Le ministre de l'intérieur français, Brice Hortefeux, a soutenu la construction d'une clôture à la frontière gréco-turque, principale porte d'entrée en Europe des immigrants sans papiers, lors d'une visite à Athènes, jeudi 27 janvier. "Les mesures qui sont engagées, dès lors qu'il ne s'agit pas de restaurer le mur de Berlin, vont dans le bon sens et nous les soutenons", a déclaré M. Hortefeux, également chargé de l'immigration, lors d'une conférence de presse avec le ministre de la protection des citoyens, Christos Papoutsis.
Le gouvernement grec a annoncé, au début de l'année, sa volonté de construire une clôture de 12,5 km dans le nord-est de la Turquie, à proximité du fleuve Evros. Selon l'agence européenne Frontex, 200 clandestins par jour tentent de passer la frontière à cet endroit.
L'initiative a suscité l'embarras de Bruxelles. "Les murs ou les grillages sont des mesures à court terme qui ne permettent pas de s'attaquer de manière structurelle à la question de l'immigration clandestine", avait déclaré un porte-parole de la commissaire chargé de la sécurité, Cecilia Malmström. L'Organisation des Nations unies a condamné l'initiative grecque. Depuis, la Bulgarie – qui souhaite entrer dans l'espace Schengen, qui permet la libre circulation de ses membres sur le territoire européen –, a annoncé qu'elle souhaitait à son tour construire une clôture à sa frontière avec la Turquie.
"LE DÉFI EST LE PASSAGE PAR VOIE TERRESTRE"
La Grèce avait alors dénoncé l'"hypocrisie" de certains Etats européens. Brice Hortefeux a été clair : pour lui, la lutte contre l'immigration clandestine "passe par l'action nationale de la Grèce, mais aussi par une très grande solidarité européenne avec le soutien de la France". "Les flux migratoires bougent en fonction des actions et des législations. Aujourd'hui le défi est le passage par voie terrrestre", a expliqué Brice Hortefeux, en rappelant que lors d'une précédente visite en 2008, alors qu'il était ministre de l'immigration, ils empruntaient plutôt "les façades maritimes". Les clandestins entraient alors en Grèce par les îles.
Le ministre des affaires européennes, Laurent Wauquiez, avait apporté son soutien, le 6 janvier, à la politique de lutte contre l'immigration du gouvernement grec, mais sans se prononcer sur "la solution technique" de la clôture.
La visite de M. Hortefeux – entouré d'une poignée de conseillers, dont l'ancien ministre Alain Carignon –, intervient alors que la Grèce et la Belgique viennent d'être condamnée par la Cour européenne des droits de l'homme. La Cour de Strasbourg a condamné la Belgique pour avoir renvoyé un Afghan demandeur d'asile en Grèce, alors qu'elle savait qu'il serait soumis à des "traitements dégradants". Le règlement européen Dublin II prévoit que les demandes d'asiles doivent être examinées par le pays où la personne est entrée dans l'Union européenne. Mais la Grèce ne peut répondre aux demandes.
Plusieurs pays, de l'Allemagne à la Suisse, ont annoncé qu'ils suspendaient les mesures de renvois des demandeurs d'asiles, vers la Grèce, après la décision de la CEDH. Le ministre français a expliqué qu'il était encore en train d'analyser l'arrêt de la Cour du 21 janvier et qu'il donnerait sa réponse "dans les prochains jours".
27/1/2011, Alain Salles
Source : Le Monde/AFP