers installés en Israël, 100.000 sont en situation illégale, sans visas ni permis de travail.

Sous la menace permanente d'une expulsion, les parents s'organisent tant bien que mal pour la garde de leurs enfants afin d'aller gagner leur vie.

Okpara, une Nigériane de 36 ans, a pris en charge 11 bambins dans un petit appartement bondé, transformé en crèche sauvage, dans le sud de Tel-Aviv.

Elle-même est entrée illégalement en Israël via la frontière égyptienne il y a deux ans alors qu'elle était enceinte, en espérant un meilleur avenir pour son bébé.

Elle prend 400 shekels (80 euros) par mois --un revenu indispensable même s'il permet à peine de régler les factures-- pour s'occuper des enfants d'immigrés dans la même situation qu'elle.

Elle ne paye pas de taxes, n'est supervisée par personne et vit dans la constante angoisse d'être expulsée.

"C'est un endroit minuscule. Je ne peux offrir que ce que mes moyens me permettent", reconnaît Okpara.

Pourtant, la municipalité et les ONG locales estiment qu'il est possible de rendre vivables ces "crèches-pirates".

Mesila, une association qui aide les travailleurs étrangers en Israël, offre des formations et des fonds pour la rénovation et l'équipement des locaux.

Avec une équipe de 10 travailleurs sociaux et un budget annuel de deux millions de shekels (400.000 euros), dont 20% versés par la municipalité, Mesila espère améliorer les conditions de vie des enfants.

"Ce n'est pas de leur faute s'il sont nés clandestins, il faut les traiter comme des êtres humains", plaide la directrice de l'ONG, Tamar Schwartz.

Tout près de chez Okpara, Mesila a réhabilité une crèche gérée par Ruby Austria, 37 ans, originaire des Philippines et arrivée en Israël en 1996.

Mesila a lui fourni un enseignant pendant deux ans et a investi 12.500 euros dans la rénovation, donnant des tables, des chaises et des jouets. Depuis, l'inscription a été fixée à 100 euros par mois et par enfant, nourriture comprise.

Le contraste avec l'appartement d'Okpara saute aux yeux. Dans la crèche de Ruby, une quinzaine d'enfants sont assis confortablement autour de tables basses et récitent leur alphabet au rythme d'un tambour.

"Nous leur donnons le meilleur de nous-mêmes. Sinon, quand ils grandiront, ils deviendront des enfants à problèmes", explique Ruby.

Mais, de l'aveu même de Shlomo Maslawi, un membre du conseil municipal de Tel-Aviv, la garderie de Ruby Austria est une exception parmi la cinquantaine de crèches sauvages de la ville.

"Ces établissements parascolaires sont des prisons", déplore-t-il.

Selon lui, "la ville doit trouver un budget pour créer un solide réseau de crèches dans la région de Tel Aviv", où il n'y a pas d'établissement public de ce genre pour les enfants étrangers. Et les frais de scolarité du privé sont exorbitants.

Aujourd'hui, les autorités israéliennes travaillent avec Mesila pour procéder à la fermeture des crèches considérées comme dangereuses pour les enfants.

Pendant ce temps, les menaces d'expulsion se précisent, alors que le gouvernement de Benjamin Netanayahu a fait de la lutte contre l'immigration illégale un de ses chevaux de bataille.

L'an dernier, le ministère de l'Intérieur a annoncé que les enfants des clandestins pourraient obtenir un permis de séjour permanent s'ils ont vécu plus de cinq ans en Israël et parlent hébreu.

Cette mesure concerne environ 800 enfants mais les autres mineurs qui n'entrent pas dans les catégories fixées sont expulsables à tout moment. Les procédures ont commencé au début de l'année.

"Ils sont expulsables. En tant qu'enseignant, cela me fait vraiment mal", explique Ruby Austria, en désignant un groupe de jeunes enfants se reposant sur des couvertures.

13/6/2011, Daniella CHESLOW

Source : AFP

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