vendredi 29 novembre 2024 02:45

Le ministre Veut faciliter l'acquisition de la nationalité

Quatre mois après l'avoir annoncée, le ministre de l'intérieur Manuel Valls a publié, jeudi 18 octobre, une circulaire pour rouvrir plus largement l'accès à la nationalité française. Il s'agit pour le gouvernement de revenir sur la très forte inflexion du nombre de naturalisations qui avait été mise en œuvre par l'ancienne majorité depuis 2010: entre 30 % à 45 % de moins.

M. Valls devait annoncer publiquement cette circulaire lors d'une cérémonie en préfecture de Toulouse de remise de certificats de nationalité à des nouveaux Français. L'accès à la nationalité "a été entravé, empêché, sans que cela ne fasse l'objet d'aucun débat, devait-il notamment justifier dans un discours. Elle ne doit être ni bradée ni reservée à une élite. (...) C'est le moteur du sentiment d'appartenance à notre nation" Au début du quinquennat de Nicolas Sarkozy, malgré un discours musclé sur l'immigration, les naturalisations – qui étaient de l'ordre de 100000 par an – avaient été préservées. Mais après le discours de Grenoble, à l'été 2010, et le choix de l'ex-majorité de s'aligner en partie sur les thèses du Front national, un tour de vis avait été effectué sous forme de consignes internes ou orales.

"RETROUVER LE RYTHME D'AVANT"

Aujourd'hui, M. Valls dit ne "pas avoir d'objectif chiffré", mais explique au Monde vouloir "retrouver le rythme d'avant". Soit celui d'avant le passage de Claude Guéant Place Beauvau, entre février 2011 et mai 2012. C'est en effet surtout à l'initiative de l'ex-secrétaire général de l'Elysée que l'accès à la nationalité a été restreint afin d'afficher des chiffres d'immigration en baisse lors de la campagne présidentielle.

Pour redresser cette courbe, la nouvelle circulaire prévoit d'assouplir les critères liés au travail, responsables d'environ 40% des refus de naturalisations. Alors qu'il fallait quasi-nécessairement être en contrat à durée indéterminée (CDI) auparavant, un CDD ou des emplois en intérim pourront suffire désormais. "L'idée est de ne plus juger le dossier d'une personne à "l'instant T", mais sur l'ensemble de son parcours professionnel, explique la Place Beauvau. Surtout en période de crise économique."

La circulaire demande aussi aux préfets de se montrer plus souples sur les dossiers des étudiants étrangers, systématiquement retoqués ces deux dernières années pour "manque de ressources". Cette disposition concerne notamment les "jeunes diplômés" ayant fait leur cursus en France. Beaucoup se retrouvaient bloqués en fin d'études pour trouver un emploi, l'embauche d'un étranger étant très contraignante. Une "meilleure prise en compte des potentiels" est en outre demandée aux préfets. En particulier celle des médecins étrangers.

"FORTE PRÉSOMPTION D'ASSIMILATION"

Autre nouveauté : le texte prévoit un examen moins restrictif des demandes de naturalisation des "jeunes de moins de 25 ans" qui résident en France depuis au moins dix ans et ont suivi une scolarité "continue" d'au moins cinq ans. Cette disposition concerne beaucoup de personnes nées à l'étranger mais arrivées en France en bas âge avec leurs parents.

Dans certaines familles, les aînés peuvent se retrouver avec un passeport étranger alors que leurs petits frères et sœurs nés en France sont français. Ces jeunes "bénéficient d'une forte présomption d'assimilation à la communauté française", justifie la circulaire.

Le ministère de l'intérieur prévoit enfin de revenir, comme le prévoit la loi, au délai de cinq ans de séjour minimum en situation régulière pour pouvoir demander la nationalité française. M. Guéant l'avait tacitement monté à dix ans. Et ce, alors que la plupart de ceux qui désirent être naturalisés font les démarches après une moyenne de seize ans passés en France.

Toujours inquiet des critiques éventuelles de l'opposition sur ces annonces relatives à l'immigration, M. Valls prévoit cependant, dans sa circulaire, de ne pas revenir sur le réhaussement du niveau de français qu'avait institué son prédécesseur. Un niveau équivalent à celui d'un "élève de troisième" sera toujours exigé aux nouveaux naturalisés ainsi qu'un certain nombre de connaissances sur l'histoire de France.

La nouvelle circulaire supprime néanmoins le système du questionnaire à choix multiples (QCM) qui faisait polémique depuis son entrée en vigueur le 1er juillet. Une revendication ancienne des associations de défense des étrangers est par ailleurs en partie satisfaite : les personnes de plus de 65 ans seront désormais exemptées de fournir une attestation de l'évaluation de leur niveau de français.

"CHARTE DES DROITS ET DES DEVOIRS"

Par souci d'affichage et pour soigner son aile droite, le ministre rappelle toutefois par une autre circulaire publiée ce jeudi 18 octobre, la nécessité de faire "signer" la "charte des droits et des devoirs" aux nouveaux Français. Un document en vigueur depuis le mois de janvier, mais qui selon son cabinet "n'était pas bien appliqué". La charte rappelle notamment que la "France est une république laïque". L'idée de sa création avait germé dans l'opposition lors du débat sur l'identité nationale.

Le changement de cap politique sur les naturalisations devrait se poursuivre, a annoncé le ministre de l'intérieur, par une deuxième circulaire "début 2013". Son contenu dépendra en partie des conclusions d'une mission parlementaire confiée au député PS de Marseille, Patrick Mennucci. Elle dépendra aussi d'une mission de l'inspection générale sur la régionalisation, depuis 2010, de l'examen des demandes de naturalisation, qui fait l'objet de nombreuses critiques.

19/10/2012, Elise Vincent

Source : Le Monde

Google+ Google+