mercredi 27 novembre 2024 22:41

La crise aggrave les difficultés d’emploi des enfants d’immigrés

Une étude de France Stratégie relève les difficultés spécifiques et grandissantes des enfants d’immigrés africains, notamment les jeunes garçons, à trouver leur place sur le marché du travail.

Alors que le gouvernement a prévu de réunir vendredi 6 mars un comité interministériel sur l’égalité et la citoyenneté, la dernière étude de France Stratégie (ex-commissariat général à la stratégie et à la prospective – NDLR) jette une lumière crue sur la difficile intégration économique des immigrés et de leurs enfants, notamment pour ceux issus d’Afrique.

Compilant de multiples études et enquêtes menées ces dernières années, l’organisme rattaché à Matignon rappelle un chiffre choc, illustrant l’ampleur du problème : en 2012, le taux de chômage des jeunes de moins de 25 ans culminait ainsi à 42 % chez les descendants d’immigrés africains. Un taux plus de deux fois supérieur à celui des Français nés en France de parents français (22 %).

De plus, assurent les cinq spécialistes auteurs de l’étude, la tendance n’est pas à l’amélioration car « avec la crise, l’insertion dans l’emploi de ces jeunes issus de l’immigration africaine s’est fortement dégradée ».

Des difficultés qui s’accumulent

Cherchant à expliquer cette situation particulière, l’étude de France Stratégie note que de nombreux facteurs sociaux entrent en ligne de compte. Les descendants d’immigrés, notamment ceux venus d’Afrique, grandissent bien plus que la moyenne dans des familles de milieu modeste. Leurs parents sont moins diplômés, occupent des emplois moins rémunérés, sont davantage exposés au chômage et vivent dans des logements moins confortables.

Note de France Stratégie

Autant de facteurs qui ne favorisent pas la réussite scolaire. L’étude met même en avant et les difficultés qui commencent dès la maternelle puis « s’accumulent tout au long de la scolarité ». Ce « long processus de décrochage silencieux » se voit encore aggravé par la concentration des enfants d’immigrés dans certains quartiers et certaines écoles.

Moins de diplôme, des diplômes moins élevés

Avec ces handicaps, le parcours scolaire de ces jeunes est plus souvent marqué par une sortie sans aucun diplôme et bien moins souvent par l’obtention d’un diplôme de niveau universitaire. Ils sont seulement 34 % à y parvenir, soit 8 points de moins que pour les autres jeunes.

Moins diplômés, les jeunes issus de l’émigration ont donc plus de difficulté à s’insérer sur le marché du travail. Et même lorsque ils y parviennent, leur parcours sont souvent plus chaotiques. « Ils sont surexposés à la précarité et à l’instabilité dans l’emploi », relèvent les auteurs. De même, c’est chez les enfants d’immigrés que l’écart est le plus grand entre le diplôme et le poste réellement occupé.

Un écart en partie inexplicable

L’étude note toutefois qu’une partie des difficultés spécifiques des jeunes issus de l’immigration africaine semblent résister à l’analyse à partir de critères objectifs. À milieu social équivalent et niveau scolaire égal, en effet, des inégalités persistent.

Pour France stratégie, une partie de cet écart peut s’expliquer par « une moindre participation aux réseaux d’insertion professionnelle », dans lesquels les parents immigrés seraient moins investis.

Une autre part vient probablement de la concentration des populations immigrées dans certaines villes moins favorisées et pas toujours bien reliés aux endroits où l’emploi est plus abondant.

Une part de discrimination

Pour autant, insiste l’étude, ces facteurs ne suffisent pas à expliquer l’ampleur des différences existantes. Il semble donc bien y avoir une « pénalité ethnique » supplémentaire, notamment pour les jeunes issus de l’immigration africaine, puisqu’« une partie de ces écarts peut en effet être imputée à des comportements discriminatoires à l’encontre de ces populations »

Face à cette situation d’inégalité, France Stratégie préconise de compléter les politiques existantes par « des mesures particulières en direction des quartiers de la politique de la ville d’une part, des descendants d’immigrés de l’autre ».

Ces actions spécifiques, explique Jean Pisani-Ferry, le commissaire général de France Stratégie, pourraient concerner des aides pour l’obtention du permis de conduire ou le renforcement des allégements de charges sur les bas salaires dans certaines zones cumulant les difficultés.

1/3/2015, MATHIEU CASTAGNET

Source : La Croix

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