samedi 30 novembre 2024 06:27

"Impossible de fermer totalement ses frontières": l'ONU pour plus d'immigrants en Europe

L'Union européenne ne gagnera pas son combat face au trafic d'êtres humains tant qu'elle continuera à se focaliser sur une plus grande sécurisation de ses frontières extérieures, a prédit jeudi le Canadien François Crépeau, rapporteur des Nations Unies pour les droits des immigrants. Les pays de l'UE doivent au contraire reconnaître que l'immigration continuera d'exister et trouver des solutions légales pour autoriser l'entrée dans l'Union, a-t-il poursuivi.

"La politique européenne reste pour l'instant bloquée sur l'aspect défense des frontières. Mais il est impossible de fermer totalement ses frontières. Les immigrants continueront à tenter d'entrer en Europe", a encore indiqué le rapporteur des Nations Unies au terme d'une visite de quatre jours à Bruxelles consacrée à la gestion des frontières de l'Europe. Son rapport définitif est attendu pour juin.

L'arrivée d'immigrés aux portes de l'Europe est un phénomène en augmentation. Les victimes sont nombreuses, essentiellement en Méditerrannée. On estime ainsi que l'an dernier plus de 3000 personnes sont mortes en tentant, souvent à bord d'embarcations de fortune, d'entrer dans l'UE.

Cette obsession européenne a, selon François Crépeau, comme conséquence que les candidats à l'immigration venus de Syrie ou d'Erythrée vont chercher leur salut auprès de trafiquants. "Ce phénomène ne peut exister que lorsqu'on dresse des barrières", a-t-il précisé. "C'est en investissant dans des procédures de contrôle que l'Europe a perdu la gestion de ses frontières extérieures. Celle-ci est désormais aux mains des trafiquants".

"L'Europe ne gagnera pas la bataille de cette façon. C'est devenu un exemple du jeu du chat et de la souris. Si on veut coincer ceux qui vivent de ce trafic, il faut précisément abaisser les barrières et fournir de nouvelles voies légales pour l'immigration. Leur 'secteur d'activité' s'effondrera dès lors".

M. Crépeau plaide donc pour qu'une collaboration s'installe avec des pays tels que les Etats-Unis, le Canada, l'Australie et la Nouvelle-Zélande. "Des accords pourraient par exemple postuler que tous ces pays accueillent dans les 5 ans un million de réfugiés et déterminer leur 'répartition' entre chaque pays d'accueil." Ce chiffre d'un million n'est pas exagéré, selon lui. "Il n'y a pas de perspective d'amélioration en ce moment en Syrie et en Erythrée, ces gens continueront donc d'affluer".

Il est en outre important, selon le rapporteur de l'ONU, d'insister sur le fait que le marché du travail des pays européens a besoin d'immigrants.

L'Europe devra donc investir dans la mobilité. "Actuellement, nous voyons que des Espagnols qui ne trouvent pas d'emploi dans leur pays partent chercher leur bonheur en Grande-Bretagne. Pourquoi ne pourrions-nous pas organiser un système similaire pour les immigrés?"

François Crépeau a cependant reconnu que les choses avaient évolué dans le bon sens en Europe ces dernières années. "Par rapport à ma précédente visite en 2012, j'ai pu remarquer qu'on est plus conscient du problème et qu'on l'appréhende mieux. Je crois que le message a été compris", a conclu le rapporteur de l'ONU.

5 février 2015

Source : rtbf.be

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