En maintenant l'immigration au ministère de l'Intérieur, le gouvernement de Jean-Marc Ayrault contredit les engagements de François Hollande et signe la poursuite d'une politique répressive dans ce domaine, estiment associations et experts.
"Le rattachement de l'immigration à l'Intérieur relève d'une politique du +tout répressif+", qui "a induit un malaise chez les policiers appelés à faire des reconduites à la frontière pour obtenir des chiffres", analyse l'historien de l'immigration Patrick Weil.
Durant son quinquennat, l'ex-président Nicolas Sarkozy a conduit une politique de maîtrise des flux qui s'est traduite par plus de 100.000 expulsions. Il s'était fixé un objectif de 40.000 pour 2012 s'il était été réélu.
"Ce qui est regrettable, c'est que Manuel Valls approuve un hold-up réalisé par Brice Hortefeux et Claude Guéant" après la suppression du ministère l'Immigration, de l'Intégration, de l'Identité nationale et du Développement solidaire" créé en 2007 par M. Sarkozy, estime de son côté le juriste Serge Slama.
Ce ministère, fortement critiqué pour avoir associé "immigration" et "identité nationale", disparaîtra lors d'un remaniement en novembre 2010 et verra ses attributions absorbées par Beauvau où venait d'être nommé Brice Hortefeux remplacé en février 2011 par Claude Guéant.
Outre la gestion des flux migratoires, l'Intérieur prenait alors le contrôle de l'asile, des naturalisations, et de l'intégration dévolues auparavant aux ministères des Affaires étrangères, de la Justice et des Affaires sociales.
"Il n'y a pas de politique d'immigration"
Pour M. Slama, le "vrai problème c'est qu'il n'y pas de politique d'immigration" depuis l'élection de M. Hollande. "Ni Hollande, ni Valls n'ont défini cette politique" alors que Sarkozy, "en avait une même si elle n'était pas cohérente".
L'expert en veut pour preuve le placement de 25 enfants en rétention depuis l'élection de M. Hollande alors qu'il s'était engagé à mettre fin à cette pratique dès le mois de mai. "Une instruction y suffirait", selon M. Slama. Le Défenseur des droits, Dominique Baudis, reçu lundi à l'Elysée, a rappelé plusieurs fois ces dernières semaines que les enfants d'immigrés clandestins ne devaient pas être placés dans des centres de rétention administrative (CRA).
Pour M. Weil, le maintien de l'immigration dans le giron de l'Intérieur est "contradictoire avec les engagements de M. Hollande" et "augure mal de la réalisation de ces engagements et du programme du Parti socialiste".
Selon lui, c'est à Matignon de jouer un "rôle de coordination" en matière d'immigration professionnelle qui doit être définie lors d'un débat annuel au Parlement comme M. Hollande s'y était engagé et les naturalisations et l'asile devraient relever du ministère de la Justice.
Le Réseau éducation sans frontières (RESF) a dénoncé "la poursuite assumée de la politique sarkozyste en matière d'immigration" après l'expulsion d'un père de famille macédonien.
La politique d'immigration du nouveau pouvoir s'inscrit "dans la continuité" de celle de M. Sarkozy pourtant combattue par le PS lorsqu'il était dans l'opposition, dénonce France Terre d'Asile (FTA).
"Le nouveau pouvoir semble donc avoir choisi d'ignorer l'appel des 50 organisations, syndicats et personnalités qui ont d'une seule voix demandé au président de la République de sortir du modèle de gouvernance +sarkozyste+ en matière de migrations", analyse FTA qui avait espéré ce changement jusqu'à la nomination du gouvernement Ayrault 2 la semaine dernière.
"Il n'y a là aucun signe encourageant pour la société civile et les défenseurs des droits de l'Homme. Un changement nous avait été promis mais les premières notes jouées par le nouveau gouvernement sont hélas issues d'un répertoire qui n'a suscité jusqu'alors que rejet", déplore l'association.
26/06/2012
Source : 20 minutes.fe/ AFP
Immigration: les associations déçues
Publié dans Médias et migration
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