lundi 25 novembre 2024 15:49

Le marché du halal s'étend, entre convoitise et suspicion

L'offre «tout halal» du Quick de Roubaix est maintenant sous l'œil de la justice. Deux particuliers ont saisi la Halde mardi, jugeant cette confessionalisation des menus carnés contraire à la «laïcité» et à la «neutralité» du commerce. Il s'agit, semble-t-il, d'une saisine de principe, puisqu'ils n'habitent pas la commune. Le maire socialiste de Roubaix, René Vandierendonck, a, lui, déposé plainte pour «discrimination» jeudi dernier contre l'enseigne Quick, dont huit restaurants en France expérimentent des hamburgers garnis de viande de bœuf venant de bêtes abattues selon le rite halal et où la dinde fumée a remplacé le bacon. Le parquet de Lille a ouvert une enquête préliminaire pour vérifier les conditions d'affichage, le service proposé aux clients et auditionner les protagonistes. Mais la discrimination pourrait être difficile à établir. Les huit fast-foods concernés servent encore de la bière et des produits non halal à base de poisson ou de fromage, s'est défendu le groupe. «Quick n'exclut personne. On n'interdit pas à un musulman ou à un non-musulman de rentrer dans un restaurant.»

L'école touchée

L'émoi des premiers jours s'est heurté à la liberté du commerce. Les restaurants confessionnels fleurissent, et notamment les fast-foods halal. Le chiffre d'affaires du secteur de l'alimentation halal est évalué à 5,5 milliards d'euros en 2010, dont 1 milliard pour la restauration rapide, sachant que 5 millions de musulmans environ vivent en France, selon une étude du cabinet de conseil Solis.

Au-delà des sandwicheries spécialisées ou des kebabs, les chaînes de restauration rapide ne sont pas en reste. «La viande (exclusivement du poulet, NDLR) que nous vendons est halal», rappelle par exemple l'enseigne KFC, qui compte près de 100 restaurants en France. Mais KFC est régulièrement accusé de contourner les règles halal, en étourdissant les poulets avant leur mort, ce qui n'est pas accepté par un certain nombre de religieux. Des forums entiers sont consacrés à ces questions, car le halal est entouré de soupçon, faute d'une norme religieuse claire et d'une filière transparente.

Même ainsi, l'essor de l'alimentation halal se poursuit. Près de 60 % des «personnes d'origine musulmane», pratiquantes ou non, achètent systématiquement de la viande halal, selon une enquête Ifop révélée par Le Figaro en janvier. La progression du marché est essentiellement soutenue par la première génération des immigrés, avec «un rapport étroit à la religion». Mais, à l'instar de Quick, une nouvelle offre se développe à destination des générations suivantes qui ont «la culture de la grande surface, celle du fast-food», ­estime Abbas Bendali du cabinet Solis. Les adolescents se montrent souvent friands de halal, dans un bricolage identitaire.

La demande de viande confessionnelle touche aussi l'école. Mais la doctrine semble stabilisée, selon Christophe Herbert, qui dirige l'Association nationale des directeurs de la restauration municipale : la plupart des cantines offrent un plat de substitution les jours où le porc est au menu. Certaines villes vont plus loin et proposent des menus quotidiens sans viande, comme à Roubaix ou à Lyon. Un quart des enfants du primaire l'ont choisi, explique l'adjoint à la scolarité, Yves Fournel : «Depuis, je n'ai plus de demande de halal.»

Source : Le Figaro/AFP

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