On le sait, le Maroc fait l’actualité en matière de migration. Arrivée massive des migrants subsahariens, accueil des réfugiés, refoulements aux frontières, régularisation des sans-papiers, débat sur l’intégration, violence contre les migrants irréguliers et la liste est longue.
La politique nationale en matière de migration semble devenir un sujet de débat et de controverses qui suscite les polémiques au niveau national comme à l’international. Pourtant, ce thème demeure encore l’objet de stéréotypes, de caricatures, de simplismes, de mise en scène et de dramatisation. C’est le cas du traitement de ce sujet notamment dans les médias internationaux qui ressassent leurs propres stéréotypes et excellent dans les approximations et les dérives. Tel est le cas d’un article paru récemment sur le site « The promised Land » sous le titre : « Les migrants d’Afrique noire soumis à une discrimination continuelle » et qui reprend à la lettre un article paru sur le New York Times.
Selon le rédacteur de cet article, le Maroc compte actuellement entre 15 et 20.000 migrants en situation irrégulière qui font l’objet d’ « attaques haineuses » et de viols. A titre d’exemple, il cite la mort d’un jeune Sénégalais poignardé à Rabat le 12 août dernier et le décès d’un Congolais éjecté d’un autocar en marche par la police marocaine.
Mieux, le New York Times rapporte le témoignage d’un autre migrant originaire du Niger selon lequel « les Marocains pensent qu’ils peuvent faire ce qu’ils veulent des migrants » et « la police leur arrache leurs cartes d’identité et les arrête ». Pis, les populations marocaines se boucheraient le nez au passage des migrants.
Même son de cloche d’un autre migrant. Un Camerounais de 20 ans a dit que sa vie au Maroc est devenue un cauchemar et qu’il n’a jamais imaginé un seul instant qu’elle serait ainsi.
Ces migrants n’auraient aujourd’hui qu’un seul rêve, rapporte le quotidien américain, celui de rentrer chez eux.
Une conclusion que partagent les signataires d’un reportage sur la migration au Maroc diffusé sur France 24. Pour eux aussi, les migrants irréguliers sont victimes d’une violence quotidienne et d’un racisme omniprésent. Selon certains témoignages révélés par des migrants clandestins soi-disant interviewés, les Marocains n’aiment pas les noirs et interdisent à ces derniers de travailler, voire de simplement s’asseoir à côté de leurs femmes. « Ils nous traitent de singes », a lancé un autre migrant. Une militante d’une association défendant les droits des migrants va plus loin. Elle évoque une politique étatique de discrimination, voire un racisme institutionnel. Donc, et d’après ces deux supports médiatiques, le Royaume ressemblerait à un grand camp de concentration où les migrants sont maltraités, violentés, violés voire assassinés. Une représentation partiale, partielle et réductrice qui fait des Marocains des bourreaux et des migrants leurs victimes. Ces couvertures médiatiques risquent d’alimenter des tensions éventuelles. S’il est vrai que les excès et les dérives des forces de l’ordre existent et que certaines pratiques discriminatoires ou de rejet existent chez certains Marocains, il n’en demeure pas moins que la réalité est plus complexe et plus difficile à cerner. L’ensemble des Marocains est loin d’être raciste et les enjeux et les défis qu’imposent les questions migratoires sont plus profonds. Ce que le New York Times et France 24 semblent sinon méconnaître, du moins ignorer allègrement.
1 Avril 2014, Hassan Bentaleb
Source : Libération