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Les députés des Français de l'étranger, à quoi ça sert?

L'Assemblée nationale accueillera au mois de juin prochain onze nouveaux députés : ceux représentant les Français de l'étranger. Le premier tour du scrutin pour les expatriés a ainsi lieu les 2 et 3 juin, une semaine avant tout le monde. LeJDD.fr revient sur cette situation inédite dans la vie politique française.

C'est une première dans l'histoire de la République. Les Français résidant à l'étranger pourront voter lors des élections législatives pour élire un député qui les représentera à l'Assemblée nationale. Une situation inédite rendue possible par la révision de la Constitution française en juillet 2008. Jusque-là, celle-ci stipulait que seuls les sénateurs représentaient ces citoyens. Depuis 1983, le palais du Luxembourg en compte ainsi douze, élus au suffrage indirect par 155 "conseillers", membres de l'Assemblée des français de l'étranger.

Désormais, 1,1 million d'électeurs expatriés (sur les 1,6 inscrits sur les registres consulaires en 2011) sont appelés à désigner leurs onze futurs députés. Ils voteront même avant tous les autres Français, puisque le premier tour aura lieu les 2 ou 3 juin selon les régions, soit une semaine avant le reste du pays. Le second tour, en revanche, aura lieu les 16 et 17 juin, comme pour leurs compatriotes. Pour l'heure, près de 130.000 Français de l'étranger ont déjà voté par Internet, au cours d'un scrutin numérique - là encore inédit - qui a duré six jours et s'est conclu mardi. Les autres voteront dans les 800 bureaux de vote ce week-end.

Un découpage partisan?

Mais pourquoi avoir attendu 2012 pour faire voter les Français de l'étranger à une élection nationale? "Le constat était simple : il y a de plus en plus de Français expatriés", explique au JDD.fr le député UMP Charles de la Verpillière, auteur du rapport parlementaire en 2009 portant sur la répartition des sièges de députés et la délimitation des circonscriptions aux législatives, dont celles de l'étranger. "L'idée était de ne pas perdre le contact avec eux, pour faire rayonner la France sur le plan économique et culturel. Donc nous avions intérêt à garder un lien avec ces Français, en les impliquant dans la vie politique du pays", poursuit l'élu de l'Ain.

En 2008 pourtant, la gauche avait critiqué un projet destiné à donner à la droite de nouveaux députés. Les résultats de la dernière présidentielle lui donnent raison : Nicolas Sarkozy est arrivé en tête lors du second tour dans huit des onze circonscriptions en question. "Il n'y a pas besoin d'être grand clair pour voir ce qui se passe", affirme au JDD.fr la sénatrice socialiste des Français de l'étranger, Claudine Lepage. "Quand on rattache Israël, qui vote fortement à droite, à la Turquie, l'Italie et la Grèce, qui votent à gauche, ce n'est pas un hasard (62.000 électeurs sont inscrits en Israël sur les 110.000 de la circonscription, Ndlr). Quand on rattache Monaco à l'Espagne et au Portugal, ce n'en est pas un non plus", explique-t-elle. Pour l'élue PS, il y a donc bien eu des arrière-pensées qui ont mené à un tel découpage électoral.

"Il peut y avoir des surprises, les jeux sont loin d'être faits"

"C'est un mauvais procès", répond l'UMP Charles de la Verpillière. "Cela ne porte que sur onze sièges, ce n'est pas cela qui va changer la face de l'Assemblée. Il ne faut pas exagérer l'enjeu", poursuit le député. Selon lui, le taux de participation à l'occasion de ces premières élections législatives rend les scrutins imprévisibles. Lors du second tour de la présidentielle, seuls 42,18% de ces "expats" ont voté, un score deux fois inférieur à la moyenne nationale. "Il peut y avoir des surprises, les jeux sont loin d'être faits", affirme l'élu de droite.

Ce dernier fait également valoir un découpage "difficile" à réaliser : "Il y a des zones entières où la densité de Français est très faible, cela amenait donc à faire des circonscriptions gigantesques", indique-t-il, faisant allusion à la 11e d'entre elle - regroupant l'Asie, l'Océanie et une partie de l'Europe de l'Est - qui compte près de 80.000 inscrits. "A l'inverse, il y a beaucoup d'électeurs en Amérique du Nord", ajoute l'ancien rapporteur, alors que la 1ère circonscription, réunissant les Etats-Unis et le Canada, compte plus de 157.000 électeurs.

"Le travail parlementaire en sera plus efficace"

Sur ce point, la sénatrice socialiste a elle aussi conscience qu'il fallait réaliser "un savant calcul géographique et démographique". "On n'allait pas retirer des électeurs aux Etats-Unis pour les mettre en Amérique du Sud", concède-t-elle. De plus, au-delà des intérêts politiques prêtés à l'ancienne majorité, Claudine Lepage ne remet pas en cause l'existence même de ces nouvelles circonscriptions. Selon elle, il s'agit d'"une bonne décision", qui "équilibre" la représentation au Sénat et à l'Assemblée. "Le travail parlementaire en sera plus efficace", dit-elle. "Lorsque l'on discutait d'un texte au Parlement, les sénateurs des Français de l'étranger devaient trouver des collègues à l'Assemblée nationale qui voulaient bien se saisir du sujet, ce qu'ils faisaient avec plus ou moins d'enthousiasme", explique-t-elle.

Enfin, Charles de la Verpillière voit également en ces nouveaux députés la possibilité pour les Français de l'étranger d'être mieux représentés. "Puisque les expatriés ne participent pas aux élections sénatoriales", rappelle-t-il. "Les députés auront une légitimité plus grande", estime-t-il, notant également que chaque électeur aura "son" propre élu, grâce au découpage territorial. Ce n'est pas le cas pour les douze sénateurs qui, eux, représentent l'ensemble des citoyens vivant à l'étranger et qui travaillent surtout par thématique. Ainsi, pour la socialiste Claudine Lepage, qui s'occupe des questions liées à l'éducation, ce "travail sera complémentaire".

31 mai 2012, Arnaud Focraud

Source : leJDD.fr

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