vendredi 29 novembre 2024 09:28

Immigration: les Européens dans l'impasse politique après le rejet par l'ONU de leur solution militaire

L'option militaire proposée par l'Union européenne (UE) en vue de faire face à l'immigration clandestine a été rejetée par l'ONU, mettant les dirigeants européens dans une impasse politique en l'absence d'une véritable solidarité européenne et d'une volonté politique commune.

Les récents naufrages en Méditerranée ont suscité l'empathie de la communauté internationale et relancé le débat sur la politique migratoire au sein de l'Union européenne, mais au lieu d'apporter une solution pour conjurer ces drames, les membres de l'UE se déchaînent et proposent une solution "radicale" pour contourner le phénomène. Il s'agit d'une opération militaire à la tragédie rejetée par la suite par l'ONU et qui n'a pas manqué de provoquer l'ire des ONG.

Des associations humanitaires ont appelé l'Europe à lancer des opérations de sauvetage "de grande envergure" et à réviser ses politiques d'immigration et d'asile, après les naufrages "atroces" en Méditerranée dont un pourrait avoir causé la mort de plus de 700 migrants.

Pour Olivier Clochard, le président de Migreurop, réseau européen et africain d'observatoire des frontières, le dilemme est moral: "L'UE a obligation de mettre en place ce dispositif si elle ne veut pas être considérée comme coresponsable de ces drames".

Un responsable de cette ONG déplore aussi que l'UE ait "bloqué tous les accès terrestres" et que, "à cause de ces fermetures, les personnes n'ont comme solution que de se mettre dans la main de trafiquants", affirme-t-il, en plaidant aussi pour une délivrance plus aisée des visas.

"Ce qui se passe actuellement est atroce, et nous nous attendons à une année difficile", avertit Michel Morzière, porte-parole du collectif Urgence solidarité Syrie.

Sommet européen, la montagne qui acouche d'une souris

Jeudi 23 avril, les dirigeants européens réunis en sommet extraordinaire à Bruxelles, avaient proposé une opération militaire en Méditerranée afin de décourager les trafiquants, qui devrait notamment s'attaquer aux embarcations, en les capturant puis les détruisant avant qu'elles ne soient utilisées par les trafiquants (passeurs).

L'Union européenne s'était dit prête à mener des actions armées contre les passeurs installés à quelques km de la Libye. Mais , le secrétaire général des Nations unies (ONU), Ban Ki-moon, lui, souhaite une "approche globale qui prenne en compte les racines du problème, la sécurité et les droits humains des migrants et des réfugiés, comme avoir des canaux légaux et réguliers d'immigration". Résultat: il coupe court à cette "radicale" proposition, à savoir, le recours à la force dans la tragédie des migrants en Méditerranée.

"Il n'y a pas de solution militaire à la tragédie qui est en train de se produire en Méditerranée", a précisé M. Ban disant préférer un encouragement à l'immigration légale comme solution globale.

Quant aux mesures annoncées récemment à Luxembourg et à Bruxelles, pour M. Ban, "elles sont un premier pas important vers une action collective européenne. C'est l'unique approche qui peut fonctionner pour un problème de cette nature, aussi large et transnational", a expliqué le SG de l'Onu.
La chef de la diplomatie européenne Federica Mogherini, Ban Ki-moon et le Premier ministre italien Matteo Renzi seront ensemble lundi à une sortie symbolique au large de la Sicile.

Cette "halte marine" à bord du navire de la marine San Gusto, permettra aux trois responsables d'évaluer le danger qui guette les candidats à l'immigration et de s'en inspirer pour formuler une autre option pour conjurer ces drames.

Solidarité des pays européens à l'épreuve

La tragédie des migrants ayant ébranlé la communauté internationale ces derniers jours démontrent les limites de la solidarité entre les pays européens surtout lorsqu'il s'agit de l'acceuil des migrants.

La question de l'asile est dirigée par la méfiance et non par le principe de solidarité. L'echec sur lequel ont débouché les discussions sur le volet relatif à la prise en charge des migrants lors du sommet européen en est la preuve.

Le plan d'action initial proposait aux Etats d'accueillir "au moins 5.000 personnes" ayant déjà obtenu le statut de réfugiés. Mais aucun chiffre ne figure dans la déclaration finale "parce que nous pensons que 5.000 n'est pas suffisant", a expliqué la chancelière allemande Angela Merkel.

La participation a ce programme de réinstallation est volontaire, pas obligatoire. La France prendra sa part en accueillant entre 500 et 700 Syriens, selon le président François Hollande.

"J'aurais aimé plus d'ambition", a déploré le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker, partisan de porter ce programme à au moins 10.000 places. Mais la plus méfiante de toute l'Europe reste la Grande Bretagne. Londres offre des navires et des hélicoptères mais il n'est pas question de parler asile.

"Les gens que nous repêcherons ou avec lesquels nous aurons affaire seront emmenés vers le pays sûr le plus proche, le plus probablement l'Italie, et qu'ils ne pourront demander immédiatement l'asile au Royaume-Uni", avait prévenu le premier ministre britannique David Cameron.

Beaucoup de pays se sont dits prêts à aider à l'instar de la Norvège, qui a promis une aide à l'opération de surveillance européenne Triton et au Haut commissariat aux réfugiés des Nations unies (HCR), "mais personne ne peut obliger un état à le faire", a reconnu Matteo Renzi. Le Premier ministre italien, qui avait réclamé la tenue de ce sommet extraordinaire, a tenté de dissimuler sa déception en vain.

Il est question prochainement, à la faveur d'un sommet prévu à Malte entre l'UE et l'Union africaine (UA), d'explorer les voies et moyens pour aider l'Egypte, la Tunisie, ou encore le Soudan, à mieux surveiller et contrôler leurs frontières terrestres et les voies empruntées par les candidats à l'exil.

Mais cela reste insuffisant, de l'avis même de nombreux responsables politiques européens et des ONG. "Il a fallu attendre des drames, et ils se sont multipliés depuis quelques semaines, pour qu'on revienne au dispositif mis en place par l'Italie, à l'échelle de l'Europe. C'est déjà un retour à un peu plus d'engagement de l'Europe, mais on est loin du compte par rapport aux enjeux", a déclaré le porte-parole du gouvernement français, Stéphane Le Foll.

27 avr. 2015

Source : APS

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